Lukas Müller ne répond pas, mais son postulat est bien là. L’unique élu de l’Union démocratique fédérale (UDF) au Conseil de ville de Bienne, le parlement du chef-lieu seelandais, veut «autoriser explicitement les burkinis dans les piscines biennoises». Emanant du représentant d’un parti conservateur réputé anti-islam, la proposition, qui sera débattue aux alentours du 20 février, a de quoi surprendre. Peu s’expliquent sa démarche.
L’élu centriste et président du Conseil de ville Mohamed Hamdaoui ne la comprend pas très bien non plus. Mais ce défenseur de la laïcité et opposant à l’islamisme sait une chose, c’est qu’il ne faut pas approuver le postulat. Or le Conseil municipal, avec à sa tête la maire Glenda Gonzalez Bassi, reprenant l’avis exprimé par son prédécesseur Erich Fehr, propose aux conseillers de ville de l’adopter puis de le «radier» dans la seconde.
Mais pourquoi adopter un postulat si c'est pour le ranger aussitôt dans un tiroir? Les explications du secrétaire général de la municipalité seelandaise, Gérard Wettstein, joint par watson:
Vraiment? Si les personnes qui le souhaitent peuvent déjà se baigner en combinaison de bain quasi-intégrale dans les bassins gérés par la Ville de Bienne, elles ne peuvent pas revêtir un burkini stricto sensu. Le règlement des piscines municipales fait un distinguo entre la tenue «combinaison de bain + bonnet» et le burkini proprement dit, avec capuche reliée au maillot intégral. Invoquant des raisons de sécurité, le règlement des piscines n’autorise pas le burkini en tant que tel. Il faut croire que pour le Conseil municipal, la combinaison de bain associée au bonnet tient lieu de burkini. Comme si l'ambiguïté faisait loi.
Mohamed Hamdaoui recommande le rejet du postulat, qu’il juge «d’une débilité profonde», dit-il à watson.
Le président du Conseil de ville ne veut pas faire «ce cadeau aux islamistes», lui qui s’est opposé à l’événement musulman controversé qui devait se tenir le 1er février au Palais des congrès biennois et qui a été annulé pour des «raisons de sécurité», dont on ne connaît pas le détail. «Le mieux serait que l'auteur du postulat retire son texte», estime Mohamed Hamdaoui.
La présidente du groupe socialiste au Conseil de ville, Joseline Stolz, une ancienne directrice d'école, s’apprêtait à suivre la recommandation du Conseil municipal concernant le postulat en question, sachant qu’un quasi-burkini est autorisé dans les bassins municipaux. Mais elle se demande à présent aussi s’il est bien judicieux d’avaliser, par un vote, un terme ayant «une dimension religieuse».
Pascal Bord, président du groupe Parti radical romand (l’équivalent biennois du PLR), administrateur de la paroisse catholique de Bienne dans sa vie professionnelle, ne souhaite pas que «le mot burkini entre explicitement dans les textes officiels biennois».
Pascal Bord s'étonne que «ces propositions de nature religieuse, mettant à mal l'égalité entre les hommes et les femmes, trouvent généralement des défenseurs dans les partis de gauche».
De son côté, la municipalité se justifie, arguant du fait que le postulat sera sans objet à l'instant où il aura été adopté, si l’on comprend bien. Craint-elle d'avoir à s'opposer au mot «burkini» et à la chose?