Suisse
Agression

Harcèlement sexuel: hôpitaux romands sous le feu des critiques

«On nous prend pour des putes»: des soignantes romandes témoignent

L'émission Temps Présent de la RTS a recueilli les témoignages de plusieurs jeunes médecins ou étudiantes en médecine qui dénoncent le harcèlement sexuel dont elles sont victimes dans les hôpitaux romands.
03.02.2025, 19:04
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Dans l’ombre des blocs opératoires et des salles de garde, «des pratiques d’un autre âge» persistent au sein des hôpitaux romands. Des chirurgiens et chefs de service, jouissant d’une toute-puissance institutionnelle, sont accusés de harcèlement sexuel à l’égard de jeunes médecins et d’étudiantes en médecine. Entre propos obscènes, attouchements, chantage sexuel et abus de pouvoir, plusieurs victimes ont accepté de témoigner dans l’émission Temps Présent de la RTS.

Ces comportements ne seraient pas des cas isolés, mais bien ancrés dans un système où les harceleurs évoluraient sans crainte de sanctions.

Un système propice aux abus

Le milieu hospitalier présente encore aujourd'hui une structure hiérarchique rigide, dominée par des hommes occupant des postes de pouvoir, explique l'émission. Les chirurgiens, souvent jugés irremplaçables, évoluent dans un environnement ultra-compétitif où les jeunes médecins doivent lutter pour se faire une place.

«Dans ce service de chirurgie, durant tout le stage, on nous considère soit comme des putes soit comme des merdes. On se fait soit hurler dessus et humilier devant tout le monde si on a fait une erreur, soit on reçoit des propos sexistes ou des questions sur notre vie sexuelle.»
Léa, une étudiante en médecineTemps Présent

Une autre soignante romande raconte, au sujet d'un médecin:

«Comme tous les chirurgiens, il choisissait quels médecins pouvaient venir avec lui en congrès. Mais pour une femme, être choisie, ça impliquait des choses. Le soir à l'hôtel, après le dîner et le verre au piano-bar, il fallait monter dans sa chambre. Si tu voulais grader, tu devais y passer»

Certaines femmes médecins décrivent ainsi un environnement où l’humiliation et le harcèlement sont monnaie courante. Le chantage sexuel peut même devenir une condition implicite pour progresser dans la carrière. Certaines, après des années d’études et de sacrifices, finissent par abandonner leur vocation, brisées par un système qui ne les protège pas.

C'est par exemple le cas d'Emmanuelle, qui raconte avoir été «sauvée» d'un viol par le bip du chirurgien qui a été appelé pour une intervention, alors qu'elle effectuait son premier stage à 22 ans.

«A un moment donné je me suis retrouvée sous lui. Je me souviens que je me suis sentie extrêmement vulnérable»

Des plaintes ignorées, une impunité persistante

Face à ces pratiques, peu de victimes osent porter plainte, craignant pour leur avenir professionnel. Celles qui se tournent vers les ressources humaines dénoncent un manque de suivi et d’actions concrètes contre les harceleurs.

«L'institution est persuadée qu'elle peut faire mieux, avec la mise en place de structures de prévention, de possibilités de déposer des plaintes sur les cas spécifiques dont vous parlez»
Stéphane Benoit-Godet, chef de la communication du CHUV rts

Mais les enjeux financiers et d’image entravent souvent les décisions. «Il clair que décider de licencier une personne qui est très rémunératrice, qui peut lui apporter des clients, qui peut lui apporter un savoir-faire, qui peut lui apporter une image, c'est une décision qui est très difficile à prendre pour un hôpital», analyse David Raedler, avocat et spécialiste en droit du travail.

Cet état de fait nourrit un climat de peur et de silence. Mais celles qui prennent aujourd’hui la parole espèrent provoquer un changement. Porter plainte et témoigner devient une nécessité pour contraindre les hôpitaux à prendre leurs responsabilités et protéger les victimes plutôt que leurs agresseurs.

Un trou géant s’est formé dans la chaussée à Tokyo
Video: watson
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