Qui sont ces trumpistes suisses qui se réunissent en secret?
Ce Comité Trump Suisse a des allures de société secrète. Il s’est rassemblé fin mai, dans le «salon privé» d’un restaurant de l’Arc jurassien. C’est le site romand Le Peuple qui nous l’apprend en date du 15 août. Et pour cause, son rédacteur en chef, Raphaël Pomey, était de la partie. Comme observateur. S’étant engagé à garder confidentielles certaines informations, son compte-rendu nous renseigne principalement sur l’état d’esprit de cette agape, qui a vu la section helvétique dudit comité fraterniser avec son homologue française.
«Lutte contre le "wokisme", défense de la foi chrétienne, maîtrise des frontières», étaient au menu, le tout dans la communion du grand homme, Donald Trump, rapporte Le Peuple. Joint par watson, Raphaël Pomey décrit une partie française «plutôt cathos endimanchés», à l’image de son président, le septuagénaire zemmourien Georges Clément. Les Suisses affichaient plus de simplicité dans l'apparence. Parmi eux, le secrétaire général du l’UDC Valais et député au Grand Conseil, Jérôme Desmeules.
Complètement masos?
Une chose ne manque pas d’étonner: alors que le président américain vient de mettre la grosse pâtée à la Suisse en taxant de 39% ses exportations vers les Etats-Unis, le Comité Trump Suisse visiblement en redemande. Comme l’indique Le Peuple, ledit comité se réunira à nouveau en effet en fin d’année autour de «trois thèmes d’actualité» à définir.
Masos, nos trumpistes suisses? Nous avons posé une série de questions au Comité Trump Suisse, via son compte Instagram, sans toutefois être informé de l’identité du correspondant qui nous a répondu:
«Un souffle nouveau»
Notre interlocuteur mystère est bien plus disert ensuite. Question: étant donné la sévérité des droits de douane appliqués à la Suisse par Donald Trump, votre comité ne navigue-t-il pas à contre-courant? Réponse en quatre points:
- «Être trumpiste, c’est avant tout être patriote. C’est aimer son pays de manière inconditionnelle, défendre sa souveraineté, protéger sa nation et placer en toute circonstance les intérêts de son peuple au premier rang.»
- «C’est se dresser face au wokisme, réaffirmer les vérités naturelles et promouvoir avec fierté les valeurs chrétiennes, la famille et les traditions. C’est assumer un conservatisme culturel, défendre la liberté individuelle, et garantir à chacun le droit de choisir pour son propre corps, y compris en matière de vaccination.»
- «Le trumpisme n’est pas une posture politique éphémère. C’est un combat, un état d’esprit, un exemple à suivre. Il dépasse largement les décisions conjoncturelles que Donald Trump peut être amené à prendre (comme imposer 39% à la Suisse), car cela relève de choix tactiques et non de l’essence même du mouvement.»
- «Le trumpisme va bien au-delà de l’homme. C’est une vision du monde. C’est un souffle nouveau, une renaissance politique et morale.»
Donald Trump ou l'être infaillible. Les publications Instagram du Comité Trump Suisse sont une ode au style MAGA, tout en force, du locataire de la Maison-Blanche. Elles épousent les thèses les plus radicales de la droite identitaire.
Contacté par e-mail, l’UDC valaisan Jérôme Desmeules – seul nom rendu public avec celui du président du Comité Trump France, Georges Clément – assume sa présence fin mai à la réunion binationale, contrairement aux autres participants suisses, qui craignent peut-être d'éventuelles représailles sociales.
Il défend Trump et charge le Conseil fédéral
Les 39% de taxes? Le député au Grand Conseil du canton du Valais apporte son soutien à Donald Trump et charge le Conseil fédéral, ainsi que les pharmas.
Sur les «valeurs», Jérôme Desmeules se dit «sans doute moins en phase» avec le Comité Trump Suisse. «Je défends des valeurs qui ont fait le succès de nos sociétés: l’état de droit, la liberté d’expression, l’égalité homme-femme, la séparation du religieux et du politique, le mérite individuel et la responsabilité personnelle.»
«Pour le moins hasardeux»
Son camarade de parti, comme lui valaisan, le conseiller national Jean-Luc Addor, revendique son appartenance à une seule instance. «Je fais partie du comité Suisse», dit-il, plus grinçant qu’ironique. Celui qui fut observateur lors de la dernière élection présidentielle américaine pour l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), affirme:
Le Comité Trump Suisse n’a pas jugé utile de retirer sa publication Instagram postée le jour de la Fête nationale, le 1er Août, lorsque la Maison-Blanche annonça pour la première fois que les marchandises helvétiques seraient imposées à 39%. Grâce à l'intelligence artificielle, on y voit Donald Trump en bredzon, le vêtement de travail de l’armailli, tout sourire aux côtés d’un saint-bernard équipé de son petit tonneau autour du cou. «Répugnant, le type que vous défendez est juste une menace et un adversaire», proteste un internaute sous la publication. On ne pourra pas reprocher au Comité Trump Suisse de se renier.