Konstantin Efremov a été officier dans l'armée russe pendant plusieurs années. Avec la guerre du Kremlin en Ukraine, il en a eu assez. Après avoir tenté à plusieurs reprises de démissionner, il a finalement été renvoyé parce qu'il ne voulait pas retourner en Ukraine et a fui la Russie.
Dans une interview accordée à la BBC, il donne un aperçu de ce qui s'est réellement passé sur le champ de bataille. Efremov est ainsi devenu le Russe le plus haut placé à s'être exprimé jusqu'à présent sur la guerre dans les médias occidentaux. La BBC a pu vérifier à l'aide de photos et de documents que l'ex-officier s'est réellement rendu dans la région ukrainienne de Zaporijia. Voici ses principales déclarations.
L'ancien gradé confirme qu'il a vu des prisonniers ukrainiens être brutalisés et torturés lors d'interrogatoires. Des scènes qui ont parfois duré jusqu'à une semaine. «Tous les jours, la nuit, parfois deux fois par jour». Dans certaines situations, les militaires russes auraient «perdu la raison», selon ses dires.
Un jour, un officier a appris qu'il avait un tireur d'élite ukrainien devant lui. Il lui aurait alors baissé son pantalon et lui aurait demandé s'il était marié, raconte Konstantin Efremov. L'officier aurait alors menacé:
Le Russe évoque aussi d'autres formes de violence. Pour obtenir des réponses, les soldats ont tiré sur les prisonniers ou leur ont cassé les dents. Les conditions étaient si précaires que certains Russes ont secrètement aidé les prisonniers ukrainiens.
Konstantin Efremov affirme leur avoir jeté de la paille la nuit pour qu'ils ne soient pas obligés de dormir sur le sol nu, ou leur avoir apporté du thé chaud et des cigarettes pour qu'ils se réchauffent.
Au cours d'un autre interrogatoire, un prisonnier aurait été si gravement blessé qu'Efremov aurait eu peur qu'il se vide de son sang. Il lui a donc mis un uniforme russe et l'aurait emmené à l'hôpital en le mettant en garde:
Le récit de Konstantin Efremov donne également un aperçu de la vie russe en Ukraine en dehors des combats. Le ravitaillement des troupes ne fonctionne pas toujours bien. Et son unité a souvent dû dormir dehors. Certains jours, l'officier et ses hommes n'avaient presque rien à manger.
Mais tous les soldats russes ne sont pas mal lotis en Ukraine. Surtout lorsqu'ils se servent dans les maisons vides des Ukrainiens qui ont fui leur pays. «Les soldats et les officiers s'emparent de tout ce qu'ils peuvent», explique Konstantin Efremov. Comme des seaux, des vélos et des tondeuses à gazon. Une expérience l'a particulièrement marqué:
Konstantin Efremov a été envoyé en Crimée le 10 février, deux semaines avant le début de la guerre. Il aurait obéi à l'ordre, sans savoir ce qui l'attendait réellement. Il s'agissait d'un soi-disant «exercice militaire». «A l'époque, personne ne croyait qu'il y aurait une guerre. Je suis sûr que même mes supérieurs ne le savaient pas.»
L'ex-officier affirme avoir refusé la guerre en Ukraine dès le début. Lorsqu'il a voulu donner sa démission, il a été traité de «traître» et de «lâche». Il serait alors monté dans un taxi pour s'enfuir en Tchétchénie pour y présenter officiellement sa démission.
Mais ses camarades lui auraient alors téléphoné pour le dissuader de le faire. Ils lui auraient dit qu'il risquait dix ans de prison. La police aurait déjà été alertée. «Je réalise maintenant que j'aurais dû ignorer cela et continuer à rouler», dit-il rétrospectivement. Mais la peur de la prison l'a poussé à retourner en Russie.
Il aurait ensuite été licencié fin mai 2022, alors qu'il souhaitait à nouveau quitter l'armée. La BBC dispose de documents montrant que Konstantin Efremov a été licencié «pour avoir gravement enfreint le règlement» et qu'il s'est «soustrait à ses obligations».
(dab)