Grosse polémique au sujet de Rima Hassan: Genève répond

Grosse polémique autour de Rima Hassan: Genève répond

Présente ce samedi dans la cité de Calvin, l'eurodéputée Rima Hassan a voté contre une résolution demandant la libération de l'écrivain franco-algérien Boualem Sansal, détenu en Algérie. Le responsable de la Culture à la Ville de Genève, le socialiste Sami Kanaan, réagit.

Antoine Menusier

Face au tollé suscité en France par Rima Hassan, la Genève internationale se replie prudemment derrière la frontière suisse. Invitée d'une rencontre, samedi, à Genève, dans le cadre du festival Black Movie – l’événement affiche «complet» –, la militante propalestinienne et eurodéputée de La France insoumise (LFI) a déclenché l’ire de la classe politique, excepté LFI, en rejetant une résolution du Parlement européen demandant à une écrasante majorité la libération de l’écrivain franco-algérien Boualem Sansal.

Agé de 75 ans, de santé fragile, celui-ci est détenu en Algérie depuis le 16 novembre. Le Parlement européen le considère comme un prisonnier politique.

La Ville de Genève, qui subventionne le festival Black Movie, condamne-t-elle à son tour la décision de Rima Hassan de ne pas voter cette résolution venant au secours d’un détenu d’opinion? watson a posé la question au conseiller administratif chargé de la Culture, le municipal socialiste Sami Kanaan. Voici sa réponse, transmise par e-mail:

«La Ville n’a pas à commenter les votes du Parlement européen, et Mme Hassan exerce son mandat de députée européenne de manière souveraine, que ses positions plaisent ou non. Il est par ailleurs évident que l’écrivain Boualem Sansal doit être libéré au plus vite ou tout au moins bénéficier d’une procédure judicaire équitable et transparente, ce qui ne semble pas garanti en l’état.»

Sami Kanaan, chef de la Culture à la Ville de Genève

Genève défend pourtant les droits humains

Ce refus de la Ville de Genève de commenter le vote d'une élue portant sur le respect des droits de l’Homme peut surprendre. On se souvient en effet que l’Exécutif genevois avait dit son opposition à la venue du candidat d’extrême droite Eric Zemmour dans la cité de Calvin fin 2021. On peut d’autant plus s’étonner de cette absence de réaction sur le vote en question, que la résolution a été votée à l’échelon européen, là où la Suisse, dans un autre cénacle, le Conseil de l’Europe, très attentif aux droits humains, est des plus actives avec Alain Berset au poste de secrétaire général.

La doctrine du PLR

Qu'en dit la droite libérale? Joint par watson, le président du Parti libéral-radical genevois (PLR-GE), Pierre Nicollier, adopte, lui aussi, une attitude prudente, en quelque sorte conforme à la neutralité suisse. Le patron du PLR-GE renvoie à la doctrine de son parti valant pour les questions internationales.

«Le PLR du canton de Genève a pour principe de ne pas se prononcer sur les affaires internationales, qui sont du domaine de la Confédération et tout particulièrement du Conseiller fédéral responsable des Affaires étrangères. Nous avons fait une exception en mars 2022 pour appeler à la fin du conflit ukrainien.»

Pierre Nicollier, président du PLR-GE

Pierre Nicollier estime cependant que la Confédération est dans son rôle lorsqu'elle joue de ses bons offices pour essayer d'obtenir la libération de prisonniers politiques.

Demande d'un débat pluraliste

A propos de la venue de Rima Hassan au festival Black Movie, le président du PLR cantonal genevois a une position plus tranchée:

«Dès lors que la manifestation bénéficie d’une subvention publique, et cela vaut pour tout débat organisé dans un cadre financé par les impôts des citoyens, comme celui auquel doit participer Rima Hassan ou d’autres débats dans le cadre universitaire, il nous paraît essentiel que les discussions soient pluralistes et restent ouvertes à la contradiction.»

Pierre Nicollier, président du PLR-GE

Les réponses de la direction du festival Black Movie

Jointe par courriel, la direction du festival Black Movie a répondu à nos questions par la voix de Maria Watzlawick, sa directrice artistique. Voici ses déclarations et précisions à propos de la venue de Rima Hassan et sur son vote Parlement européen:

«Nous avons invitée Rima Hassan en tant qu’experte de la question des réfugiés, palestiniens notamment. Elle a ainsi créé l’Observatoire des camps de réfugiés, et représente en outre la sous-commission des Droits de l’Homme au Parlement européen.»

Maria Watzlawick

«Notre but est de prolonger la réflexion ou d'ouvrir les regards, à partir des sujets des films que nous présentons. Notre but est cette année d’échanger sur les questions des réfugiés palestiniens (droit au retour au retour, camps de réfugiés). Il ne s’agit pas d’une tribune politique offerte à Madame Hassan. Par ailleurs, nous n’avons aucune légitimité à commenter les votes du Parlement européen, qui est une instance démocratique, avec la liberté de vote. Ce n’est ni notre rôle, ni notre position.»

Maria Watzlawick