Les restaurants américains vivent en ce moment un cauchemar en cuisine, mais sans Philippe Etchebest. Depuis le mois de février, l’Immigration and Customs Enforcement (ICE) lance des raids ultraviolents dans les cuisines de tout le pays, en quête de travailleurs sans permis de travail légaux.
A lire les comptes rendus de ces raids et à entendre le témoignage des tenanciers d’établissement, on se croirait dans le Far West. Des expéditions punitives qui drainent leur lot d’effroi et de traumatismes, tant les agents de la sécurité intérieure n’y vont pas avec le dos de la cuillère. Dernière ville à avoir subi une série d’assauts? Washington DC.
Aux ordres de Kristi Noem, la Secrétaire à la Sécurité intérieure des Etats-Unis surnommée la «Barbie de l’immigration», les agents ont reçu la consigne de faire irruption dans les cuisines de la capitale pour traquer ce qu’on appelle les formulaires I-9 des employés. Un formulaire qui confirme que l’employé (ou le patron) possède une autorisation de travail.
En mars dernier, un raid avait déjà fait scandale dans tout l’Etat du New Jersey, lorsque le couple de propriétaires d’un kebab «célèbre et très apprécié» de la ville de Haddon Township a été embarqué de force par les agents. De nationalité turque, ils étaient en attente d’une régularisation qui tardait à aboutir. A l’époque, l’Immigration and Customs Enforcement avait tenté de justifier froidement leur manière de faire.
Dans les faits, l’agence dirigée par la «Barbie» de Donald Trump a raison. Or, on lui reproche à chaque fois des descentes «inhumaines» et «arbitraires». Mardi, les agents se sont attaqués à une bonne dizaine d’établissements réputés de Washington. Dans le lot, celui de Geoff Tracy, qui n’est autre que le mari de Norah O'Donnell, journaliste star de NBC News.
De quoi faire bouillir l’affaire au sommet de l’attention médiatique en moins de deux. Ce jour-là, le restaurant Chef Geoff's, a subi un assaut mené par douze agents en uniforme.
TODAY: ICE agents went into Chef Geoff's restaurant in Northwest DC - reportedly asked to see I-9 forms from staff. Workers on edge. No one taken into custody. @fox5dc pic.twitter.com/jX3SGyoV3a
— Homa Bash (@HomaBashNews) May 6, 2025
Une opération qui a duré plus de 90 minutes, tôt mardi matin, mais qui n’aboutira pourtant à aucune interpellation. Le personnel présent au moment des faits a dû dégainer son formulaire I-9 au pas de charge. Ni le restaurateur ni son épouse journaliste n’ont voulu commenter l’affaire.
Le même jour, de nombreux établissements de la capitale ont eu droit au même traitement et, pour certains, le raid s’est déroulé en plein rush de midi. Si l’agence ICE parle d’une simple «enquête administrative», les tenanciers en ont une tout autre définition:
Selon les différents témoignages récoltés par la presse américaine, les agents de l’ICE auraient agi dans l’objectif d’effrayer le personnel et les patrons d’établissement: «Il y a un sentiment de peur. C'est alarmant, c'est inquiétant. Je pense qu'il aurait pu y avoir un meilleur moyen d'obtenir les informations qu’ils cherchaient», a déclaré Shawn Townsend, président de la Restaurant Association of Metropolitan Washington.
Ce n’est pas un hasard si les soldats de Kristi Noem prennent désormais pour cibles les restaurants américains. Les immigrés représentent une part importante du personnel et le milieu peine à se relever depuis la pandémie de Covid-19. Et cette mission quasi militaire risque de fragiliser encore un peu plus la restauration aux Etats-Unis.
De son côté, l’agence ICE se contente d’affirmer qu’elle ne traque que les «pires du pire», citant régulièrement son obsession pour les membres des gangs MS-13 et 18th Street. Or, toutes les semaines, des arrestations considérées comme «arbitraires» sont dénoncées par les défenseurs des droits humains, en marge notamment des déportations de prisonniers vers des prisons du Salvador.