Imaginons deux minutes l'existence sans un stand de ravitaillement commun. Sans le moindre moment pour souffler, constater le désastre, avaler une coupette comme une aspirine, mettre nos espoirs à jour et nous moquer du beau-frère dégarni. On aurait affaire à des vies qui démarreraient dans le placenta et se termineraient dans un cimetière, sans l'opportunité de compter ensemble les salves de déboires qu'il nous reste à digérer en tant que société.
On serait bien plus épuisés qu’aujourd’hui.
Sans ce check-point du Nouvel An, nos existences ne seraient que des blocs d'événements chahutants et sans objectifs clairs, comme des samedis chez Ikea et des rouleaux de PQ éternels ou une comédie française sans générique de fin. Même Breaking Bad ou Game of Thrones auraient été imbuvables sans les saisons qui les gainent et les caractérisent.
C'est souvent l'occasion d'y ajouter des personnages et de dire adieu à d'autres. Les meilleures saisons sont d'ailleurs celles qui nous imposent la disparition de ceux que l'on aime le plus. Qui nous font chialer et rire avec la même intensité. L'occasion aussi d'accueillir de nouveaux héros, de nouvelles intrigues, de nouvelles aventures. Et qu'importe si, parfois, on a l'impression que les dernières saisons ne sont pas toujours nécessaires.
Au lieu de prier pour être encore au casting en 2025 et que le connard soit suicidé par le grand réalisateur de l'existence, devenons les scénaristes de notre propre sitcom. Profitons, alors, du dernier épisode de cette énième saison pour nous offrir de quoi payer les études de l'ado et supporter l'absence d'un parent dans la suivante. Et si le personnage principal s'installait à Miami? Et s'il arrêtait de fumer, de scroller, de chialer, de bouffer de la merde? Et s'il changeait les choses ou plus simplement les meubles de place?
Et s'il votait à gauche, une fois, juste pour voir?
Tout est possible.
En revanche, comme pour la série Lost, rien ne sera jamais qu'une bluffante réussite. Il y aura toujours des grands méchants et des cyclones pour couper les envies et les élans. Il faut aussi assumer les erreurs de casting et les intrigues mal achalandées. Mais le jeu vaut souvent la chandelle.
Essayer de se réjouir d'une nouvelle année, c'est croire très fort que notre série a besoin d'une nouvelle salve d'épisodes. Et se donner les moyens de continuer à y croire un peu.
On essaie? Allez... bonne année.