Ce mercredi, l'enjeu du Conseil fédéral n'est rien de moins que l'avenir de la Confédération. C'est du moins l'impression donnée par les déclarations de plusieurs secteurs importants. On a entendu des phrases comme: «Il en va de la sécurité de notre Suisse!» Ou encore: «Nous jouons notre avenir!».
En réalité, le Conseil fédéral ne fera qu'ajuster le budget 2025. Mais la tension est grande, tout comme les montants en jeu: le déficit structurel s'élève à 2-3 milliards pour les prochaines années. Et la ministre des Finances, Karin Keller-Sutter, ne laisse planer aucun doute: elle veut réduire ce déficit autant que possible.
Le 24 janvier, le Conseil fédéral a présenté pour la première fois la manière dont il entendait mettre cela en œuvre dans le budget 2025: une économie de deux milliards de francs grâce à un mélange de mesures comptables et de coupes. Il reste néanmoins un déficit à combler: «La priorité est donnée à une réduction linéaire des dépenses faiblement liées». Donc dans:
Hasard ou calcul? Deux jours plus tard seulement, le 26 janvier, l'armée annule, entre autres, la présentation des performances des forces aériennes Air Spirit 24. Celle-ci aurait dû avoir lieu en août à Emmen. En cause: «la situation financière tendue». L'ampleur de la débâcle financière a rapidement été rendue publique: il manque 1,4 milliard de francs à l'armée pour pouvoir payer les biens commandés dans les délais. Les livraisons doivent être reportées aux années suivantes.
Cette politique d'achat aventureuse a valu au chef de l'armée de sévères critiques. Mais Thomas Süssli a su utiliser cette attention à ses propres fins: il a parlé du manque de brigades blindées, de la fin de l'artillerie. Au lieu de parler de manque de financement, il a soudain été question de manque de sécurité. Et rapidement, des voix se sont élevées au Parlement pour doter l'armée de plus d'argent jusqu'en 2030 et non jusqu'en 2035, comme le proposaient le Conseil fédéral et le Parlement lui-même fin 2023.
Stefan Holenstein, président des groupements d'intérêts militaires, s'y est rallié: «Il en va de la sécurité de notre Suisse», a-t-il déclaré à Tamedia. Le juriste veut trouver l'argent pour l'armement ailleurs:
Mais les agriculteurs comptent bien empêcher la suppression des subventions, comme ils viennent de le démontrer au Parlement. Leur association déborde de confiance en elle. Lundi, elle a remis au Conseil fédéral une pétition munie de 65 000 signatures titrée «Pas de programmes d'économie sur le dos de l'agriculture».
Le domaine de la formation ne peut que rêver d'un lobby aussi puissant. Le président de l'EPFL Martin Vetterli a combattu le mandat d'économie de 100 millions du Conseil fédéral sur la radio RTS en déclarant: «Du point de vue de la Suisse, c'est une erreur». Et Joel Mezot, président de l'EPFZ, a renchéri dans le Sonntagsblick: «Il en va de notre avenir». Cela sonne dramatique, mais pas autant que le tam-tam de l'armée.
Au moins, les hautes écoles ont été entendues. On ne peut pas en dire autant du quatrième domaine menacé d'une coupe budgétaire: les œuvres d'entraide actives dans la coopération internationale sont restées discrètes, à l'exception de la campagne «Soyons solidaires maintenant» d'Alliance Sud.
Outre la crainte de coupes linéaires, les œuvres d'entraide s'inquiètent de savoir combien d'argent sera détourné de la CI pour la reconstruction de l'Ukraine, comme l'explique Andreas Missbach, directeur de l'association. Sur les 5 à 6 milliards pour les dix prochaines années, jusqu'à 80% pourraient être détournés de projets dans le Sud du monde.
Alliance Sud demande un financement exceptionnel pour l'Ukraine. Mais dans la lutte contre l'armée, les paysans et la science, le Sud mondial a du souci à se faire.
Adapté de l'allemand par Tanja Maeder