Lorsqu'il disparaît au Haut-Vernet, le 8 juillet dernier, le petit Emile est sous la surveillance de ses grands-parents maternels. Parmi les nombreuses pistes explorées par la police française depuis la disparition du garçon de deux ans et demi dans les Alpes-de-Haute-Provence, le passé du grand-père intéresse les enquêteurs.
Philippe V., 58 ans, kiné-ostéopathe, est décrit comme un patriarche autoritaire, éduquant ses enfants et petits-enfants dans un catholicisme traditionaliste dur, avec messes en latin et chants grégoriens. Mais surtout, l'homme est cité comme témoin assisté dans une affaire judiciaire de violences sur mineurs au sein d’une communauté religieuse dans le Nord de la France.
C’est le Canard Enchaîné qui s’est penché cette semaine sur le profil du grand-père. Peu après la disparition du garçon de deux ans et demi, le caractère autoritaire de l'homme de 58 ans avait déjà intéressé les enquêteurs. Il s'était défendu, en septembre, dans une interview pour le média Famille Chrétienne.
Un intérêt fortement marqué pour la religion qui imprègne la vie du grand-père depuis sa jeunesse.
Dans les années 1990, le jeune Philippe V. est âgé d'une vingtaine d'années lorsqu'il se rapproche de la communauté traditionaliste de Riaumont, à Liévin, dans le Pas-de-Calais. Au sein de cette institution religieuse, fondée en 1958, on compte un village d'enfants (ouvert jusqu'en 2019) où sont placés notamment des garçons en difficulté. On y trouve aussi une association de scouts et une communauté traditionaliste.
Le jeune homme, fervent catholique, a d'abord pour ambition de devenir prêtre, mais il tombe amoureux. Il renonce finalement à se consacrer à son projet d'être un homme de Dieu, préférant se marier. A Riaumont, entre 1991 et 1994, celui qui se fait appeler Frère Philippe travaille comme encadrant dans cet internat de garçons de bonnes familles et d'adolescents en décrochage scolaire. Mais plus que de simples encadrants, les adultes, religieux et laïcs, y occupent un rôle de seconde famille.
Il y est déjà qualifié d'«homme autoritaire». Frère Philippe distribuerait des «tartes mémorables» aux pensionnaires qui font preuve d'insolence.
Vingt ans plus tard, des anciens élèves de Riaumont déposent plusieurs plaintes. Certains dénoncent des cas de maltraitance. Philippe est auditionné par la police judiciaire de Lille, et reconnaît des punitions «un peu sévères» sur les enfants. «Quelques gifles, mais pas souvent». Ce sont un peu moins de 200 personnes, dont de nombreux anciens pensionnaires, qui sont entendus par la police.
Des plaintes pour des faits de violences physiques sont déposées, mais aussi pour des violences sexuelles, allant, dans le pire des cas, jusqu'au viol. Toujours selon Le Parisien, l'ancien prieur de l’établissement, André H., est mis en examen pour agression sexuelle sur mineur de 15 ans. Les faits qui lui sont reprochés remonteraient au début des années 1990.
C’est dans ce contexte qu’apparaît le nom de Philippe V., à l’époque Frère Philippe, sous le statut de «témoin assisté», écrit le média français. Une information confirmée par des sources judiciaires, connues des gendarmes en charge de l’affaire du petit Emile, et qui a suscité l'intérêt des forces de l’ordre, même s'il n'y a pas de lien direct avec la disparition de l'enfant.
Le grand-père, avec sa personnalité jugée autoritaire ou colérique par certains anciens pensionnaires de l’institution religieuse, n'est pas le seul membre de la famille du petit Emile qui a intéressé les enquêteurs. Lors du traitement d'antécédents judiciaires par la police, le nom du père du garçonnet est également apparu dans une autre affaire.
Selon BFM DICI, l'homme a été jugé en mai 2018 au tribunal d'Aix-en-Provence. Appartenant au groupuscule d'extrême droite «Bastion Social», il était soupçonné de violences racistes. Un groupuscule dissout l'année suivante par le ministre français de l'Intérieur de l'époque, Christophe Castaner.
Les deux hommes se sont constitués partie civile dans l'enquête sur la disparition du petit Emile, tout comme cinq autres membres de la famille, à savoir la mère du garçon, la grand-mère maternelle, et les grands-parents paternels. Voilà plus de huit mois que le petit blondinet est introuvable.