Le Z est le symbole utilisé par la Russie pour sa propagande de guerre en Ukraine. A tel point qu'en Bavière, le tribunal d'instance de Wolfratshausen a infligé à un homme une interdiction de conduire d'un mois à cause de la lettre qu'il avait collée à l'arrière de sa voiture. C'est la deuxième condamnation de ce type en Allemagne.
Ces derniers temps cependant, cette lettre – qui était au début considérée comme un culte en Russie – est de plus en plus supplantée, remplacée et repeinte, sur le terrain comme sur Internet.
Cette perte d'importance a été remarqué pour la première fois à Torez, une ville ukrainienne de 55 000 habitants. L'endroit avait déjà fait la une des journaux, en 2014, car un avion civil de Malaysian Airlines. Le vol MH17 (298 personnes à bord) avait été abattu par un missile antiaérien russe.
Retour en 2022: le 29 août, des véhicules militaires russes ont roulé à travers la ville, située à 35 kilomètres de la frontière russe. Un compte Twitter – qui fournit depuis des années des informations aux services ukrainiens – évoque la présence de «beaucoup de barbus, probablement des Tchétchènes, car les véhicules avaient sur le côté un cercle dans un triangle». Une nouveauté.
Un jour plus tard, des images ont commencé à apparaître. Le twittos pro-ukrainien @GirkinGirkin, dont les messages accompagnés d'images exclusives font régulièrement la une des médias, a posté une vidéo, puis une capture d'écran, de ce fameux «cercle dans un triangle».
Новый знак pic.twitter.com/BV0WDac9mb— IgorGirkin (@GirkinGirkin) August 30, 2022
Les véhicules portant ce signe devraient appartenir au 3ème corps d'armée nouvellement constitué. Dans les jours précédant la prise de photos, le Conflict Intelligence Team, un groupe de recherche russe indépendant, avait déjà signalé de tels transferts dans la région de Rostov. En résumé: de nouvelles unités sont passées par Tores avec un nouveau symbole.
Depuis ce jour, ce symbole apparaît de plus en plus souvent. T-online a pu trouver des messages, des images et des vidéos qui illustrent sa présence dans différentes régions, par exemple à Marioupol. Le ministère russe de la Défense a lui-même publié une vidéo d'une colonne de véhicules en cours de transfert dans la région de Kharkiv.
Le Z n'était, toutefois, pas le seul marquage sur les véhicules russes. Il y avait aussi le O, le V, et plus rarement le X et le A. Les militaires ukrainiens ont expliqué que ces lettres devaient représenter leur origine. Des blogueurs militaires ont, toutefois, tenté de réfuter ces affirmations.
Les attaquants O n'étaient donc pas exclusivement des forces biélorusses, les V n'étaient pas identiques aux unités du corps des Marines, et les Tchétchènes auxquels le X a été attribué se trouvaient également parmi les unités Z (censées représenter des unités russes orientales).
Les unités prétendument originaires de Crimée et marquées d'un Z se sont, quant elles, battues loin de là. Les Ukrainiens ont entre-temps plaisanté, lors de leurs propres succès, que les lettres représentaient le nom de leur président V_olodymyr O_eksandrovich Z_elenski.
Ce qui était clair toutefois, c'est que la propagande russe a exploité massivement le Z. En peu de temps, il est devenu dans le monde entier le symbole de russe de la guerre en Ukraine. Même lors de la Coupe du monde de gymnastique à Doha, un médaillé russe a sauté sur le podium avec un Z sur la poitrine. Les Russes ont ensuite été exclus des compétitions.
Lors des premiers cortèges prorusses en Allemagne, le signe était encore visible, avant que divers Länder ne déclarent «qu'il pourrait constituer un délit».
Aujourd'hui, les symboles restent le Z, le + (les Ukrainiens le peignent de plus en plus), ainsi que le cercle et le triangle, qui masquent désormais le Z sur plusieurs véhicules russes.
Comme pour le Z, il n'existe pour l'instant aucune explication officielle plausible quant à leur signification. Des véhicules portant ce signe ont été aperçus fin août: il ne s'agit donc apparemment pas d'une réaction aux récents succès ukrainiens, mais tout au plus aux objectifs non atteints, nécessitant l'envoi de troupes supplémentaires?
Le Z n'est plus le synonyme de passage en force et d'espoir de triomphe rapide. Selon un sondage du centre russe Levada, 48% des Russes étaient favorables à la poursuite de la guerre au cours de la dernière semaine d'août (avant les défaites dans l'est de l'Ukraine) et 72% en mai. Les propagandistes russes semblent donc diminuer au fil des mois.
Le 1er septembre, l'historien moscovite Kamil Galeew avait déjà fait état d'un phénomène intéressant sur Telegram: les chaînes pro-guerre suppriment en masse les lettres Z et V de leurs profils. Le groupe de mercenaires Wagner en est un exemple. L'historien déclarait en avril: le Z est devenu le symbole d'une nouvelle idéologie russe et d'une nouvelle identité nationale». Il se demande à présent:
Les chaînes prorusses associent, toutefois, des espoirs à ce changement. L'Allemande Alina Lipp par exemple, qui fait la promotion de la guerre en Russie depuis les territoires occupés sur une chaîne comptant près de 200 000 abonnés, a écrit:
Elle se souvient encore comment, peu avant le début de l'invasion russe le 24 février, des photos avec des Z sont apparues pour la première fois sur les chaînes. Cela devait apporter «libération» et «dénazification».