Devant le Tribunal pénal fédéral, l'accusation a requis mercredi une peine de 20 ans contre l'auteur présumé de l'assassinat d'un diplomate égyptien à Genève en 1995. Ce vendeur de voitures répond aussi de viols, séquestrations, menaces, escroquerie et gestion déloyale, notamment.
Le magistrat a estimé que l'infraction d'assassinat était réalisée dans le cas du prévenu, un double national italo-ivoirien. Pour cette seule accusation, une peine de 17 ans devrait être prononcée, mais la condamnation doit être portée à 20 ans, le maximum prévu pour l'assassinat dans les circonstances présentes, en raison des autres infractions qui sont reprochées. L'expulsion pour 15 ans est également réclamée.
Par contre, le procureur a estimé que les conditions d'un internement ne sont pas réunies. Il n'y a en effet pas de danger qualifié de commission d'un nouvel homicide. De même, les conditions d'un traitement thérapeutique ne sont pas réalisées non plus, car son efficacité n'est pas démontrée en l'espèce et l'intéressé n'est pas prêt à s'y soumettre.
Le représentant du Parquet a justifié sa demande d'acquittement de l'amie de l'accusé par le fait que son intention délictuelle n'est pas établie. Même si son ADN a été mis en évidence sur le silencieux artisanal, retrouvé sur le lieu du crime, il n'est pas prouvé qu'elle connaissait la nature de cet objet ni sa destination ni le projet criminel de son compagnon.
Compte tenu de la gravité des faits, il n'était pas possible d'acquitter l'accusée par ordonnance pénale. Cette décision doit être prise par la Cour des affaires pénale, a justifié le procureur.
Le Ministère public de la Confédération (MPC) s'est longuement étendu sur les éléments qui incriminent le vendeur de voitures. Une empreinte et des traces d'ADN sur le silencieux, le témoignage de l'agent infiltré dans sa cellule à Champ-Dollon, le demi-aveu – «la technique m'a rattrapé» – lâché par le prévenu confronté pour la première fois aux preuves scientifiques.
Pour l'accusation, ces éléments joints aux circonstances du moment et aux antécédents de l'accusé plaident en faveur du scénario privilégié par les enquêteurs: un assassinat perpétré à la demande d'inconnus, probablement une puissance étrangère, contre de l'argent.
Les autres accusations – viols, contraintes sexuelles, séquestrations, lésions corporelles, menaces, détention d'images ultra-violentes sont révélatrices du caractère du double-national, a souligné le procureur: violent, dominateur, menteur, manipulateur. Elles sont jugées suffisamment établies par les témoignages des victimes, même si elles sont niées par l'intéressé.
Au final, avec les infractions financières commises dans le cadre de son commerce de voitures, le prévenu a été condamné à 22 reprises en Suisse, en France et en Italie. Ce sans compter la vingtaine d'infractions pour lesquelles il comparaît maintenant devant le Tribunal pénal fédéral.
Le réquisitoire du MPC a été suivi par les plaidoiries des avocates des deux femmes victimes de viols et séquestrations. L'une d'elles a raconté le désarroi de sa cliente lorsque celle-ci lui a été envoyée par le centre d'aide aux victimes d'infractions (LAVI).
Cette femme, la «silencieuse dans cette plaidoirie», était déchirée entre le désir de dire ce qu'elle a subi et la crainte de nuire à l'accusé, d'où son extrême réticence à venir témoigner devant la cour. Elle n'a jamais pu porter plainte, a rappelé sa représentante. (ag/ats)