La Russie finit par quitter Kherson: le point sur la nuit
La Russie a essuyé mercredi un nouveau revers majeur dans son assaut contre l'Ukraine en se résolvant au retrait de ses forces de Kherson. Une capitale régionale du sud ukrainien cible d'une contre-offensive de l'armée de Kiev.
Ce repli, décidé après le déplacement de quelque 115 000 habitants de la région de Kherson par les forces d'occupation russes, sonne comme une cinglante défaite pour Moscou, déjà contraint d'abandonner la région de Kharkiv (nord-est) en septembre.
Il intervient aussi alors que Vladimir Poutine avait justement ordonné le 21 septembre la mobilisation de quelque 300 000 réservistes pour consolider les lignes russes. Des dizaines de milliers d'entre eux sont déjà dans des zones des combats.
«Procédez au retrait des troupes», a déclaré le ministre russe de la Défense Sergueï Choïgou lors d'une réunion avec le commandant des opérations russes en Ukraine, le général Sergueï Sourovikine, qui venait de préconiser cette décision «pas du tout facile» à prendre.
Le symbole est d'autant plus fort que Kherson, 280 000 habitants avant le conflit, est la seule capitale régionale conquise par les forces russes, au début de leur offensive en Ukraine.
Elle fait aussi partie des quatre zones de l'Ukraine dont Poutine a revendiqué l'annexion par Moscou il y a six semaines. Le président russe a célébré ces annexions lors d'un concert sur la Place Rouge, sous des banderoles proclamant que la Russie y serait présente «pour toujours».
Kiev circonspect
Mais l'annonce du retrait russe a été accueillie avec circonspection par Kiev, qui soupçonne Moscou de vouloir attirer ses forces dans une difficile bataille urbaine à Kherson.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a ainsi déclaré mercredi soir que son pays réagissait avec une «extrême prudence» à l'annonce du retrait russe:
«Nous ne voyons aucun signe que la Russie quitte Kherson sans combattre. Une partie des (troupes) russes est maintenue dans la ville», avait auparavant déclaré un conseiller de la présidence ukrainienne, Mykhaïlo Podoliak.
«Je pense qu'ils mijotent quelque chose (...), peut-être une sorte de piège. Je ne crois pas qu'ils vont se rendre», estime Serguiï Filontchouk, un habitant de Kiev interrogé par l'AFP.
«Protéger les soldats russes»
Concrètement, le ministre russe de la Défense a ordonné aux combattants russes de se retirer de la rive occidentale du Dniepr, où se trouve Kherson, pour établir une ligne de défense sur la rive orientale de ce fleuve qui représente un obstacle naturel.
Le Kremlin a repoussé aussi longtemps que possible ce retrait humiliant, mais la situation était devenue de plus en plus difficile face à une armée ukrainienne visant les lignes d'approvisionnement russes à l'aide d'armements modernes livrés par les Occidentaux .
La région de Kherson est d'autant plus stratégique que son territoire est frontalier de la Crimée, péninsule ukrainienne annexée par Moscou en 2014.
Le général Sourovikine a justifié mercredi le repli par sa volonté de protéger les vies des soldats russes. Vladimir Poutine ne s'est pas exprimé sur ce retrait, mais des proches du Kremlin, comme le fondateur du groupe paramilitaire Wagner, Evguéni Prigojine, et le dirigeant tchétchène Ramzan Kadyrov, ont défendu la mesure.
Populations déplacées
Poutine a prévenu que la Russie défendrait «par tous les moyens» ce qu'elle considère comme son territoire, d'autres hauts responsables russes brandissant explicitement un possible recours à l'arme nucléaire.
Le général Sourovikine a aussi annoncé mercredi que les autorités d'occupation avaient procédé ces dernières semaines à l'«évacuation» de 115 000 personnes de la rive droite vers la rive gauche du Dniepr. L'Ukraine a dénoncé ces déplacements de population, les qualifiant de «déportation».
Autre signe de la situation chaotique à Kherson, l'un des plus hauts responsables de l'occupation russe, Kirill Stremooussov, est mort mercredi, selon les autorités locales, dans un «accident de la route» aux circonstances non explicitées.
Alors que l'offensive russe entre bientôt dans son neuvième mois, l'Occident a continué de réaffirmer son soutien militaire, logistique et financier à Kiev.
Soutien occidental
La Commission européenne a proposé mercredi aux Vingt-Sept pays membres d'accorder à l'Ukraine une aide de 18 milliards d'euros pour 2023, sous forme de prêts.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky a salué «la solidarité» de l'UE, au moment où Kiev s'inquiète d'un éventuel affaiblissement du soutien américain après des élections de mi-mandat aux Etats-Unis à l'issue encore incertaine, même si la Maison Blanche a assuré que son appui serait «infaillible». (ats/jch)
