Stefan Blättler a été désigné, mercredi, nouveau procureur général de la Confédération. Il reprend ainsi le poste laissé par Michael Lauber. Mais, quels sont ses caractéristiques, ses points fables et ses points forts? Décryptage.
Blättler, actuel commandant de la police cantonale bernoise, a une personnalité forte. Il n'est d'ailleurs pas du genre à dire aux gens ce qu'ils ont envie d'entendre.
Ainsi, il a précisé qu'une fois élu, il soulèvera des questions qui ne plairont pas à tout le monde. L'une d'elles sera la suivante: les politiciens sont-ils prêts à donner aux autorités les outils dont elles ont besoin pour lutter efficacement contre le crime organisé? Il s'agit de moyens tels que:
L'opinion de Blättler, comme il l'a montré lors des entretiens de sélection, est qu'on n'a rien sans rien. Mais, l'homme est respectueux des procédures, il revient aux politiciens, au final, de dire ce qui est possible de mettre en place ou non.
Le successeur de Lauber ne laissera guère les énergies se dissiper. Il se focalisera fortement sur:
Il renforcera également la coopération avec les autorités nationales et internationale. En effet, il sait que la lutte contre la criminalité sans frontières ne peut être couronnée de succès que s'il y a un effort commun.
D'ailleurs, l'un des premiers voyages à l'étranger du nouveau procureur fédéral aura lieu Rome, selon les informations recueillies à Berne. La lutte contre la mafia s'affiche comme une grande priorité pour lui.
La nomination de Blättler est une bonne nouvelle pour les chasseurs de mafia italiens comme le procureur Nicola Gratteri, qui était invité par l'Observatoire tessinois de la criminalité organisée, à Lugano, la semaine dernière. Gratteri a mené l'opération Imponimento contre le La 'Ndrangheta, une organisation mafieuse de la région de Calabre. Cette dernière s'étend en Suisse, notamment en Argovie et au Tessin.
Nicola Gratteri a déclaré que la coopération avec la Suisse s'était améliorée. Mais, malheureusement, il y a un manque d'instruments efficaces pour contrer le crime organisé. En Suisse, par exemple, la protection des données fait obstacle aux écoutes téléphoniques. Il regrette aussi que les médias, contrairement à l'Italie, ne soient pas autorisés à mentionner les noms des mafiosi présumés.
C'est exactement comme cela que le procureur fédéral désigné voit les choses. Il l'a, d'ailleurs, fait savoir à Berne ces jours-ci. Sous Lauber (son prédécesseur), la lutte contre la mafia était traitée par un et unique procureur, selon des initiés.
Interrogé, le Ministère public de la Confédération (MPC) s'est contenté de dire que les procédures pénales seraient également menées à Lugano si nécessaire. Mais il semble clair que Blättler va améliorer son combat contre la mafia. En contrepartie, il est susceptible de réduire le personnel.
Si Blättler a une faiblesse, les observateurs s'accordent à dire que c'est son manque d'expérience dans la conduite de procédures pénales. Il dépend donc de son entourage. Selon les initiés, l'un des problèmes est que la direction actuelle du MPC n'a pas beaucoup de connaissances dans ce domaine.
Certains rappellent, par exemple, que c'est Montanari, aujourd'hui procureur général adjoint de la Confédération suisse, qui a classé la première affaire de corruption informatique contre un chef de service du Secrétariat d'Etat à l'économie en 2007.
L'affaire a ensuite été rouverte et l'homme a été condamné cette semaine par le Tribunal pénal fédéral à quatre ans de prison. Cependant, le procureur qui avait réussi à ouvrir cette deuxième affaire a été renvoyé par Lauber et son équipe de direction en 2015.
Selon les observateurs, Blättler va également revoir le personnel du Ministère public. «Beaucoup de bons employés ont quitté le MPC sous Lauber». Blättler en ramènera probablement. Il est clair qu'il va restructurer la gestion de l'institution.
Adapté de l'allemand par hkr, la version originale ici.