Ce mois de juillet est pour l'heure le plus chaud jamais enregistré dans le monde. Les très hautes températures sont toutefois quelque peu compensées par de grosses averses, qui viennent rafraîchir (pour un temps) nos contrées, de plus en plus torrides.
Isabelle Fath est météorologue à Meteosuisse. Elle analyse avec nous les tendances liées à la chaleur de cet été — mais aussi celles dues au réchauffement climatique.
Quelle est la situation des températures cet été?
Il fait plus chaud que la moyenne, mais quelques orages permettent toutefois de rafraîchir un peu tout cela. Quand on a un épisode orageux, cela refroidit l'atmosphère et la canicule s'arrête un petit moment. Après l'orage, l'humidité s'évapore durant quelques jours et cela retire de la chaleur à l'air. C'est pourquoi on n'a pas vu de grosses périodes de canicule cet été.
Quelles sont les zones de Suisse romande où il va faire le plus chaud?
La région genevoise et le Valais, en particulier autour de Sion. Cette semaine et jusqu'à jeudi, il devrait faire à Genève, de 33 à 37 degrés. Vers Sion, environ 34 degrés. Les autres régions romandes sont un peu moins concernées.
Comment expliquer cette situation à Genève?
Il souffle un vent très chaud qui remonte du sud-ouest, depuis la vallée du Rhône. Il va déferler sur le canton, on appelle cela un coup de chalumeau. En raison de la réverbération du bâti, la température peut dépasser de 2 à 3 degrés celle de la campagne. On parle d'îlot de chaleur urbaine. Nos mesures sont prises près de l'aéroport, un endroit qui est bien ventilé, bien qu'à proximité du tarmac.
Et quel est l'état de ces températures par rapport à la moyenne?
Elles se situent quelque part entre le deuxième et le troisième été le plus chaud jamais mesurés, dans l'ensemble de la Suisse. Il s'agit des températures enregistrées depuis le début de l'été météorologique, au 1er juin. Prenez la moyenne en Suisse en cette mi-juillet: 16.2 degrés (moyenne des températures journalières et nocturnes), alors que la moyenne à long terme est à 13.9 degrés.
La «moyenne» est en augmentation depuis des années. Ne faudrait-il pas s'adapter à cette nouvelle norme?
C'est déjà le cas! La norme est adaptée tous les dix ans et on retient les 30 dernières années pour la calculer. C'est sûr que les températures d'il y a 150 ans n'avaient rien à voir. Mais nous sommes tout de même au-dessus de la moyenne de ces trois dernières décennies. C'est bien simple: dans un contexte de réchauffement, on s'attend chaque année à ce que les températures soient plus chaudes que celles de l'an précédent. Cela n'empêche pas de remarquer des fluctuations annuelles. L'été 2021, par exemple, était plutôt frais et il y a eu pas mal de pluie.
Quels autres défis peuvent survenir avec l'augmentation des températures?
En été, la conséquence principale est surtout l'augmentation de l'intensité des orages et des précipitations. Il n'y en a pas forcément plus souvent, mais ils sont destinés à devenir plus brutaux et violents, car plus l'air est chaud, plus il contient d'énergie. En hiver, cela concerne plutôt la limite des chutes de neige, qui a tendance à monter, car il pleut plus en altitude.
Quels autres facteurs jouent un rôle face à la chaleur, l'été?
L'humidité. Plus l'air est humide, plus la chaleur sera pénible. La raison est bien simple: l'air étant déjà chargé en eau, la transpiration ne peut s'évacuer facilement et s'accumule sur la peau. On transpire beaucoup plus. L’humidité de l’air varie beaucoup en Suisse. L’air est plus humide plutôt en été au Tessin, situé au sud des Alpes, sous l’influence de la Méditerranée.
Et quelles sont les régions de Suisse les plus sensibles à l'augmentation des températures en été?
Les régions de haute montagne. Avec la fonte des neiges et des glaces, elles perdent un bouclier protecteur naturel qui réfléchissait les rayons solaires en été et permettait aux cimes de rester fraîches. C'est un cercle vicieux: plus il fait chaud, moins il y a de surface blanche au sommet et plus la montagne chauffe en été.