L'appel de Volodymyr Zelensky était clair: «Investissez dans l'Ukraine, et vous investirez aussi dans votre sécurité», a déclaré le président ukrainien au Forum économique mondial (WEF) de Davos. Son homologue russe Vladimir Poutine est un «prédateur», a-t-il ajouté. En clair: une fois qu'il aura dévoré l'Ukraine, il s'attaquera aux autres pays de l'Otan.
En effet, les experts en sécurité élaborent déjà des scénarios selon lesquels une attaque russe contre l'Occident est plus probable que ce que l'on peut croire aujourd'hui dans les capitales européennes.
Qu'en est-il donc des investissements occidentaux en matière de sécurité? Alors qu'aux Etats-Unis, les aides à l'Ukraine restent provisoirement bloquées en raison du différend budgétaire, les Européens devraient bientôt mettre en place un important plan de soutien financier. D'un montant de 50 milliards d'euros, il contribuera au financement de l'Etat ukrainien pour les quatre prochaines années. Le Premier ministre hongrois Viktor Orbán, proche de Poutine, y est opposé. Mais, en cas de nécessité, les chefs d'Etat et de gouvernement de l'UE trouveront un moyen de le contourner.
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La situation est plus compliquée en ce qui concerne l'aide militaire. Avec plus de 40 milliards d'euros, les pays de l'UE ont massivement augmenté leur part et rattrapé les Américains, comme le montrent les chiffres collectés par l'Institut pour l'économie mondiale de Kiel. L'Allemagne arrive en deuxième position, avec 17 milliards d'euros, suivie par le Royaume-Uni (près de 7 milliards).
Mais ce n'est pas encore assez. Le chancelier allemand Olaf Scholz a tenté de secouer ses partenaires la semaine dernière. L'Europe doit en faire plus, a-t-il affirmé, en exigeant que chacun dise d'ici début février combien il va mettre à disposition cette année.
Scholz visait surtout un pays: la France. Avec seulement 570 millions d'euros, la première puissance militaire du continent est en effet loin derrière. L'Espagne (360 millions) et l'Italie (730 millions) s'engagent également bien en deçà de leurs possibilités.
Des pays beaucoup plus petits comme la Norvège, le Danemark, la Suède et les Pays-Bas fournissent un nombre d'équipements militaires bien plus important, non seulement en termes relatifs, mais aussi en chiffres absolus. D'ailleurs, tous secteurs confondus, la France s'est montrée moins généreuse (1,7 milliard) que la Suisse (2,3 milliards) avec Kiev. Comment cela se fait-il?
Pour situer les chiffres, il convient de préciser que tous les pays ne sont pas aussi transparents sur leurs livraisons. La France, par exemple, a longtemps défendu l'idée que les détails de ses livraisons d'armes ne devaient pas être rendus publics. L'institut économique de Kiel part néanmoins du principe que les ordres de grandeur sont corrects.
Une autre question est celle de l'efficacité des armes livrées et du timing, sur laquelle les chercheurs en économie ne font aucune évaluation.
Les pays d'Europe de l'Est ont vidé leurs magasins, fournissant à l'Ukraine une grande quantité de vieilles armes issues de leurs stocks soviétiques. La France a choisi un autre approche, en livrant très tôt des armements modernes, comme les canons Caesar. Aujourd'hui encore, ceux-ci rendent d'excellents services sur le champ de bataille et sont très appréciés des Ukrainiens, confirme l'expert militaire Gustav Gressel.
Il en va de même pour les missiles de croisière de haute précision Scalp et Storm Shadow, leur version britannique. Grâce à eux, les Ukrainiens ont pu effectuer plusieurs frappes spectaculaires, dont celle qui a coulé le grand navire de débarquement russe Novotcherkassk en Crimée. Olaf Scholz craint en revanche le «potentiel d'escalade» de telles armes et refuse de livrer les missiles allemands Taurus.
Emmanuel Macron a récemment annoncé que l'Ukraine recevra 40 missiles de croisière Scalp supplémentaires, ainsi que «plusieurs centaines de bombes» et de nouveaux obusiers Caesar. Le mois prochain, il prévoit en outre de se rendre en Ukraine pour signer un accord bilatéral avec des garanties de sécurité, comme le Royaume-Uni l'a dernièrement fait avec Kiev.
Traduit et adapté par Noëline Flippe