Pour la première fois depuis longtemps, le président russe Vladimir Poutine a participé à un échange avec plusieurs chefs d'état et de gouvernement occidentaux. Mercredi, il s'est joint à un sommet virtuel du G20. Il a, cependant, rejeté toute responsabilité dans la guerre d'agression contre l'Ukraine.
Selon Poutine, certains membres du G20 se sont montrés bouleversés par l'agression de la Russie en Ukraine. «Oui, bien sûr, les actes de guerre sont toujours une tragédie. Il faut réfléchir à la manière d'y mettre fin», a-t-il ajouté.
Le Kremlin ne cesse de présenter l'Ukraine comme un pays prétendument dirigé par des «néonazis» et parle du changement de pouvoir qui a suivi les manifestations pro-européennes à Kiev en 2014 comme du déclencheur de la guerre.
Concernant d'éventuelles négociations, Poutine a affirmé que «la Russie n'a jamais refusé des pourparlers de paix avec l'Ukraine». A l'inverse de Kiev, a-t-il reproché. Dans les faits, la Russie occupe actuellement environ un cinquième du territoire ukrainien, y compris la péninsule de Crimée annexée en 2014. Moscou a depuis posé des conditions strictes au gouvernement ukrainien pour que des négociations puissent avoir lieu.
Selon le Kremlin, l'Ukraine devrait par exemple déposer les armes, renoncer à ses ambitions d'adhésion à l'Otan, accepter le russe comme langue nationale et reconnaître l'annexion de la Crimée par la Russie. Volodymyr Zelensky avait jusqu'à présent refusé les pourparlers de paix. Il demande, quant à lui, le retrait des troupes russes, qu'il juge comme une condition essentielle à une paix durable. Une condition à laquelle Moscou s'oppose à son tour.
Selon le chancelier allemand Olaf Scholz, ces échanges ont servi à montrer qu'une issue est possible. La paix en Ukraine peut être facilement rétablie avec le retrait des troupes russes. «Nous en avons pris acte, et d'autres gouvernements aussi. Et en ce sens, c'était aussi intéressant, car il devait écouter».
Lors de son intervention, Poutine a ensuite abordé la guerre entre Israël et le Hamas. Les membres du G20 ont salué la pause humanitaire prévue à partir de ce jeudi ainsi que la libération prévue de certains otages.
Poutine a en revanche demandé si ses homologues n'étaient pas bouleversés par le massacre de la population civile dans la bande de Gaza.
Depuis l'attaque du Hamas le 7 octobre, le président russe prend régulièrement parti pour les Palestiniens, tout comme son proche allié, le régime islamique d'Iran. Celui-ci ne finance pas seulement le Hamas, mais fournit également à la Russie des drones pour sa guerre contre l'Ukraine. Dès le début de la guerre au Proche-Orient, des experts avaient prévenu que le Kremlin utiliserait la situation au Proche-Orient pour détourner l'attention de sa guerre contre l'Ukraine.
Par ailleurs, le dirigeant russe a encore rendu les principales puissances occidentales responsables du renchérissement et d'autres problèmes de l'économie mondiale. Des milliards de dollars américains et d'euros ont été injectés dans l'économie, en partie pour lutter contre l'épidémie de Covid, a déclaré le président russe. Mais cela a conduit à une inflation mondiale, à une augmentation des prix des denrées alimentaires et de l'énergie, dont souffrent surtout les pays pauvres.
Là encore, Poutine a omis de dire que la guerre russe contre l'Ukraine était en partie responsable de l'inflation mondiale. Suite à l'invasion, la Russie a été sanctionnée par de nombreux pays ainsi que par l'UE. Moscou a réagi en réduisant par exemple les livraisons de gaz par le gazoduc de la mer du Nord, ce qui a entraîné une hausse de prix en Europe. Les sanctions prises à l'encontre de la Russie à la suite de la guerre ont également fait grimper les prix, notamment en Allemagne.
En outre, Poutine avait dénoncé cet été l'accord passé avec l'Ukraine qui devait garantir l'exportation sûre des céréales du «grenier à blé de l'Europe» – et donc la sécurité alimentaire mondiale. Depuis, pas de nouvel accord, mais l'armée russe attaque régulièrement les ports ukrainiens dans lesquels les céréales sont stockées en attendant leur exportation.
L'échange vidéo entre les dirigeants de 20 pays a été convoqué par l'actuelle présidence indienne du G20. Cette présidence sera assurée par le Brésil à partir de décembre. C'était la première fois depuis longtemps que Poutine s'entretenait avec plusieurs chefs d'état et de gouvernement de pays occidentaux. Début septembre il avait envoyé son ministre des affaires étrangères, Sergueï Lavrov à New Dehli. Idem l'année dernière, en Indonésie.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker