Imaginez. Nous sommes en 2024. Au niveau communal et cantonal, des initiatives sont mises en place pour réduire la précarité menstruelle. Dans les toilettes de certaines écoles, de certains bars, on trouve désormais des protections, mises à disposition gratuitement. Et pourtant, sous la Coupole, à Berne, on peut encore entendre des hommes jouer la carte «ouin-ouin, et moi je dois me raser».
C'est ce qui s'est passé ce mercredi 25 septembre au Conseil National. La Verte Léonore Porchet (VD) y défendait un postulat qui demandait un rapport sur la précarité menstruelle. L'élue a déposé cet objet suite, justement, à des décisions internationales, ainsi que des mesures cantonales et communales.
Un objet qui semble avoir fâché son collègue UDC Paolo Pamini (TI). Le conseiller national a opposé «précarité de rasage pour les hommes à précarité menstruelle». La réponse de la Vaudoise ne s'est pas fait attendre.
L'élue a publié la séquence sur ses réseaux sociaux et comptabilise, en moins de 24 heures, plusieurs dizaines de milliers de vues.
Non Monsieur, votre rasage n'a rien à voir avec la précarité menstruelle. Que vous vous rasiez de près, que vous vous laissiez pousser une moustache à la Dali, à la Mario Bros, à la Hulk Hogan, que vous vous tailliez de belles rouflaquettes façon Elvis, que vous misiez sur le collier de barbe hommage à K-Maro ou que vous préfériez une barbe de trois jours, vraiment, ça ne changera pas la face du monde.
En revanche, si une personne qui a ses règles met du sang partout, car elle n'a pas les moyens de se payer des protections, vous allez bel et bien la regarder de travers. Et sans doute l'exclure, d'une manière ou d'une autre.
Il n'y a qu'à voir, également, les petits ricanements et autres gloussements puérils à la simple évocation des règles auprès de certains. Oui, une fois par mois en moyenne, du sang doit s'évacuer. Par «là», oui Monsieur.
Et s'il n'est pas possible pour les personnes concernées de faire le nécessaire, cela signifie qu'elles tombent dans ce que l'on appelle «précarité menstruelle». D'où le postulat de Léonore Porchet, pour faire la lumière sur ce phénomène au niveau suisse, et y remédier. Et qu'en 2024, il faille encore répéter ceci, Monsieur, et expliquer que votre rasoir n'a rien à voir avec un tampon, c'est désolant.