La joie est immense lorsque le coup de sifflet final retentit mardi 9 juillet, dans le sublime stade et plein comme un oeuf de Munich. Les joueurs espagnols fêtent leur accession à la finale de l'Euro 2024, se marrent, se congratulent devant leurs supporters. Ils viennent de battre la France (2-1).
Des scènes de liesse, sauf pour Alvaro Morata.
C'est un tacle (involontaire) d'un stadier, venu prêter main-forte au personnel de sécurité pour stopper un petit morveux venu imposer son petit selfie, qui a blessé le capitaine espagnol.
Comme un effet domino, la sécurité et le staff ont tenté de dégager le malotru. Dans cette entreprise pressée, le numéro 7 de la Roja est touché au genou.
La blessure improbable d'Alvaro Morata est là pour rappeler que le danger extérieur guette les joueurs, même à la fin du match. En l'occurrence, cette manie de ces «supporters» de se précipiter sur le terrain pour obtenir leur petit moment de gloire (un selfie), qui cause bien des tourments aux joueurs. Pour preuve: lors de la partie entre l'Espagne et la France, deux streakers (habillés) ont interrompu le match.
Durant cet Euro allemand, on aurait presque tendance à dire que c'est toujours la même ritournelle. On se souvient du cas Gonçalo Ramos, lui aussi taclé involontairement par un agent de sécurité, qui lui aussi tentait d'arrêter l'un des supporters «envahisseurs». La glissade n'a pu être évitée et l'ancien attaquant du Benfica a été balayé par un tacle digne des grandes années de Nigel De Jong.
Cristiano Ronaldo n'est pas passé loin de prendre un supporter sur son visage imberbe alors qu'il rentrait au vestiaire après l'affrontement entre le Portugal et la Géorgie. Le fan s'est lancé dans le vide pour toucher du bout des doigts (ou des pieds) «CR7», alors qu'il quittait le stade de Gelsenkirchen escorté par les membres de la sécurité.
L'épisode d'Alvaro Morata nous a enseigné que même le coup de sifflet final passé, fêter ou rentrer au vestiaire peut devenir synonyme de blessure. La star portugaise aurait pu se faire mal, tout comme Gonçalo Ramos et le capitaine de la Roja.
Le staff se montrait rassurant, cela dit, comme le sélectionneur Luis de la Fuente dans les colonnes de Marca: «On pense que ce n’est rien. On va attendre demain (réd: aujourd’hui). Il a reçu un coup fort.»
L'actuel joueur de l'Atletico Madrid (pressenti au Milan AC la saison prochaine) boitait bien bas lors de sa sortie du terrain. Un mal qu'il peinait à masquer au moment de la photo d'équipe pour célébrer le triomphe ibérique.
Dans les enceintes allemandes, ces supporters qui veulent à tout prix exister d'une autre manière a pris une ampleur certaine: ils sont prêts à tout. Il ne suffit plus de chanter avec le kop ou s'émouvoir d'un geste technique comme celui de Lamine Yamal ou Dani Olmo. Leur hyperfanatisme les oblige à quitter leur place dans les gradins, pour laisser éclater leur égocentrisme un téléphone à la main, histoire de faire le buzz sur les réseaux sociaux.
Hier soir, ce supporter vient (peut-être) de redistribuer les cartes de la finale contre l'Angleterre ou les Pays-Bas (deux formations contre qui les Espagnols seront favoris) et donner des sueurs froides au collectif espagnol.
Désormais, le danger n'est plus uniquement sur le terrain. Il existe à présent autour, dans les gradins, au sein de ses propres fidèles. Alvaro Morata, appelé à soulever la coupe à Berlin en cas de victoire dimanche, pourrait occuper une place sur le banc, par la simple faute d'un admirateur (si nous pouvons l'appeler ainsi) un peu trop excité à l'idée d'exister à travers son écran de téléphone.