Près de sept millions de soldats russes de l’Armée rouge ont péri pendant la Seconde Guerre mondiale. A cela s’ajoutent entre quatre et cinq millions de civils russes. Aucun autre pays n’a payé un tribut aussi lourd pour vaincre l’Allemagne nazie. En tout, les pertes soviétiques sont estimées au moins à 25 millions de morts.
C’est dire l’importance du 9 mai en Russie, «jour de la Victoire», que le pays célèbre depuis des décennies avec une parade militaire fastueuse à Moscou. Il en ira de même cette année, à l’occasion du 80ᵉ anniversaire de la fin de la «Grande Guerre patriotique».
Mais depuis que Vladimir Poutine a envahi l’Ukraine il y a trois ans, Moscou peine à trouver des invités de marque pour les festivités. Cette année encore, ils seront une vingtaine environ. Cette semaine, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a déclaré:
Le plus important d’entre eux sera sans conteste le président chinois Xi Jinping, qui a confirmé sa présence en février déjà. Le président brésilien Lula da Silva est lui aussi attendu. Même quelques dirigeants européens feront le déplacement.
Parmi eux, le président serbe Aleksandar Vucic. La Serbie oscille depuis belle lurette entre Moscou et l’Occident. Officiellement, le pays vise toujours une adhésion à l’Union européenne (UE). Mais dans les faits, le processus est au point mort depuis longtemps. D’après des médias russes, Aleksandar Vucic envisagerait même de faire défiler des unités de l’armée serbe aux côtés des troupes de Vladimir Poutine, le 9 mai.
Autre invité annoncé: le premier ministre slovaque Robert Fico, proche du Kremlin. Il sera le seul chef de gouvernement en exercice d’un pays de l’UE à se rendre à Moscou. Même Viktor Orbán, l’ami hongrois de Poutine, a décliné l’invitation. Peut-être parce qu’il a d’autres soucis en tête: dans les sondages, il est régulièrement distancé par Peter Magyar, étoile montante de la politique et fondateur du nouveau parti Tisza. Des élections législatives sont prévues en Hongrie au printemps 2026, et le pouvoir de Viktor Orbán vacille.
Un temps, la rumeur de la venue de Donald Trump a circulé. Après un premier appel téléphonique avec Vladimir Poutine en février, les deux hommes ont officiellement convenu de se rendre mutuellement visite. Le magazine français Le Point affirmait alors qu’un déplacement du président américain pour le 9 mai était à l’étude.
Une date idéale pour une rencontre présidentielle: l’administration américaine envisageait à l’origine un cessez-le-feu ou un accord de paix entre la Russie et l’Ukraine à l’horizon de Pâques, soit le 20 avril. Le 9 mai arrive trois semaines plus tard.
Un triomphe inespéré pour Vladimir Poutine. Mais, puisque la Russie ne fait pas mine de mettre fin à la guerre, la trêve pascale est tombée à l’eau. Et avec elle, la perspective de voir Donald Trump sur la place Rouge.
La participation du président serbe Aleksandar Vucic, dont le pays est candidat à l’adhésion européenne, fait grincer des dents à Bruxelles. En début de semaine, la cheffe de la diplomatie européenne, Kaja Kallas, a mis en garde tous les Etats candidats.
«Nous avons été très clairs: nous ne voulons pas voir ces pays à la parade organisée par Vladimir Poutine. Ce ne serait pas sans conséquences», a-t-elle prévenu en marge d’une réunion des ministres européens des Affaires étrangères.
L’ancienne première ministre estonienne a même proposé une alternative: se rendre à Kiev. L’Ukraine, en effet, a lancé une invitation en ce sens. Car bien entendu, la victoire sur Hitler est aussi commémorée à Kiev.
Avec la Russie et la Biélorussie, l’Ukraine a payé l’un des plus lourds tributs de l’ex-URSS durant la guerre: plus de 1,3 million de soldats ukrainiens et jusqu’à six millions de civils ont perdu la vie. Mais depuis la première invasion russe dans le Donbass en 2014 et l’annexion de la Crimée, la culture mémorielle soviétique est peu à peu abandonnée en Ukraine. Depuis 2023, le pays célèbre officiellement la fin du nazisme le 8 mai, à l’instar des pays d’Europe de l’Ouest.
D’autant que le thème de la parade moscovite risque de s’éloigner du souvenir de la Seconde Guerre mondiale. D’après des informations non confirmées, des unités ayant combattu en Ukraine devraient être mises à l'honneur.
Une vidéo circulant en ligne, vraisemblablement filmée lors d'une répétition à Iekaterinbourg en Russie, montre des chars de combat équipés de cages anti-drones, comme ceux utilisés sur le front ukrainien. On y voit aussi des camions-citernes, des unités médicales mobiles et du matériel de guerre électronique.
Pour Nico Lange, un expert militaire qui s'est exprimé dans les colonnes du Bild, le message est limpide:
Traduit et adapté de l'allemand par Tanja Maeder