Lors des élections de 2019, les Verts ont fait un score canon, plus du double par rapport à 2015. A présent, ils doutent. Le dernier baromètre électoral de la SSR ne leur promet pas une débâcle, mais tout de même un recul de 3% des voix, synonyme de sièges en moins sous la Coupole.
Certes, les sondages sont des instantanés, mais la tendance pour les Verts est inquiétante. Entre 2019 et 2021, ils ont réussi à se maintenir dans les intentions de vote, mais depuis, leur cote s'effrite. Cela peut paraître surprenant, quand on sait que le dérèglement climatique pointe en tête des préoccupations des Suisses dans le baromètre électoral établi par l'institut Sotomo.
Il y a des explications à ce paradoxe. Tous les grands partis, à l'exception de l'UDC, ont désormais «intégré» la crise climatique. En témoigne la loi sur la protection du climat adoptée en juin en votation. D'autres lois et initiatives populaires sur le même thème sont dans le pipeline. Le vote vert n'apparaît donc plus comme le seul moyen de faire pression sur l'agenda climatique.
Une partie du problème tient aux Verts eux-mêmes. Au cours des quatre dernières années, ils ne sont pas parvenus à se construire une identité propre. Ils se distinguent tout au plus des socialistes par la couleur de leur parti. En termes de contenu, les deux formations sont pour ainsi dire identiques. Il n'est alors guère étonnant, face aux difficultés économiques du moment, de voir des électeurs choisir le confort d'un grand parti social.
Un autre facteur joue en défaveur des Verts. Il y a quatre ans, le débat était dominé par les protestations de la grève du climat emmenée par Greta Thunberg. La peur des jeunes pour leur avenir a ébranlé de nombreux électeurs qui dès lors ont voté écolo. Mais l'époque des grandes manifestations pour le climat semble être révolue.
A présent, la lutte pour le climat est comme dominée par des radicaux et leurs actions illégales. En Allemagne, ce mouvement porte le nom de Letzte Generation, Renovate Switzerland chez nous. A peine les Suisses avaient-ils dit oui à la loi climat, en juin, que ces militants se sont à nouveau collés aux routes.
Cette «résistance civile climatique», selon leurs termes, ne fâche pas seulement les automobilistes directement gênés dans leurs mouvements. Dans le sondage de la SSR, les collages de mains sur les routes sont la deuxième plus grande source de désagrément après le naufrage de Crédit Suisse. Un phénomène qui cause beaucoup de tort aux Verts, estime le politologue Oliver Strijbis, de l'Université de Zurich, interrogé par watson.
Il n'y a pas de liens organiques stricto sens entre les Verts et les activistes climatiques, mais les premiers sont mis dans le même sac que les seconds. Le président du parti Balthasar Glättli a expliqué à watson qu'il trouvait pour le moins étrange qu'un de ces militants du climat «prenne l'avion de Zurich pour se rendre à Paris, alors qu'il aurait pu monter dans un TGV». Ce n'est pas là ce qui s'appelle prendre réellement ses distances avec ceux qui se collent au bitume.
Pour Oliver Strijbis, «les Verts devraient ignorer les activistes du climat et aborder le dérèglement climatique à leur façon».
La principale revendication des activistes est un plan d'urgence pour la rénovation thermique de tous les bâtiments d'ici 2030. Il y a pourtant un objectif plus important et plus facile à réaliser que celui-ci: la suppression des combustibles fossiles. Les ressources financières et humaines doivent aller en priorité au développement de l'électricité solaire, comme à tout ce qui contribue à une plus grande efficacité énergétique.
«Décarboner plutôt rénover», tel pourrait être le slogan qui permettrait aux Verts de se démarquer des activistes climatiques sans risquer de trop les brusquer. La proposition de Balthasar Glättli consistant à produire de l'énergie solaire en hiver va dans ce sens.
En axant leur campagne sur la décarbonation, les Verts peuvent avantageusement se démarquer de l'image repoussoir d'activistes armés de leur tube de colle. Mais qu'ils ne se fassent pas d'illusions! Il s'agira pour eux de limiter les dégâts en octobre. Il est trop tard pour espérer échapper à la spirale négative.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)