Pourquoi des soldats suisses en Ukraine seraient «acceptables»
Des soldats suisses seraient «acceptables» pour Moscou et Kiev pour observer un cessez-le-feu, estime Thomas Greminger. Pendant sa présidence de l'OSCE, en cas d'avancée sur ce conflit, Berne pourrait relancer une réflexion sur l'ordre sécuritaire européen, dit-il.
L'ancien secrétaire général de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) insiste sur la distinction à faire entre de futures garanties de sécurité pour l'Ukraine et l'observation d'un cessez-le-feu. Pour la seconde, «peut-être les Russes accepteront un jour des troupes mandatées par le Conseil de sécurité sur le territoire ukrainien. Je ne l'exclus pas», affirme le directeur du Centre de politique de sécurité de Genève (GCSP), alors que son institution fête ses 30 ans.
Moscou semble vouloir plutôt un mécanisme bilatéral avec un ou quelques pays en observation.
Mais «tout dépendrait aussi de la qualité du cessez-le-feu» «S'il est politiquement douteux, je ne pense pas que la politique suisse serait disposée», ajoute Greminger.
Tâche difficile pour la Suisse
Le GCSP a récemment publié des lignes directrices en cas de cessez-le-feu dans lesquelles il recommande une opération d'observation multilatérale, mais Greminger admet qu'il faut peut-être les adapter pour un dispositif moins ambitieux comme celui entre les deux Corées, où la Suisse est présente.
En revanche, la Russie ne veut pas des troupes de pays de l'OTAN sur le territoire ukrainien pour offrir des garanties de sécurité. «Elle devra donner une contrepartie à l'Ukraine» si Kiev ne rejoint pas l'Alliance atlantique, selon Greminger.
Plus largement, la volonté politique d'une détente est absente. Contrairement à la période de la Guerre froide, aucun dirigeant ne semble vouloir lancer un processus. Présidente de l'OSCE en 2026, la Suisse aura la tâche difficile sur cette question.
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«Il faut d'abord certaines avancées sur le dossier ukrainien», insiste le directeur du GCSP. En cas de négociations simultanées, comme le souhaite Moscou, sur le principe d'une résolution du conflit et sur des modalités de cessez-le-feu, la Suisse pourrait relancer «une réflexion informelle sur l'ordre sécuritaire européen».
Deux défis institutionnels
Depuis trois ans, le GCSP a réuni à plusieurs reprises des experts américains, russes et ukrainiens dans un format conjoint. Ces travaux, et ceux du centre sur une analyse des liens entre les différents acteurs pour aboutir à la paix, pourraient alimenter cette discussion au niveau gouvernemental, estime Greminger.
Il recommande plutôt que la Suisse établisse plusieurs scénarios. Elle aura réussi plus largement sa présidence si elle arrive à résoudre un ou deux défis institutionnels, comme celui d'un budget régulier pour l'OSCE.
En revanche si la Russie relance le débat d'une sortie de l'institution, «ce serait le début de la fin» pour l'organisation, dit l'ancien secrétaire général. Et tout en ajoutant que la Suisse ne pourra pas contrôler de nombreux facteurs.
La crise ukrainienne et les tensions internationales ont renforcé le rôle informel du GCSP à Genève. Faute de ressources, celui-ci ne peut répondre à toutes les demandes, dit son directeur. (jzs/ats)