Lorsque l'armée de Poutine a envahi l'Ukraine, la jeune artiste Sascha Skotschilenko a voulu protester contre la guerre de manière symbolique. Elle a donc commencé à trafiquer les étiquettes de prix d'articles au supermarché, afin qu'elles comportent des messages pacifistes. Elle a ensuite placé ces produits dans un magasin de Saint-Pétersbourg.
Au lieu des informations standards, on pouvait lire:
Le 11 avril 2022, Sacha Skotchilenko a été arrêtée. Elle risque plusieurs années de prison pour cet acte de contestation exprimé au travers de l'art. Cette artiste ouvertement homosexuelle et libre de paroles représente sans doute tout ce que le régime du Kremlin déteste.
La jeune femme n'est pourtant pas en bonne santé. Elle pèse 47 kilos, souffre de maladie cœliaque et de trouble du rythme cardiaque, qui plus est, elle est maniaco-dépressive.
En principe, la durée de la détention provisoire ne peut pas dépasser 18 mois, et six mois maximum sont prévus pour le procès qui suit. Toutefois, le tribunal peut prolonger cette période de trois mois en cas de «crimes graves et particulièrement graves».
Nadejda Skotchilenko, la mère de l'accusée, s'est exprimée depuis son exil à Paris sur les conditions de détention et les brimades des codétenus et des surveillants que sa fille doit supporter depuis maintenant un an:
Le 15 décembre dernier, le tribunal de district compétent a finalement ouvert le procès principal contre Sacha Skotchilenko, accusée d'avoir délibérément diffusé de fausses informations sur l'armée russe pour des motifs de haine et d'hostilité. La peine maximale encourue est de dix ans de prison.
Les avocats de la défense veulent prouver que les messages inscrits par leur cliente sur les étiquettes de prix ne sont en aucun cas des fausses informations. Et même si le tribunal avait une opinion contraire, il devrait toujours prouver que l'accusée était consciente de cette infraction au moment des faits.
Lors du procès, il a rapidement été observé que les autorités jouaient sur le temps. Par exemple, la procureure Irina Nikandrova a utilisé la lecture de l'acte d'accusation pour citer les instructions officielles données aux employés du supermarché dans lequel Sascha Skotschilenko a opéré. Elle a également tenu à expliquer le fonctionnement des portes automatiques, informations jugées «pertinentes» pour la procédure.
Lorsque la défense a voulu savoir ce que tout cela avait à voir avec l'accusation, elle s'est rapidement fait réprimander par la juge Oksana Demiasheva.
Aujourd'hui, l'une des rares distractions qui restent à Sascha Skotschilenko est la peinture, seul moyen pour exprimer sa créativité.
Une de ses amies a d'ailleurs réalisé des scans de ces œuvres, qui sont actuellement présentées dans une exposition intitulée The price of freedom à Londres.
L'artiste espère être acquittée, même si le déroulement de la procédure jusqu'à présent ne le laisse guère présager. Mais elle ne veut pas s'engager dans un accord avec le ministère public.
Le 22 mars, dernier jour d'audience jusqu'à présent, la juge Oksana Demiasheva a prolongé la détention provisoire de Sacha Skotschilenko de trois mois supplémentaires. (aargauerzeitung.ch)
(Traduit et adapté par Pauline J. Langel)