Suisse
Assurance maladie

Assurances maladie 2024: «Il faut instaurer un moratoire»

Primes maladie: comment «repartir de zéro»? Voici les pistes.
Mattea Meyer et Céline Amaudruz se battent pour réformer l'assurance maladie, mais ne sont pas d'accord comment.Image: keystone/watson

«Il faut instaurer un moratoire sur les primes maladie»

Une nette majorité de la population suisse est favorable à l'introduction d'une caisse maladie unique. C'est ce que montre un sondage réalisé par watson. Des parlementaires de droite et de gauche réagissent. Et il y a des surprises.
08.09.2023, 07:5708.09.2023, 19:06
Kilian Marti
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Corsin Manser
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Les résultats du sondage watson sont clairs et nets. Près de 80% de la population est favorable à l'introduction d'une caisse maladie unique. En outre, 88% veulent réformer le système actuel. Qu'en pensent les parlementaires qui nous représentent à Berne?

Introduction de la caisse unique

Malgré les résultats du sondage, le conseiller national PLR zurichois Andri Silberschmidt ne trouve pas qu'une caisse maladie unique soit une idée judicieuse.

«Je ne comprends pas pourquoi on veut imposer une caisse maladie aux autres. Et je doute qu'une caisse publique serait plus avantageuse que la caisse maladie la moins chère actuellement sur le marché.»

Le Zurichois croit pouvoir convaincre une majorité du peuple du bienfondé de sa position sur le sujet: «La population suisse ne veut pas d'une caisse publique», assure-t-il.

Avis plus nuancé chez l'UDC genevoise Céline Amaudruz, présidente de la commission de la santé publique du Conseil national:

«La population se persuade maintenant que la caisse unique est la solution»
Céline Amaudruz

Interrogée sur ces résultats, Céline Amaudruz se dit «à moitié surprise». Surprise, car la population a déjà voté une fois contre une caisse unique. Mais en même temps, la vice-présidente de l'UDC n'est pas étonnée parce que «la population souffre aujourd'hui, indépendamment des appartenances partisanes, des primes d'assurance-maladie élevées et en constante augmentation».

Celine Amaudruz, SVP-GE, spricht waehrend der Debatte um die BVG-Reform, waehrend der Fruehlingssession der Eidgenoessischen Raete, am Dienstag, 28. Februar 2023, in Bern. (KEYSTONE/Peter Klaunzer)
Céline Amaudruz, présidente de la commission de la santé du Conseil national. Image: keystone

La présidente de la commission de la santé publique demande donc que «les élus ne placent plus l'opinion de leur parti au-dessus de tout, mais qu'ils trouvent ensemble des solutions pour la population». La conseillère nationale UDC propose la création d'une «sous-commission parlementaire» intégrant tous les acteurs concernés. Selon elle, «il faut repartir de zéro. La situation n'est plus tenable pour les ménages». Elle va jusqu'à lancer l'idée d'«un moratoire sur l'augmentation des primes maladie».

En 2014, une initiative pour une caisse maladie unique a été rejetée à 62%. Jura, Neuchâtel, Vaud et Genève avaient toutefois voté pour. Mais l'idée pourrait revenir au menu très bientôt: le Parti socialiste prévoit en effet de lancer à nouveau une initiative pour une caisse unique.

La coprésidente du PS et conseillère nationale zurichoise Mattea Meyer déclare à watson:

«Il est insensé que toutes les caisses maladie privées se disputent la même clientèle et dépensent des millions en frais administratifs, en personnel et en publicité»

Avec une caisse maladie unique, ces dépenses disparaîtraient en grande partie.

Manuela Weichelt, conseillère nationale zougoise des Vert.e.s, souhaite, elle aussi, prendre le taureau par les cornes. «Je vais faire une intervention à ce sujet lors de la session d'automne ou suggérer à la direction du parti de lancer une initiative pour une caisse unique», annonce-t-elle à watson.

«La population suisse veut une caisse publique, mais le Parlement rechigne à le faire»
Manuela Weichelt, conseillère nationale (Les Vert.e.s/Zoug)
Manuela Weichelt, Nationalraetin GP-ZG, spricht waehrend einer Medienkonferenz des ueberparteilichen Komitees fuer ein "Ja zum Covid-Gesetz" am Montag, 22. Mai 2023 in Bern. (KEYSTONE/Peter  ...
La conseillère nationale des Vert.e.s Manuela Weichelt veut faire avancer l'introduction d'une caisse unique.Image: keystone

Suppression de l'obligation

L'UDC Natalie Rickli, cheffe du Département de la santé du canton de Zurich, a de son côté suggéré la suppression de l'obligation de s'affilier à une caisse maladie. Cette idée a visiblement peu convaincu. Selon le sondage de watson, seuls 22% de la population sont favorables à une telle suppression.

Le conseiller national PLR Andri Silberschmidt n'est ainsi pas d'accord avec la proposition de Natalie Rickli: «Ce projet n'est pas réaliste et il ne résoudrait aucun problème», dit-il.

Elle ne convainc pas davantage l'écologiste zougoise Manuela Weichelt:

«La suppression de l'assurance maladie obligatoire serait un désastre social. On voit bien, dans les pays qui ne l'ont pas, que la population la plus pauvre ou la classe moyenne inférieure sont souvent exclues des soins de santé.»
Regierungsraetin Natalie Rickli, Vorsteherin der Gesundheitsdirektion des Kantons Zuerich, spricht an einer Medienkonferenz ueber die Impfoffensive zur Coronavirus-Pandemie, am Mittwoch, 3. November 2 ...
Natalie Rickli (UDC) veut une discussion de fond sans tabous.Image: KEYSTONE

Mais que dit Natalie Rickli à propos des résultats très marqués du sondage watson? La direction de la Santé du canton de Zurich nous a écrit:

«Face à la hausse constante des primes d'assurance maladie et des coûts de la santé, la conseillère d'Etat Natalie Rickli a suggéré une réforme fondamentale du système ainsi qu'une discussion de fond sans tabou. Votre sondage montre qu'une majorité des personnes interrogées reconnaît également la nécessité d'une réforme.»

Caisse maladie à budget

Les personnes interrogées sont plus partagées sur l'introduction d'une caisse maladie low cost, comme le demande le PLR, pensée un peu sur le modèle des produits premiers prix M-Budget de la Migros. Destinée aux petits revenus pour soulager leur portemonnaie, elle ne donnerait droit qu'aux médicaments génériques, par exemple.

Une petite majorité (55%) se prononce contre. Andri Silberschmidt se réjouit des 40% qui y sont plutôt favorables:

«Près de la moitié des sondés veut une caisse maladie low cost. Si nous pouvons convaincre l'autre grande moitié qu'elle ne sera pas concernée par ce modèle, alors ma proposition a des chances d'entraîner l'adhésion.»

Aujourd'hui, toutes les prestations doivent être payées par l'assurance de base. «Certains souhaiteraient ne pas assurer certaines choses et payer moins de primes en contrepartie. Cela soulagerait la classe moyenne», affirme Andri Silberschmidt.

Andri Silberschmidt, FDP-ZH, spricht waehrend der Debatte um die Renteninitiative, waehrend der Sommersession der Eidgenoessischen Raete, am Montag, 5. Juni 2023, in Bern. (KEYSTONE/Peter Klaunzer)
Andri Silberschmidt (PLR) se réjouit des 40% d'approbation de la caisse maladie pour les petits revenus.Image: keystone

Manuela Weichelt interprète différemment les 40% favorables à une assurance low cost: «Les résultats montrent que la population ne veut pas d'une médecine à deux vitesses, comme le souhaiterait le PLR», assure-t-elle. Pour la conseillère nationale des Verts, l'argument selon lequel chacun peut opter volontairement pour une caisse maladie low cost ne vaut pas grand-chose:

«C'est une gifle pour les gens qui n'ont pas beaucoup d'argent»
Manuela Weichelt, conseillère nationale (Les Vert.e.s/Zoug)

Selon elle, la formule low-cost proposée comporte des risques pour la santé des personnes vivant juste au-dessus du minimum vital qui pourraient y souscrire.

«Si ces personnes tombent gravement malades, certaines prestations de l'assurance de base leur feront défaut. Elles ne pourront pas assumer les coûts eux-mêmes, il y a là une rupture de la solidarité.»

Plafonnement des primes à 10%

Le PS propose une autre solution: l'initiative pour l'allègement des primes. Celle-ci impliquerait que les primes d'assurance maladie soient plafonnées à 10% du revenu d'un ménage. Les personnes interrogées soutiennent à 69% cette proposition.

Mattea Meyer, Co-Praesidentin SP, spricht waehrend einer Medienkonferenz der SP zur Kampagne fuer die eidgenoessischen Wahlen am Montag, 7. August 2023 in Bern. (KEYSTONE/Peter Klaunzer)
Le parti de Mattea Meyer, coprésidente du PS, veut un plafond à 10%.Image: keystone

Un résultat qui ne surprend pas la coprésidente du PS Mattea Meyer. «Notre initiative vise à corriger l'actuel système antisocial de prime, qui fait qu'une manager paie le même montant qu'un employé de crèche». Actuellement, 14% du revenu en moyenne serait consacré à l'assurance maladie. «Nous devons donc avant tout soulager les familles et les personnes aux revenus bas et moyens», propose l'élue zurichoise.

Le conseiller national PLR Andri Silberschmidt remet en question le plafonnement à 10%: «Les primes ne doivent pas être trop élevées, certes. Mais il y a tout de même le système de réduction des primes prévu par les cantons, qui bénéficie déjà à un tiers de la population». Ce système devrait être maintenu pour ceux qui en ont vraiment besoin.

Primes liées au revenu

La conseillère nationale Manuela Weichelt a déposé en juin une intervention pour des primes calculées en fonction du revenu. L'écologiste propose un financement plus important de l'assurance maladie via les impôts.

Et surtout, un changement de système actuel, dit de prime par tête, chaque individu étant soumis au même régime, quels que soient ses revenus. Fin août, le Conseil fédéral a recommandé de rejeter cette proposition. Pour le gouvernement, il existe en effet déjà «un correctif sociopolitique à la prime par tête». Le Conseil fédéral estime qu'un changement de système n'est «pas indiqué».

Dans le sondage, les primes liées au revenu, idée soutenue par Manuela Weichelt, recueillent 63% d'avis favorables. Une minorité, 12 %, y est totalement opposée, tandis que 23% cochent la case «plutôt non».

Manuela Weichelt l'assure:

«La classe moyenne ne profite pas de la réduction des primes, et les cantons tentent de plus en plus de se soustraire au financement. C'est un fait que depuis 2012, dix cantons versent régulièrement moins de réductions de primes.»

Selon l'élue, les primes en fonction du revenu sont une solution efficace pour lutter contre la charge trop lourde qui pèse sur les ménages. «De plus, nous connaissons déjà ce système pour l'assurance-accidents.» Pour elle, il est clair qu'un changement de système est nécessaire:

«Les gens ne veulent pas qu'un milliardaire paie autant pour sa caisse maladie qu'un caissier de la Migros»

Adapté de l'allemand par Tanja Maeder

Il imite un footballeur après un but à la perfection
Video: watson
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