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La solitude, une force? «On en ressort fort et indépendant»

La solitude est une mauvaise nouvelle? Pas forcément, estime Verena Steiner.
La solitude est une mauvaise nouvelle? Pas forcément, estime Verena Steiner.Image: Shutterstock

«La solitude, cela s'apprend, et relativement vite»

La solitude, une mauvaise nouvelle? Pas forcément, estime l'autrice Verena Steiner. A la mort de son mari, elle a tout fait pour reprendre goût à la vie en ouvrant un nouveau chapitre de sa vie. Interview.
08.11.2025, 19:0308.11.2025, 19:03
Hanna Dedial
Hanna Dedial

Parmi les personnes célibataires, beaucoup avouent se sentir seules. La biochimiste Verena Steiner publie un livre sur le sujet, inspiré par le décès soudain de son mari. Elle nous explique comment faire de la solitude un atout pour mener une vie épanouie.

Verena Steiner
Titulaire d'un doctorat en biochimie, elle s'est spécialisée dans les processus d'apprentissage. Elle a reçu plusieurs distinctions pour son travail et a été nommée conseillère honoraire de l'EPFZ en 2006. Elle est veuve et vit à Zurich. Elle vient de publier Solo.
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Bild: Rownak Bose

Au décès de votre mari, vous avez réalisé que vous deviez aborder la vie différemment. Comment cela s'est-il déroulé?
Verena Steiner: Au moment de son décès, j'avais 65 ans. Nous avions encore des projets. Il y a d'abord la période de deuil, et puis j'ai ressenti un grand vide. J'ai réalisé qu'il ne suffisait pas de rejoindre un groupe de randonnée pour que tout rentre en ordre, qu'il fallait bien davantage. C'est à ce moment-là que j'ai entamé des recherches sur la solitude. Pour ce faire, j'ai commencé à faire des choses seules — partir en randonnée, aller à un concert ou au cinéma.

«La solitude, cela s'apprend, et relativement vite»

Mais à une seule condition: celle d'avoir décidé d'ouvrir un nouveau chapitre de sa vie.

Comment ce processus d'apprentissage a-t-il commencé pour vous?
Au début, j'avais peur d'aller me promener seule en forêt. J'ai donc suivi un cours d'autodéfense. Il m'a aidée: à chaque randonnée, je me sentais plus en confiance et j'ai découvert beaucoup d'endroits, ce qui m'a fait beaucoup de bien. Une sensation incomparable!

«Si je m'accroche à l'idée qu'on n'atteint le bonheur qu'à deux, il y a de fortes chances que je ne sois pas aussi heureuse seule»

Vous parlez souvent de «moments d'apprentissage et de courage».
Le principal danger consiste à se replier sur soi-même. J'encourage les gens à sortir plus souvent et à apprendre à faire des choses seuls, en pleine conscience. Même s'il faut faire un effort au début. Bien sûr que c'est moins agréable de marcher ou d'aller à un concert seul. Il faut du courage, et c'est justement cela qui compte: devenir plus courageux et relever le défi. On en ressort plus fort et plus indépendant, y compris dans d'autres domaines de la vie.

«Bon nombre de personnes en couple auraient aussi besoin de ce courage»

Vous conseillez aussi aux personnes en couple de s'entraîner à la solitude?
On l'observe déjà chez les jeunes enfants: un bambin qui fait ses premiers pas tout seul ressent une immense fierté. Je pense que réussir quelque chose par ses propres moyens constitue l'une des plus grandes joies qui soient, car cela procure un accomplissement personnel réel. Lorsqu'on vit constamment en couple, on ne connaît plus vraiment ce sentiment.

Vivre seul, ce n'est pas forcément être isolé.
Vivre seul, ce n'est pas forcément être isolé.shutterstock/chatgpt

Mais le courage ne suffit pas toujours. Pour beaucoup de personnes, la solitude est surtout synonyme d'isolement...
L'humain est un être social, qui a besoin d'être remarqué par ses semblables et de se rendre utile. Le contact humain de son entourage proche et discuter au guichet de la banque, ce n'est évidemment pas la même chose.

«Mais si l'on parvient à se connecter profondément à soi-même et au monde, ces petits instants du quotidien créent du sens»

Comment y parvenir?
On peut croiser le regard d'un bébé dans le tram et lui sourire, par exemple. C'est ça, partager un moment de joie simple. Il y a tant d'infimes moments de connexion que l'on peut provoquer soi-même. La gentillesse, l'amabilité, un simple sourire: même les introvertis peuvent s'y essayer.

Un regard amical ou une brève conversation peuvent déjà créer des moments de connexion.
Un regard amical ou une brève conversation peuvent déjà créer des moments de connexion.Image: Shutterstock

Mais pour cela, il faut d'abord se relier à soi, non?
Oui, exactement. Il est important d'être en phase, cela permet de lutter contre la solitude émotionnelle. A l'aide de la pleine conscience et de la méditation, par exemple, on apprend à prendre davantage soin de soi et à s'aimer comme le ferait une mère. Une maman aime son enfant, mais elle sait aussi se montrer ferme parfois. Si l'enfant désobéit une fois, elle sera indulgente. Mais la fois d'après, elle ne devra pas flancher.

Vous nous donnez la recette miracle, concrètement?
Sans partenaire ou famille pour nous apporter ce soutien émotionnel, on peut tenter la méditation de la compassion et essayer de devenir son propre compagnon aimant. Entretenir des amitiés étroites aide aussi. A la place d'un conjoint, une de mes tantes décédées avait plusieurs amies dont elle était très proche.

Dans votre livre, vous évoquez également la solitude existentielle. Qu'entendez-vous par là?
Beaucoup de personnes âgées s'y confrontent à la retraite. Elles se disent: «Ces 30 prochaines années, je vais juste profiter de la vie». Mais cela peut créer un genre de vide et c'est là que cette crise existentielle tape le plus fort.

«Il faut avoir une mission, un projet qui nous passionne vraiment»

J'ai demandé à une nonagénaire en maison de retraite comment elle s'y sentait. Elle s'est alors illuminée et m'a répondu: «Tu sais, j'ai lancé un projet». Et quand une femme de 90 ans dit qu'elle a un projet, on tend l'oreille.

C'était quoi, son projet?
Malgré sa canne, elle a décidé de suivre à pied le cours d'une rivière. Elle y est allée tronçon par tronçon, en suivant les arrêts de train des gares locales. C'est génial!

«Avoir un projet ou une mission à accomplir donne du sens à la vie»

Revenons un peu en arrière. Que faire de la tristesse d'une personne qui ne parvient pas à se mettre en couple?
Si, malgré un désir profond, la recherche d'un partenaire ne fonctionne pas, il reste à accepter la situation. Cela revient à essayer de tirer le meilleur de la réalité actuelle. La souffrance m'a aidée dans ce processus, car je devais agir.

«On peut aussi se dire: je vais défier le destin et voir ce que ça donne»

Même si la situation ne nous convient pas, elle offre inévitablement une grande liberté. Je peux manger quand je veux, me coucher quand je veux, rester à la maison quand je veux.

(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)

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