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Comment la Suisse a repris un rôle international de premier plan

Gabriel Lüchinger, chef de la sécurité internationale au Département fédéral des affaires étrangères, s'entretient avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky au Bürgenstock.
Gabriel Lüchinger, chef de la sécurité internationale au Département fédéral des affaires étrangères, s'entretient avec le président ukrainien Volodymyr Zelensky au Bürgenstock.Image: Keystone

Ce Suisse a manœuvré dans l'ombre pour la rencontre Kiev-Washington

Les Etats-Unis et l'Ukraine souhaitaient tous deux que les pourparlers de paix se tiennent en Suisse. Un homme de l'ombre au puissant réseau en a également été l'acteur.
24.11.2025, 11:5924.11.2025, 11:59
Othmar von Matt / ch media

Dimanche, la délégation ukrainienne a commencé par tenir une rencontre avec les délégations du Royaume-Uni, de France et d’Allemagne. Conduite par Andrij Jermak, le chef de cabinet de Volodymyr Zelensky, elle a rencontré les conseillers nationaux à la sécurité de ces pays: Jonathan Powell, Emmanuel Bonne et Günther Sauter.

Lors d’une deuxième rencontre, les Ukrainiens ont parlé avec la délégation américaine, menée par le secrétaire d’Etat Marco Rubio. Ce dernier est en même temps conseiller national à la sécurité des Etats-Unis. Marco Rubio et Andriy Yermak sont des figures centrales dans leurs pays.

Une figure de l'ombre au service de la Suisse

D’après nos recherches, c’est Gabriel Lüchinger, le chef de la sécurité internationale au Département fédéral des affaires étrangères (DFAE), qui a assuré l’accueil sur place. C’est lui qui a reçu les différentes figures chargées de la sécurité.

Le Conseil fédéral l'a nommé envoyé spécial aux Etats-Unis le 9 avril dernier, sept jours après l'inscription de la Suisse sur la liste des pays visés par les droits de douane de Donald Trump.

L’objectif du Conseil fédéral était d’utiliser ses contacts aux Etats-Unis pour le différend douanier. Ces connexions ont également été utiles pour la rencontre de Genève, car l’élément central réside justement dans le réseau international des conseillers nationaux à la sécurité. C’est dans ce cadre que Gabriel Lüchinger a accompli un travail préparatoire remarquable.

Un travail de réseautage amorcé à Davos

Ce travail avait débuté par une réunion des conseillers à la sécurité nationale à Davos en janvier 2024, la veille du Forum économique mondial. Les discussions portaient sur la formule de paix pour l’Ukraine. Les Etats-Unis et l’Ukraine étaient représentés. Jake Sullivan, de l’administration Biden, et Andriy Yermak, chef de cabinet de Zelensky.

Andriy Yermak et Jake Sullivan étaient à nouveau présents six mois plus tard, lors de la conférence du Bürgenstock des 15 et 16 juin, qui a réuni 57 chefs d’Etat et de gouvernement. Gabriel Lüchinger y a également joué un rôle important.

Le 20 janvier 2025, les Etats-Unis ont connu un tournant: Donald Trump a succédé à Joe Biden à la présidence. Jake Sullivan a alors quitté ses fonctions. Donald Trump a nommé Marco Rubio secrétaire d’Etat et conseiller à la sécurité nationale.

Gabriel Lüchinger est parvenu assez rapidement à établir un contact avec l’entourage de Marco Rubio. Le 20 mars dernier, à 10h15, il avait rendez-vous avec Louis L. Bono, devenu sous l’administration de Donald Trump le haut fonctionnaire chargé des affaires européennes et eurasiennes au sein du département d’Etat dirigé par Marco Rubio. Louis L. Bono a quitté cette fonction à la fin avril.

Près de 4 mois plus tard, le 6 août, Lüchinger faisait partie de la délégation accompagnant la présidente fédérale Karin Keller-Sutter et le ministre de l'Economie Guy Parmelin, qui a rencontré le secrétaire américain aux Affaires étrangères Marco Rubio à Washington, en raison du différend douanier.

Gabriel Lüchinger (à gauche) se rend à une réunion avec le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio en compagnie du ministre de l'Economie Guy Parmelin et de la présidente de la Confédération ...
Gabriel Lüchinger (à gauche) se rend à une réunion avec le secrétaire d'Etat américain Marco Rubio en compagnie du ministre de l'Economie Guy Parmelin et de la présidente de la Confédération Karin Keller-Sutter.Image: AP

Concernant la rencontre de Genève, il apparaît désormais clairement que les Etats-Unis la voulaient en Suisse. L’Ukraine également. C’est ce qu’a confirmé Lea Zürcher, porte-parole du DFAE:

«Les deux parties souhaitaient que la Suisse organise cette rencontre, principalement en raison du rôle joué par la Genève internationale et de la neutralité de la Suisse»

La Suisse agit comme «facilitatrice et pays hôte».

La Suisse est encore présente à l'international

Président de la commission de politique extérieure, le conseiller national Laurent Wehrli (VD/PLR) se félicite «que deux Etats cherchant une voie vers la paix viennent à Genève, centre de la diplomatie internationale». Il souligne:

«La recherche de paix et les bons offices font partie de l’ADN de la Suisse. Nous avons ce savoir-faire, nous savons comment cela fonctionne»

Et il insiste:

«Quelques heures à Genève peuvent faire la différence»

Le conseiller aux Etats Damian Müller (LU/PLR) se montre lui aussi satisfait:

«En matière de négociations fondamentales sur la paix et la haute diplomatie, Genève et la Suisse demeurent des acteurs incontournables.»

Cela démontre, selon lui que:

«La Suisse a toujours joué un rôle important en coulisses pour les Etats-Unis, non seulement sur des questions techniques ou douanières, mais aussi en matière de sécurité et de stabilité.»

Il a d’ailleurs été oublié ces derniers mois, en pleine polémique sur les droits de douane, que les Etats-Unis avaient déjà choisi la Suisse en 2025 pour des pourparlers de haut niveau: le 12 mai, une première avancée dans le différend douanier avec la Chine avait été obtenue à Genève.

Traduit de l'allemand par Joel Espi

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