Depuis des années, on ne se demande plus si les primes d'assurance vont augmenter – c'est une quasi-certitude. La question qui se pose chaque année est plutôt: vont-elles augmenter fortement ou très fortement? Cette fois-ci, l'augmentation sera très forte. C'est ce qu'on peut tirer de l'état des lieux de l'Office fédéral de la santé publique (OFSP), qui s'est tenu jeudi à Liebefeld, dans le canton de Berne.
Les coûts de la santé ont augmenté de 2,6% l'année dernière. Pour les premiers mois de 2023, la hausse est de 3,4% selon l'OFSP. «Les primes reflètent les coûts», explique Thomas Christen, vice-directeur de l'OFSP.
Les caisses maladie disposent en règle général d'un instrument qui leur permettrait d'amortir les hausses de primes trop importantes: les réserves qu'elles accumulent avec les bénéfices de l'assurance de base. Le socle de ces réserves, prescrit par la loi, doit protéger les assurés contre le risque de non-paiement. Les caisses peuvent aussi utiliser leurs réserves en les redistribuant à leurs clients sous la forme de primes plus basses.
Mais les réserves se trouvent actuellement dans une situation compliquée. L'année dernière, les caisses maladie ont subi une perte énorme avec leurs placements sur les marchés des capitaux. Selon l'OFSP, celle-ci s'élève à environ 1,7 milliard de francs. Cette perte serait due à la guerre en Ukraine, à la politique des taux d'intérêt des banques centrales et à l'inflation. Le résultat des assureurs maladie n'est ni particulièrement bon ni particulièrement mauvais, a déclaré Philipp Muri, responsable de la surveillance des assurances à l'OFSP.
En chiffres concrets, cela signifie que les réserves de toutes les caisses s'élèvent encore à 8,5 milliards de francs. Selon le vice-directeur Christen, ce n'est certes pas inquiétant, «mais le tampon a disparu».
La question des réserves est un parfait exemple de la difficulté de piloter le système de santé. En 2021, les réserves des assureurs maladie s'élevaient encore à 12,4 milliards de francs. De nombreux politiciens – tant au Parlement qu'au gouvernement – les trouvaient trop élevées et demandaient leur réduction. Dès 2020, le Conseil fédéral avait donc créé de nouvelles incitations:
Les incitations ont fonctionné, les réserves ont donc diminué. Et les coûts continuent d'augmenter. Une autre évolution aggrave cette situation: cette année, de nombreux assurés ont changé de caisse, augmenté leur franchise et accepté volontairement une restriction dans le choix des prestations médicales. Mais ce comportement, en soi souhaitable, a pour conséquence que les caisses encaissent moins de primes que prévu au budget. On parle d'une «érosion des primes». L'OFSP s'attend donc à un «léger effet de rattrapage» pour l'année prochaine. La conséquence? Des primes plus élevées.
Où l'OFSP voit-il encore une marge de manœuvre dans la lutte contre les coûts? Christen fait référence aux 140 millions de francs économisés l'année dernière dans les laboratoires. Il annonce que la prochaine étape sera le contrôle des prix des médicaments, qui devrait rapporter jusqu'à 100 millions de francs. En outre, le contrôle ciblé des prestations médicales devrait permettre de réduire les coûts de 75 millions de francs supplémentaires.
Ces économies sont des cacahuètes en comparaison avec les montants de l'assurance de base. Christen mentionne alors toute une série de révisions au Conseil fédéral et au Parlement, toutes dans le but de maîtriser les coûts. Et il précise:
Il s'agit d'une mission politique sans fin.
Traduite et adapté de l'allemand par Léa Krejci