Le Jour de la Victoire de cette année était attendu avec impatience en Russie. L'évènement célèbre la victoire des forces armées soviétiques et alliées sur l'Allemagne nazie, en 1945. Mais cette année, de nombreuses festivités ont été annulées et le défilé de Moscou s'est vu réduit par rapport aux éditions précédentes.
Et ce officiellement, en raison de la menace liée à l'«opération militaire spéciale» de Moscou en Ukraine. La semaine dernière, le Kremlin a été attaqué par deux drones qui n'avaient pu être interceptés que juste au-dessus d'une des coupoles de l'édifice.
Le défilé fut plus petit que d'habitude. Les soldats russes engagés en ce moment en Ukraine et ceux qui y sont morts depuis le début du conflit expliquent ce faible nombre d'hommes en uniforme sur la place Rouge. Il n'empêche, des dizaines d'entre eux ont tout de même défilé devant Poutine et les moscovites.
Une partie des équipements de guerre présentés lors du défilé montrent également, de manière implicite, que le déroulement de la guerre a probablement une plus grande influence sur le défilé que le Kremlin ne le souhaiterait.
Le défilé était ainsi mené par un seul char, un T-34/85, un blindé utilisé pendant la Seconde Guerre mondiale. Il s'agit soit d'un symbole fort voulu par Poutine pour illustrer la lutte contre les nazis, soit le fait qu'il s'agisse d'un si vieux modèle, et en plus d'un seul, peut laisser supposer que tout le matériel de guerre est utilisé sur le front en Ukraine.
Il était aussi frappant de constater que même parmi les ex-républiques soviétiques, qui entretiennent encore de bonnes relations avec Moscou, toutes n'étaient pas représentées. Le président azerbaïdjanais Ilham Aliyev a par exemple, renoncé.
Vladimir Poutine s'est toutefois affirmé durant son discours. Après avoir affirmé que la Russie voulait la paix et la stabilité et ne connaissait pas d'ennemis à l'Ouest ou à l'Est, sa rhétorique s'est une fois de plus dirigée vers l'Occident.
Le maître du Kremlin a ainsi pointé du doigt, pêle-mêle, les élites occidentales, qui provoqueraient des conflits sanglants et la subversion, mais aussi sèmeraient la haine, la russophobie et un nationalisme agressif.
Ces mêmes pays qui, toujours selon Poutine, détruiraient les valeurs traditionnelles familiales — ces «valeurs qui font de l'homme un être humain».
Ce faisant, l'Occident aurait «oublié qui a tenu tête au fascisme qui n'a pas hésité à le vaincre au prix de sa propre vie et à libérer ainsi l'Europe». C'est-à-dire: l'URSS.
Poutine a accusé les pays d'Europe occidentale de détruire les mémoriaux et la mémoire de leurs libérateurs et de «revenir au culte du nazisme».
Pour l'homme fort de Moscou, l'objectif de l'Occident est clair: la désintégration et l'anéantissement de la Russie, l'achèvement des objectifs des nazis, la destruction du système de sécurité mondial et du droit international. Rien que ça. Le peuple ukrainien ne serait ainsi que la victime des élites occidentales et d'un régime criminel à Kiev.
(Traduit et adapté par Noëline Flippe)