Que compte faire la Russie en Moldavie ? Un document stratégique qui proviendrait de l'administration présidentielle russe esquisse une stratégie détaillée pour l'ancienne république soviétique. Le plan a été divulgué par plusieurs médias internationaux. Selon ce document, le Kremlin souhaiterait que le petit pays se détache de l'Occident - et aspire à un avenir aux côtés de Moscou.
Le plan, apparemment rédigé à l'été 2021, contient des étapes concrètes sur la manière dont le Kremlin veut encourager les courants pro-russes en Moldavie. Il est structuré en trois étapes allant jusqu'en 2030 et veut empêcher la Moldavie de s'orienter vers l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (Otan) et l'Union européenne (UE).
Le dossier semble avoir été rédigé par les mêmes experts du Kremlin qui, en 2021, ont préparé un document sur une incorporation progressive de la Biélorussie à la Russie. Le Süddeutsche Zeitung et ses partenaires en avaient déjà parlé en février.
Cette fois-ci, le plan de Moscou pour la Moldavie ne vise toutefois pas à intégrer le petit pays à la Russie; mais à moyen terme, Poutine souhaite créer un État vassal soumis à la volonté de Moscou.
Un haut responsable des services de renseignement occidentaux, après avoir lu les deux documents, déclare que l'objectif du Kremlin en Moldavie est «d'augmenter l'influence pro-russe dans le pays».
Moscou veut manifestement placer «un panneau d'arrêt en direction de l'Ouest» et «empêcher par tous les moyens l'adhésion du pays à l'UE et à l'Otan.»
La Moldavie compte 2,6 millions d'habitants – avec une minorité russe – et se situe à l'est de l'Ukraine. Le pays, qui faisait partie de l'Union soviétique jusqu'en 1991, a pris un tournant pro-occidental ces dernières années, provoquant la colère du Kremlin. En 2022, la Moldavie s'est vue attribuer le statut de candidate à l'adhésion à l'UE. L'ex-république soviétique ne fait pas partie de l'Otan: elle est politiquement divisée entre les forces pro-européennes et les forces pro-russes.
Il y a à peine deux semaines, de violentes émeutes ont éclaté en Moldavie. Des milliers de manifestants sont descendus dans les rues de la capitale Chisinau pour protester contre le gouvernement pro-occidental du pays.
Selon le document du Kremlin, l'un des principaux objectifs de la Russie pour les dix prochaines années est de «contrer les tentatives d'ingérence d'acteurs extérieurs dans les affaires internes de la République, de renforcer l'influence de l'OTAN et d'affaiblir les positions de la Fédération de Russie.»
Ces «acteurs extérieurs» désignent notamment les Etats-Unis, les pays de l'UE, la Turquie et l'Ukraine.
Moscou semble en revanche vouloir favoriser une participation éventuelle de la Moldavie à l'Organisation du traité de sécurité collective (OTSC) ou à l'Union économique eurasienne (UEEA) – des associations dominées par la Russie.
La guerre en Ukraine pourrait réduire le temps qu'il reste au Kremlin à atteindre ses objectifs en Moldavie. L'UE et les Etats-Unis craignent donc que la Russie ne passe plus durement à l'action, et qu'un éventuel renversement en Moldavie ne mette en difficulté l'Ukraine. C'est ce qu'indique, entre autres, l'aggravation de la situation en Transnistrie, une région proche de la Russie.
La république autoproclamée de Transnistrie est une étroite bande de terre à la frontière avec l'Ukraine, qui possède son propre gouvernement et sa propre administration. La région fait toujours partie de la Moldavie en termes de droit international, mais elle est contrôlée par des séparatistes pro-russes. La population de Transnistrie est en partie ukrainienne, russe et moldave.
Les services secrets moldaves ont déjà accusé la Russie à plusieurs reprises de planifier une invasion de leur pays depuis la Transnistrie. Cela pourrait avoir lieu entre janvier et avril. La Russie aurait, selon eux, l'intention de relier la Transnistrie et la Moldavie.