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Guerre contre l'Ukraine

Ukraine: à Avdiivka, les pertes se multiplient sans vainqueur

L'offensive russe galère, mais les Ukrainiens n'en profiteront pas

Malgré d'immenses pertes, l'offensive hivernale de Poutine n'a pas encore réussi à percer. Mais comme les Ukrainiens manquent d'obus d'artillerie, ce n'est sans doute plus qu'une question de temps avant qu'ils ne soient obligés de se replier sur certaines parties du front.
07.02.2024, 06:0007.02.2024, 11:28
Kurt Pelda, Berdychi / ch media
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Le brouillard s'accroche aux arbres déchiquetés, la visibilité atteint parfois à peine 50 mètres. C'est le temps idéal pour tenter une excursion à proximité de la ville d'Avdiïvka, âprement disputée depuis plus de trois mois. La guerre a beaucoup changé ces derniers temps, et cela influence également les risques auxquels les journalistes s'exposent sur la zone du front.

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Avdiivka, carte de situation.
Image: watson

Même si les tirs d'artillerie, les roquettes et les bombes planantes continuent de représenter un grand danger, les drones équipés d'engins explosifs deviennent un problème de plus en plus important. Les deux parties utilisent des «drones kamikazes» pour attaquer les bunkers, les maisons et même les véhicules à l'arrière du front.

Lors d'une visite au front, le président Zelensky prend un selfie à l'entrée d'Avdiivka.
Lors d'une visite au front, le président Zelensky prend un selfie à l'entrée d'Avdiivka. keystone

Le brouillard nous aide

Les Russes et les Ukrainiens ont récemment augmenté leur arsenal de drones et le nombre de leurs pilotes. Parfois, les Ukrainiens tentent même de compenser le manque de munitions en utilisant davantage d'objets volants sans pilote.

Les drones de toutes sortes sont utilisés depuis longtemps par les armées du monde entier, mais ils étaient autrefois très coûteux. Il est donc presque révolutionnaire de constater qu'il est possible de transformer aussi aisément des produits de masse bon marché en une arme puissante. Ces quadricoptères sont désormais plus précis et surtout beaucoup moins chers que les grenades d'artillerie, tout en ayant une portée comparable.

Mais le brouillard limite aussi la visibilité des caméras des drones, nous n'avons donc pas trop de soucis à nous faire. Sur la route partiellement verglacée, un vieil homme émerge. Il transporte quelques bidons d'eau sur un traîneau. L'approvisionnement en eau, en électricité et en gaz s'est effondré depuis longtemps dans la région d'Avdiivka.

Un obusier automoteur ukrainien tire sur des positions russes. La pénurie de munitions s'aggrave.
Un obusier automoteur ukrainien tire sur des positions russes. La pénurie de munitions s'aggrave. getty image

La ville, qui comptait autrefois 40 000 habitants avant la guerre, est encerclée sur trois côtés. Le «tuyau» qui mène de l'ouest à la grande usine de charbon et à Avdiïvka était large d'environ 9000 mètres à son point le plus étroit avant le début de l'offensive russe début octobre. Entre-temps, il ne fait plus que 6600 mètres environ.

Le brouillard et la poudrerie nous protègent des attaques de drones. Le journaliste Kurt Pelda visible dans le retroviseur.
Le brouillard et la poudrerie nous protègent des attaques de drones. Le journaliste Kurt Pelda visible dans le rétroviseur.Image: Stefan Graf

Un massacre épouvantable

Pour la modeste avancée de 2400 mètres, de nombreux soldats russes ont perdu la vie: en décembre encore, le gouvernement américain estimait que plus de 13 000 soldats russes avaient été tués depuis le début de la grande attaque sur Avdiïvka. En outre, plus de 220 véhicules russes, dont de nombreux chars, auraient été détruits. Ces chiffres ont encore augmenté de manière drastique depuis lors.

Les véhicules ukrainiens profitent du brouillard pour arriver indemnes à Avdiivka.
Les véhicules ukrainiens profitent du brouillard pour arriver indemnes à Avdiivka. stefan graf

En revanche, l'Ukraine n'aurait eu à déplorer que quelques milliers de morts. Les envahisseurs n'ont pourtant pas réussi à s'emparer de l'immense usine de charbon située à l'entrée de la ville ni à couper la dernière voie de ravitaillement qui mène de l'ouest à l'usine puis à la ville d'Avdiivka. Toutefois, les Russes ont récemment réussi à pénétrer pour la première fois dans la ville par le sud.

Ils ont creusé un fossé d'environ deux kilomètres de long entre les positions ukrainiennes. Ils s'approchent également de la ville par le nord. Pour rappel, les troupes de Poutine n'ont jamais réussi à encercler Bakhmout non plus, mais les mercenaires de Wagner ont fini par s'emparer de toute la localité.

Nous traversons le hameau de Berdychi. De là aux positions russes les plus proches, il n'y a que deux kilomètres. La zone à l'est du petit village est jonchée de cadavres de soldats russes et de chars détruits.

Avdiivka, Berdychi et Donetsk.
Image: watson

Des chars de grenadiers anciens, mais qui ont fait leurs preuves

Pourquoi la résistance des Ukrainiens sur cette partie du front est-elle si efficace? L'une des raisons se cache dans les nombreuses bandes de terre boisées qui entourent les champs pour les protéger du vent: là ce sont des véhicules de combat d'infanterie américains de type Bradley, renforcés par un blindage supplémentaire, qui veillent. L'un d'eux reste à l'affût, le moteur en marche pour que l'équipage n'ait pas froid.

Un véhicule de combat d'infanterie Bradley change de position.
Un véhicule de combat d'infanterie Bradley change de position.Image: Stefan Graf

Il est vrai que le Bradley a une allure étrange, il semble bien trop haut pour un char de grenadiers, ce qui en fait une silhouette visible de loin et une cible de taille. Pourtant, ce monstre, rendu célèbre autrefois en Irak avec l'opération «Tempête du désert» et qui a aujourd'hui une quarantaine d'années d'existence, a fait ses preuves en Ukraine.

Une distance de plusieurs centaines de mètres est maintenue entre chaque char dans les bandes forestières afin qu'une frappe d'artillerie russe ou une attaque de drone ne puisse pas menacer plus d'un véhicule.

Les pilotes de drones ukrainiens surveillent de près le front, qui passe ici un peu à l'ouest d'une ligne de chemin de fer. S'ils repèrent les prémices d'une attaque russe, infanterie ou chars, ils alertent les équipages des Bradley. Les véhicules de combat d'infanterie se rendent alors sur des positions plus proches du front. Là, on entend peu après leurs canons automatiques de 25 millimètres tirer rapidement et qui peuvent – avec un peu de chance – mettre hors d'état de nuire des chars de combat russes modernes.

Négligence dans la construction de positions

Mais les tirs au 25 millimètres du Bradley ont également un effet dévastateur lorsque les fantassins russes avancent et se cachent dans des bandes forestières ou des tranchées et abris improvisés. A l'ouest de la ligne de chemin de fer, les Ukrainiens ont pu créer, avec leur artillerie, leurs drones et leurs Bradley une zone de mort que les Russes tentent en vain de franchir depuis plus de trois mois. Les Ukrainiens protègent ainsi les dernières routes goudronnées, par lesquelles ils approvisionnent Avdiïvka, devenue une vraie forteresse.

L'épais brouillard nous aide aussi à quitter relativement sans danger la zone de front par un autre chemin. Pendant un certain temps, nous suivons un Bradley accompagné d'une jeep datant de l'époque soviétique. Alors que nous sommes déjà dans l'arrière-pays, nous voyons, à côté de la route, un char du génie creuser à la pelle des tranchées et des fosses qui seront ensuite aménagées en abris avec des troncs d'arbres et des sacs de sable.

Le terrain est boueux, la construction de la position est pénible. Après avoir négligé de manière coupable la construction de positions de repli l'automne dernier, l'armée procède maintenant à des améliorations dans des conditions déplorables. Si le front ne tient pas à Avdiivka, les défenseurs peuvent ainsi se replier sur la ligne de défense suivante.

Un char de combat ukrainien détruit près d'Avdiivka.
Un char de combat ukrainien détruit près d'Avdiivka. stefan graf

Comme l'Occident ne livre pas assez d'armes, la pénurie d'obus d'artillerie a pris entre-temps des allures menaçantes. Ce n'est donc plus qu'une question de temps avant que les Ukrainiens ne se retirent de certains tronçons du front. Ils pourraient ainsi sauver des unités de troupes expérimentées dans la guerre au lieu de les gaspiller dans des batailles d'usure inutiles.

Mais cela ne signifierait pas encore une défaite complète, car les zones disputées le long du front d'environ mille kilomètres sont immenses. En se retirant, les voies de ravitaillement des Russes deviendraient de plus en plus longues et vulnérables. Ce fait a déjà contraint Moscou à se retirer du nord de l'Ukraine au printemps 2022. Même si les Ukrainiens sont désormais sur la défensive depuis des mois, l'issue de la guerre est loin d'être décidée.

(Traduit et adapté par Chiara Lecca)

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