
François Gabella et Fanny Roulet croisent le fer.Image: Montage watson
Duel
Quelque 50% des porteurs du Covid occupant un lit d'hôpital en Suisse sont des personnes non-vaccinées (à peine 15% de la population). Faut-il leur faire payer leurs frais d'hôpitaux? Face à face.
12.01.2022, 05:4512.01.2022, 21:14

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C'est une des caractéristiques de cette crise: sa capacité à faire jaillir débat sur débat et exploser certains tabous. Après la question de la vaccination obligatoire, voici venue celle de la non-prise en charge par l'assurance maladie des hospitalisations dues à la non-vaccination des patients Covid. Etant donné que ceux-ci occupent actuellement plus de la moitié des lits d'hôpital, certains demandent à ce qu'ils en assument le coût. Au sens propre.
C'est le cas de François Gabella, membre du comité d'Economiesuisse, qui plaide à titre personnel pour une telle mesure et qui l'exprimait ce 10 janvier à la Matinale RTS. Il y voit une logique de responsabilité qui découle d'une société libérale comme la nôtre. L'avocate genevoise Fanny Roulet, elle, est farouchement opposée à cette idée, estimant qu'elle ajouterait de la discrimination là où il y en a déjà. Place au débat.
1. Pour ou contre la prise en charge d'au moins une partie des coûts des hospitalisations Covid des non-vaccinés par eux-mêmes?
François Gabella: Pour! Et pourquoi pas la totalité des coûts. L'Etat de Singapour l'a fait, nous ne serions pas les seuls. Les personnes qui décident sciemment de ne pas se faire vacciner mettent en danger les personnes potentiellement à risque et contribuent à propager l'épidémie. Mais elles prennent aussi le risque en toute connaissance de cause de coûter beaucoup d'argent à la collectivité.
Fanny Roulet: Cela serait contraire non seulement au système actuel de la LAMal, mais aussi aux droits fondamentaux applicables en Suisse. Mais surtout, cela aurait pour effet de créer une discrimination entre deux catégories de personnes non-vaccinées: ceux qui en ont les moyens et ceux qui ne les ont pas. D’un point de vue juridique, cela m’apparaît problématique.
2. Un alcoolique ou un fumeur peut être hospitalisé pour une maladie due à sa consommation et il est assuré. Est-on dans un autre cas de figure avec les personnes qui refusent le vaccin?
François Gabella: Oui. La grande différence entre ces deux situations, c'est que les personnes dont vous parlez souffrent souvent d’une addiction. Or, l'addiction est une maladie, qui mérite une certaine solidarité de la part de la société. Le refus de se faire vacciner contre le Covid à l'heure actuelle n'est pas une maladie: c'est un choix délibéré, que je considère comme non responsable et non éclairé.
Fanny Roulet: Oui, mais il reste que, selon moi, envisager la non prise en charge des soins médicaux pour les non-vaccinés équivaut à ouvrir la boîte de Pandore. On a tous des habitudes qui sont susceptibles de nous causer des ennuis de santé: un manque d’activité physique, une alimentation trop salée, la cigarette, un goût trop prononcé pour le vin. Où mettre la limite ensuite?
3. L'accès au soin est un droit fondamental. Existe-t-il des moyens légaux d’établir des exceptions ?
François Gabella: Les lois et pratiques admettent une augmentation de l'exposition du preneur de risque en fonction de son degré d'aventure. A titre d'exemple, j'ai fait des courses de moto quand j'étais jeune, mon assurance m'a contacté en me disant que je faisais un sport considéré comme à risque et que mes prestations allaient donc être diminuées. Je trouve ça logique.
Fanny Roulet: Tout droit fondamental peut être restreint, à quatre conditions: il faut une base légale, mais aussi que la mesure soit adéquate et proportionnée et qu’elle soit justifiée par un intérêt public prépondérant. Enfin, l’essence des droits fondamentaux est inviolable. La mesure dont nous parlons n’apparaît ni adéquate, ni proportionnée au but visé. L’intérêt public prépondérant – quand on parle d’un risque pour la vie – n’est pas réalisé non plus. Mais je précise que la question du triage en cas de manque de places est un problème différent.
4. Imaginons qu'une telle mesure soit prise. Quelle efficacité aurait-elle selon vous?
François Gabella: Une efficacité significative. La moitié des hospitalisations concerne à peine 15% de la population (les non-vaccinés). Or, on ne peut pas augmenter les capacités des soins intensifs: on n'a plus assez de personnel. Quand bien même ce serait possible, cela coûterait horriblement cher: il faut compter une à deux personnes à plein temps pour un patient aux soins intensifs. Il est temps de rappeler aux réfractaires du vaccin que la liberté va de pair avec la responsabilité.
Fanny Roulet: Je ne suis pas certaine qu’elle puisse avoir un réel impact au niveau de la vaccination. Non seulement, je crains que les concernés ne réalisent pas l’ampleur de ces coûts. Mais surtout, j’ai le sentiment que si les restrictions déjà imposées n’ont pas su convaincre ceux qui refusent aujourd’hui de se faire vacciner, une nouvelle restriction de cette nature – qui va à l’encontre des fondements même de notre système de sécurité sociale – n’aura pas d’effet notable.
5. Au lieu de discuter sur la punition ou non des non-vaccinés au moyen de mesures détournées, pourquoi ne pas avoir un grand débat constitutionnel sur la vaccination obligatoire?
François Gabella: Je pense que la vaccination obligatoire est une voie sans issue, parce qu'elle supposerait une contrainte quasi physique. En revanche, il faut tout faire dans les limites de la loi pour que tout le monde se vaccine s'il peut le faire, ou alors accepte les conséquences de son refus de se faire vacciner; à savoir des restrictions supplémentaires de sa liberté de mouvement, ainsi que des frais potentiellement élevés.
Fanny Roulet: Ce débat est possible. Il serait d’ailleurs juridiquement moins problématique que celui des coûts. Il a déjà partiellement eu lieu lors de l’adoption de la loi sur les épidémies – qui permet à l’Etat d’imposer la vaccination à certaines catégories de la population. Cela étant, je doute qu’une telle mesure aboutisse: en Suisse, on refuse par exemple la vaccination obligatoire des enfants, alors qu'elle existe chez certains de nos voisins.
Il a tenté par deux fois, le même jour, de faire passer de la viande en contrebande par la douane. Mais les agents ne se sont pas laissé rouler. Récit d'une grave erreur.
Le 21 septembre dernier (c'était jeudi), des douaniers interceptent une voiture à la frontière de Vallorbe, dans le canton de Vaud. Ils ont alors, comme le veut la coutume, interrogé le conducteur, un Suisse âgé de 45 ans, sur d'éventuelles marchandises à déclarer. Celui-ci a annoncé transporter une plante, autorisée à l'importation, ainsi que d'autres achats respectant, pour le coup, les limites de franchise en termes de valeur et de quantité. Jusque-là, c'est un sans-faute.