La Suisse annule la conférence sur l'application des Conventions de Genève au Proche-Orient prévu vendredi. Le nombre de participants de différentes régions soutenant le projet de déclaration finale n'est pas suffisant, a-t-elle annoncé jeudi aux Etats parties.
Le format, pour lequel 196 parties avaient été conviées, devait aboutir à une réaffirmation du droit international humanitaire (DIH). Mais d'importantes tensions entouraient ces dernières semaines la réunion, après des mois de consultations menées par la Suisse.
Et à la mission suisse à l'ONU à Genève de déduire:
Après avoir constaté des divergences depuis la proposition de déclaration finale fin février, la Suisse a tenté de «trouver des solutions de compromis», a précisé jeudi en soirée le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE). Mais elle a «dû prendre acte de l'absence de consensus».
La Suisse, dépositaire des Conventions de Genève, avait reçu en septembre dernier le mandat de l'Assemblée générale de l'ONU de prévoir cette réunion dans les six mois, soit d'ici le 18 mars. Défenseuse du multilatéralisme, elle avait immédiatement annoncé qu'elle honorerait celui-ci. Désormais, elle considère avoir rempli sa tâche et a relayé cette situation au secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres.
Israël, qui a accusé la Suisse de porter une approche «révisionniste» aboutissant à de nouvelles obligations, et les Etats-Unis avaient décidé de boycotter la réunion. L'Etat hébreu reprochait à Berne d'avoir décidé d'une plateforme «pour attaquer Israël» et favoriser les groupes terroristes.
Selon des médias arabes, les Palestiniens étaient sur le point aussi de renoncer à une participation. En cause, le projet de déclaration finale n'abordait pas la situation des détenus palestiniens mais seulement celle des otages israéliens. De quoi fâcher les pays de l'Organisation de la conférence islamique (OCI) qui ont envoyé une lettre à la Suisse.
Les Palestiniens souhaitaient que la réunion aille plus loin qu'une seule réaffirmation du DIH, en s'appuyant sur l'avis consultatif rendu l'année dernière par la Cour internationale de justice (CIJ). Ils étaient notamment favorables à un mécanisme pour faire appliquer ce droit, face aux violations israéliennes, et exigent que les différents Etats d'honorer leurs obligations internationales.
Une ONG palestinienne demandait elle un document plus politique qui appellerait à la fin de l'occupation israélienne. Elle enjoint aussi les Etats parties à poursuivre les responsables et complices des crimes dans les territoires palestiniens qui se trouveraient chez eux.
Les participants devaient surtout discuter de la quatrième Convention de Genève, qui porte sur la protection des civils. Selon les chiffres du ministère de la santé du Hamas, que l'ONU considère comme crédibles, plus de 48 000 personnes au total ont été tuées dans la bande de Gaza depuis le 7 octobre 2023.
Certains experts indépendants de l'ONU, qui ne s'expriment pas au nom de l'organisation, sont allés jusqu'à parler de génocide contre la population du territoire palestinien. Des dizaines d'autres personnes sont décédées en Cisjordanie ces dernières semaines depuis une grande offensive israélienne contre des camps de déplacés.
De leur côté, les groupes radicaux palestiniens retiennent toujours des dizaines d'otages dans la bande de Gaza. Organisées par le Hamas, les «parades» d'Israéliens relâchés ou de cadavres ces dernières semaines dans le cadre de l'accord de cessez-le-feu ont attiré de nombreuses réprobations, notamment celles du Comité international de la Croix-Rouge (CICR).
L'Autorité palestinienne les a elle-même condamnées. Mais elle alerte aussi sur la situation des nombreux prisonniers palestiniens en Israël, dont certains ont relayé des violations contre eux. (ag/ats)