Debout devant les portes d'un funérarium de Soumy, Lioudmyla Mossounova se sent perdue en préparant l'enterrement de sa mère, tuée deux jours plus tôt dans une frappe russe dévastatrice.
Deux missiles balistiques lancés en plein centre de Soumy, dans le nord-est de l'Ukraine, ont tué 35 personnes et blessé plus d'une centaine dimanche, dans cette ville située à 30 kilomètres de la frontière russe. «J'attends qu'elle vienne à moi la nuit, dans mes rêves», glisse Lioudmyla.
Sa mère Tetiana Kvacha, 65 ans, avait décidé de prendre le bus ce jour-là, ce qu'elle faisait «rarement», pour se rendre au centre-ville pour le dimanche des Rameaux, une semaine avant Pâques. Le bus a été touché dans la rue et «ça a fini par être un dimanche sanglant», regrette Lioudmyla, en larmes.
L'attaque, la plus meurtrière de 2025, est l'une des pires depuis le début de l'invasion lancée par la Russie il y a plus de trois ans, selon la police nationale.
«Je rentre à la maison, m'assois et pleure. J'ouvre mon téléphone, regarde les photos et pleure. Tout le monde m'envoie leurs condoléances, je pleure», confie la femme de 41 ans.
Artem Sélianine était lui sur le point de retrouver des amis quand il a entendu la première déflagration, abandonnant son petit-déjeuner qu'il prenait avec sa famille. «Papa, où cours-tu?», lui a demandé sa fille alors qu'il se précipitait dans la rue pour prodiguer les premiers soins.
Le deuxième missile est tombé alors qu'il s'occupait des blessés. Il se souvient avoir «couru ici et là, c'était le chaos. Il y avait des tonnes de cadavres, des civils».
La Russie est accusée d'avoir utilisé la tactique de la double frappe: un second projectile est lancé au même endroit après le premier impact, à quelques minutes d'écart, dans le but de créer des dégâts parmi les personnes sur place, aidant les premières victimes.
Une telle frappe constituerait un crime de guerre, car elle vise principalement les civils et les secours. Les autorités russes de leur côté ont affirmé avoir visé un rassemblement militaire et reproché à Kiev d'organiser de tels événements «dans le centre d'une ville densément peuplée».
De nombreux dirigeants occidentaux ont condamné la Russie pour cette attaque. Le président américain Donald Trump a lui estimé «qu'ils avaient fait une erreur», sans préciser à qui ou à quoi il faisait référence.
Iryna Kachtchenko, ne croit pas que ce soit «une erreur», car «il est impossible que deux missiles frappent au même endroit».
Iryna est la directrice de l'école où Maryna Choudessa, une enseignante, a travaillé avant d'être tuée avec sa mère lors de l'attaque de dimanche. «Les enfants sont sous le choc», dit-elle, «parce que les enfants de CM2 ne comprennent pas encore, ce sont encore des enfants.»
Devant l'entrée de l'école, un mémorial a été établi, noyé sous les fleurs et une photo en noir et blanc de Maryna souriante.
Juste au-dessus était accroché le portrait d'un ancien élève de l'école tué à la guerre. «Je ne comprends pas», regrette Iryna, «c'est très dur et difficile d'en parler, et maintenant, je vais à l'enterrement».