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Blatten

Après l'éboulement de Blatten, trois scénarios pour le village

A destroyed house in the water from the river Lonza after the formation of a lake on the last houses of the village of Blatten collapsed after a massive avalanche, triggered by the collapse of the Bir ...
«Blatten a un avenir», promet le conseiller d'État valaisan, Stéphane Ganzer. Mais de quoi ce futur sera-t-il fait?Image: keystone

Quel avenir pour Blatten? Trois scénarios se dessinent

Le petit village alpin de Blatten a quasiment été entièrement rasé par un éboulement dramatique. Aujourd'hui qu'il est recouvert de roches et qu'un petit lac s'est formé, la question de son futur et celui de ses habitants se pose.
07.06.2025, 19:0707.06.2025, 19:07
Lena Schibli
Lena Schibli
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«Nous reconstruirons notre village», a déclaré le président de Blatten, Matthias Bellwald face aux médias quelques heures seulement après l'effondrement du glacier dans le Lötschental.

Ces événements ont lancé un débat de fond entre experts, politiques et acteurs de la zone sur l'avenir des vallées alpines. Mais une question centrale demeure: faut-il vraiment reconstruire Blatten? Si oui, où? A quel prix et aux frais de qui?

Lors de la conférence de presse de mercredi, le conseiller d'Etat Stephan Ganzer, a été clair:

«Le message que nous voulons envoyer aujourd'hui est que le village de Blatten a un avenir»

Alors, à quoi celui-ci pourrait-il bien ressembler?

Un nouvel emplacement pour Blatten

Premier scénario: une reconstruction, mais pas au même endroit.

Le président du conseil de vallée, Christian Rieder a confirmé à la SRF qu'il était probable que Blatten «renaisse» ailleurs. Par exemple à Weissenried, qui fait déjà partie de la commune.

weissenried blatten
Le hameau de Weissenried (en rouge) fait partie de la commune de Blatten et a été épargné de peu par la masse de gravats. Le «nouveau» village pourrait y voir le jour.Image: map.geo.admin

Dans ce cas, les services compétents des autorités devraient réévaluer la carte des dangers naturels. «Une reconstruction ne peut avoir lieu que là où une analyse garantit la sécurité», expliquent les autorités.

Le président du conseil de vallée priorise aussi cet aspect: «Nous devons examiner précisément où et dans quelles conditions une reconstruction est possible». Et le cône de déjection? Il pourrait être végétalisé, selon Christian Rieder.

KEYPIX - A aerial view captured one day after a massive avalanche, triggered by the collapse of the Birch Glacier, shows the destruction it caused as it swept down to the valley floor and demolishing  ...
Face aux images de la destruction, difficile de s'imaginer de quoi l'avenir sera fait.Image: KEYSTONE

Mais avant de penser à rebâtir, il faut s'occuper des millions de mètres cubes d'éboulis. Pour cela, il faut d'abord attendre que la situation se stabilise suffisamment pour pouvoir commencer les travaux de déblaiement.

Les opposants à l'idée argumentent qu'un «nouveau» Blatten serait trop dangereux. Le géographe Werner Bätzing nuance auprès du Tagesanzeiger: un éboulement ne se répète jamais. Et puis, la protection ultime contre les dangers naturels n'existe pas.

«En principe, on n'a jamais vu nulle part une sécurité à 100% contre les dangers naturels»
Werner Bätzing, géographe

Mais a-t-on réellement les moyens financiers pour une reconstruction? Le scientifique en est convaincu. Selon lui, ne dépenser de l'argent que pour des régions métropolitaines est une erreur:

«Si l'on se concentre uniquement sur les zones de densification, cela mettra en péril la notion de patrie dans le monde»

Le géographe va même plus loin: s'il n'y avait plus que la grande ville, l'agglo et une «friche alpine», l'identité helvétique disparaîtrait.

Les assurances immobilières assumeraient les coûts des logements des particuliers. Comme il n'existe rien d'obligatoire en la matière au niveau cantonal en Valais, la tâche incombe aux compagnies privées.

Reconstruire un Blatten neuf à l'identique

Autre scénario pour le Blatten d'après: évacuer totalement les masses d'éboulis qui ont enseveli la localité. Et tout reconstruire comme avant.

Plusieurs experts jugent toutefois ce scénario peu probable. A l'image du géologue Marco Buser: «Avec les millions de mètres cubes qui ont recouvert la vallée, cela coûtera tout simplement trop cher», déclare-t-il à 20 Minuten.

«Le village n'existera plus tel qu'il était»
Marco Buser

Professeur émérite à l'Université de Genève, Walter Wildi ne dit pas autre chose au Blick: «Il faudra reconstruire ailleurs». Il importe que le «nouveau» Blatten sorte de terre plutôt dans le sens de la pente.

Christian Rieder, le président du conseil de vallée acquiesce. Enlever le cône de déjection n'est pas réaliste, ne serait-ce que parce qu'il faut trouver un endroit pour déposer les matériaux, explique-t-il à la SRF.

Vidéo: extern / rest/Pomona Media

Délocaliser les habitants de Blatten

Dernière variante: déloger définitivement l'ensemble de la population. Ce scénario a directement déclenché un débat médiatique peu après l'éboulement.

Le rédacteur en chef de la NZZ am Sonntag, Beat Balzli a ainsi interrogé la proportionnalité des moyens à investir. La compensation financière et celle des charges pour les régions de montagne auraient atteint leurs limites.

«Cela réduit les dommages potentiels. Là où il y a moins de monde, il y a moins de dégâts»
Beat Balzli

Le directeur de l'Institut des cultures alpines, Boris Previšić, fait en revanche remarquer qu'il n'y a guère de raisons tangibles de vider des vallées entières. Non seulement en raison de l'enracinement des habitants, mais aussi parce qu'il y existe des zones sûres dans lesquelles on peut encore bâtir aujourd'hui.

Le rédacteur en chef du Walliser Bote déplore, lui, qu'on discute déjà d'un retrait quelques jours après ce qu'il s'est passé. Il parle d'une «attaque inquiétante contre les villages de montagne». Et ajoute:

«Une politique qui sauve des banques à coups de milliards, mais veut laisser tomber ces régions du pays, n'a pas seulement perdu le sens de la mesure - mais aussi celui de l'orientation».

Le président de la commune de Conches, Francesco Walter, partage cet avis:

«Ceux qui proposent d'abandonner purement et simplement Blatten dans le Lötschental ou d'autres villages concernés argumentent comme si nous étions un corps mort pour la société, dont il faudrait se débarrasser pour des raisons financières. Ce n'est pas seulement cynique, c'est déshumanisant».

Si l'on pousse cette idée jusqu'au bout, il faut aussi exiger de ne plus soigner les malades, poursuit l'élu. La solidarité n'a rien d'un argument définitif, mais elle constitue une valeur fondamentale: «Si elle devient soudainement un poids, ce n'est pas le village de montagne qui pose problème - mais bien notre conception sociale de la cohésion».

Traduit et adapté par Valentine Zenker

L'effondrement du glacier du Birch, au-dessus de Blatten
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L'effondrement du glacier du Birch, au-dessus de Blatten

Une grande partie du glacier du Birch, au-dessus de Blatten, a cédé ce mercredi après-midi.

source: sda / jean-christophe bott
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Vol en drone au-dessus de Blatten
Video: extern / rest
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