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Guerre nucléaire: Poutine répond aux inquiétudes américaines

Un missile balistique intercontinental Sarmat lancé dans le nord-ouest de la Russie.
Un missile balistique intercontinental Sarmat lancé dans le nord-ouest de la Russie.Keystone

Guerre nucléaire: Poutine répond aux inquiétudes américaines

Une commission américaine met en garde contre une guerre nucléaire avec la Russie et la Chine. Vladimir Poutine dément. Pourtant, la propagande du Kremlin tourne déjà à plein régime.
17.10.2023, 18:5018.10.2023, 12:16
Christoph Cöln / t-online
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Vladimir Poutine s'est exprimé dans une interview sur un éventuel conflit entre les Etats-Unis d'une part et la Russie et la Chine d'autre part. «Nous nous préparons à la guerre, mais nous voulons la paix», a déclaré le président russe dans l'émission Moscou. Kremlin. Poutine.

Lors d'un entretien avec le propagandiste russe Pavel Zaroubine, Poutine a commenté la recommandation d'un organe non partisan du Congrès américain (Congressional Commission on the Strategic Posture of the United States) de se préparer à une guerre sur deux fronts.

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La commission américaine avait présenté jeudi un rapport dans lequel elle plaidait pour que les Etats-Unis envisagent, dans leurs réflexions sur la stratégie militaire, une guerre avec les grandes puissances nucléaires que sont la Russie et la Chine. Ces réflexions ont notamment pour toile de fond la coopération toujours plus étroite entre la Chine et la Russie depuis le début de la guerre en Ukraine.

La Commission recommande donc au gouvernement américain de continuer à développer les forces conventionnelles des Etats-Unis, de renforcer les alliances stratégiques avec les alliés et d'accélérer le programme de modernisation de l'arsenal nucléaire américain. Dans le conflit qui oppose les grandes puissances nucléaires, le rapport pourrait être à l'origine d'une nouvelle aggravation des tensions.

Lutter contre le «démon américain»

Les relations diplomatiques entre la Russie, la Chine et les Etats-Unis sont au plus bas depuis le début de la guerre en Ukraine. Vladimir Poutine a annoncé une visite à Pékin pour la fin de cette semaine. Selon le Kremlin, un tête-à-tête avec le chef d'Etat chinois Xi Jinping devrait figurer au programme. Le ministre russe des Affaires étrangères Sergueï Lavrov se trouve déjà depuis dimanche dans la capitale chinoise pour des consultations préparatoires entre les alliés.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a affirmé, cité par l'agence de presse Tass:

«L'attention de la communauté mondiale est très grande, parce que la Russie comme la Chine jouent un rôle très important dans les affaires internationales. Et leur importance ne cesse de croître»
Dmitri Peskov

Selon plusieurs experts, la coopération entre la Russie et la Chine n'est pas du tout un rapport entre partenaires égaux, car Poutine serait trop dépendant du bon vouloir du régime communiste de Pékin. Elle s'inscrit cependant dans la nouvelle stratégie de propagande de Poutine: ce dernier tente depuis peu de se mettre en scène en tant que défenseur des intérêts des pays du Sud contre le «démon américain». La violence, même sous forme d'armes nucléaires si nécessaire, fait partie des éléments clés de cette doctrine.

En se défendant contre l'influence de Washington - par exemple, selon la lecture du Kremlin, avec la guerre en Ukraine - des Etats comme la Russie et d'autres ont agi en légitime défense contre un ennemi surpuissant.

«Puissance coloniale»

Lundi, Poutine a attaqué les Etats-Unis en les qualifiant de «puissance coloniale». Washington pense être un pays de première classe alors qu'il ne considère les citoyens des autres pays que comme des citoyens de seconde classe, a déclaré Poutine dans une interview accordée à la China Media Corporation. «Ce sont les rudiments de la pensée coloniale, rien d'autre.»

Poutine en tant que héros contre la prétendue hégémonie américaine? Avec ce récit à la Robin des Bois, il obtient déjà des succès considérables en matière de relations publiques dans de nombreux pays au sud de l'hémisphère, comme en Afrique. Dans ce contexte, la Chine apparaît également comme un allié naturel de la Russie, car Xi Jinping considère lui aussi les Etats-Unis comme un ennemi juré. Entre autres, parce que Washington se présente comme la puissance protectrice de Taïwan.

Deux parties, la Russie et la Chine, qui pourraient coopérer entre elles pour s'opposer à l'ennemi commun, les Etats-Unis. Cette crainte semble s'intensifier au sein de la politique américaine. «Nous sommes préoccupés par le fait qu'il pourrait y avoir une coopération accrue entre les deux», a déclaré l'un des auteurs du rapport à l'agence de presse Reuters. «Et cela nous amène à ce scénario de guerre bipartite.»

Augmenter l'armement

Selon les auteurs du rapport sur la défense, la seule solution est d'augmenter l'armement:

«Nous sommes conscients des réalités financières, mais nous sommes également convaincus que notre pays doit faire ces investissements»
Madelyn Creedon, présidente de la commission

L'ancien sénateur républicain Jon Kyl a ajouté que l'augmentation des dépenses militaires était un prix relativement faible à payer pour «espérer éviter» une guerre nucléaire entre les Etats-Unis, la Russie et la Chine.

Le président russe a déclaré lors d'une interview accordée dimanche à la chaîne d'Etat Russia 1 qu'il considérait le scénario d'une guerre nucléaire comme une «absurdité». L'homme qui mène depuis 19 mois une guerre sans merci contre l'Ukraine se montre une fois de plus épris de paix.

«Je ne pense pas que l'annonce des Etats-Unis de se préparer à une guerre avec la Russie soit pertinente. Ce ne sont pas des réflexions raisonnables de personnes raisonnables»
Vladimir Poutine

En même temps, le locataire du Kremlin a reconnu: «Nous suivons bien sûr le vieux principe: "Si tu veux la paix, prépare-toi à la guerre"».

En outre, il estime qu'il s'agit d'un non-sens flagrant de s'opposer simultanément à la Russie et à la Chine, a-t-il déclaré en référence à la recommandation de la commission du Parlement américain. «Je pense qu'ils veulent juste nous intimider», a déclaré le chef du Kremlin.

La semaine dernière, Poutine a laissé entrevoir que la Russie pourrait revenir sur la ratification du traité d'interdiction des essais nucléaires de 1996. La Douma doit en décider, a déclaré le président russe. Ce qui ne devrait toutefois pas être trop difficile, car ce que souhaite Poutine y est approuvé.

Dès 1992, les Etats-Unis et la Russie avaient cessé leurs essais nucléaires. Depuis, seule la Corée du Nord a encore procédé à des essais de ce genre. Poutine a également évoqué la raison d'un éventuel retrait de l'accord: les Etats-Unis ont certes signé le traité, mais ne l'ont jamais ratifié. Outre les Etats-Unis, d'autres puissances nucléaires de premier plan font partie de ces Etats, dont l'Inde, l'Iran, l'Egypte, le Pakistan, Israël, la Corée du Nord et la Chine.

Une éventuelle dissolution de l'accord par la Russie signifierait une nouvelle escalade de la propagande anti-occidentale du Kremlin. En qualifiant la recommandation de la commission de défense du Congrès américain d'«absurdité» et de manœuvre visant à faire peur, ainsi qu’en appelant dans la foulée à la prudence diplomatique, Poutine s'exerce une fois de plus à l'une de ses disciplines favorites: éteindre le feu qu'il allume lui-même avec vigueur.

Que se passe-t-il dans l'océan Arctique?

Comme par hasard, des propagandistes notoires du Kremlin, comme la directrice de la chaîne de télévision Russia Today, Margarita Simonian, avaient réclamé ces dernières semaines de nouveaux essais nucléaires russes. Pas seulement sous terre, mais en surface, sur l'ancien site d'essai de Nouvelle-Zemble dans l'océan Arctique; et donc quasiment sous les yeux du monde entier.

Poutine a réagi avec une apparente surprise: le président a fait savoir qu'il avait entendu des voix réclamant un essai nucléaire. Parmi ces voix, celle de Mikhaïl Kovaltchouk, chef du principal centre russe de recherche sur les armes nucléaires et conseiller de Poutine. Celui-ci a spéculé sur de nouveaux tests «pour intimider l'Occident». Il faudrait tout de même faire exploser «au moins une bombe atomique», a exigé Kovaltchouk fin septembre.

Quelques jours auparavant, la chaîne américaine CNN avait publié des images satellites montrant des développements intrigants sur le site d'essai dans l'océan Arctique. On pouvait y voir que de nouveaux bâtiments avaient été construits autour de la Nouvelle-Zemble au cours des trois dernières années. Les images ne montrent pas à quoi servent ces installations.

Le lancement du missile russe Sarmat
Video: watson
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