Le cas est sans précédent en Suisse: le 11 mai, une jeune fille de 14 ans aurait tué une camarade de 15 ans à Berikon, dans le canton d’Argovie. Ce qui surprend moins, en revanche, c’est l’arme utilisée: un couteau. En effet, les armes blanches sont de plus en plus répandues en Suisse.
En Suisse, les résultats d'une enquête montrent qu'environ un jeune sur sept porte un couteau sur lui occasionnellement. Dirk Baier, criminologue et professeur à la Haute école des sciences appliquées de Zurich (ZHAW) et à l'université de Zurich, nous explique:
Selon les statistiques criminelles suisses de 2024, trois cas de lésions corporelles graves sont enregistrés chaque jour dans le pays. Dans un quart de ces affaires, un couteau est impliqué. Selon Baier, ce phénomène est largement porté par les garçons:
Lorsqu’un adolescent porte une arme blanche sur lui, le risque qu’une bagarre dégénère en agression grave augmente considérablement. Les dernières statistiques criminelles de 2024 le montrent bien: pour la troisième année consécutive, les délits de violence graves ont augmenté.
Les garçons portent plus souvent des couteaux sur eux, notamment parce qu'ils cherchent à correspondre à des idéaux de masculinité véhiculés sur les réseaux sociaux. Par ailleurs, ils se retrouvent plus souvent en groupe dans les espaces publics. Or, dans certaines bandes, cela peut conduire à des comportements d’exclusion des autres, et, dans le pire des cas, à des actes de violence.
Dans le cas du meurtre de Berikon, c’est une fille qui portait un couteau sur elle. Pour la Suisse, on ne peut pas affirmer que le nombre de filles qui portent des armes blanches sur elles a augmenté. A ce sujet, Dirk Baier précise:
Le taux de filles portant souvent des couteaux ne représenterait qu'un quart de celui observé chez les garçons.
Andreas Baier ne pense pas que les filles portent un couteau sur elles pour mimer le comportement de certains garçons. L'écart entre les hommes et les femmes reste très stable à cet égard, selon lui. Il indique en revanche:
Difficile de dire précisément d’où proviennent les couteaux que transportent ces jeunes. Baier distingue trois voies d'approvisionnement principales: les cercles d'amis, internet (où l'on peut même acheter des couteaux interdits), et enfin, comme l'indiquent certains cas chez les jeunes, l'étranger.
Les différences régionales en matière de détention de couteaux n'ont pas été étudiées jusqu'à présent. Baier doute qu'il y ait de grandes différences entre les cantons.
Ce qui est sûr, c'est que les attaques au couteau entraînent, sinon la mort, des blessures extrêmement graves. Valentin Neuhaus, spécialiste des blessures au couteau et directeur du service de traumatologie de l'hôpital universitaire de Zurich, en a récemment parlé dans le Tages-Anzeiger. Les blessures par arme blanche sont complexes pour le chirurgien: lors de l'opération, il risque de causer des lésions encore plus importantes. Valentin Neuhaus plaide pour une meilleure sensibilisation des jeunes face au danger que représentent les attaques au couteau.
Traduit de l'allemand par Anne Castella