Cela nous ravit normalement en avril et en mai, mais c'est tout de même très inhabituel pour la mi-automne: début octobre, les pommiers sont en fleurs. La météo en fait des siennes. En ce début de semaine, il fera 25°C à Genève et Sion. Il fera même 27°C à Moutier. Les piscines et autres bains publics pourraient rouvrir leurs portes, car la température de l'eau des lacs est encore élevée.
Si beaucoup peuvent trouver cela agréable, les météorologues et climatologues du monde entier tirent la sonnette d'alarme. En effet, le mois de septembre a été le plus chaud jamais observé. Il a dépassé le record précédent et pourrait faire de 2023 l'année la plus chaude de toutes celles qui ont été mesurées jusqu'à présent.
Le Copernicus Climate Change Service de l'UE a annoncé que la température moyenne mondiale de l'air était de 16,4 degrés le mois dernier. C'est un demi-degré de plus que le précédent record pour septembre. Le climatologue Zeke Hausfather de la Berkeley Earth Research Organisation en Californie qualifie cette anomalie de «complètement folle» dans la revue spécialisée New Scientist.
2023 a été jusqu'à présent 1,4 degré plus chaude que les années de l'ère préindustrielle avant 1900. Cela vaut également pour la Suisse. Elle a connu de loin le mois de septembre le plus chaud depuis le début des mesures en 1864. La moyenne nationale du mois a atteint 14,3 degrés, soit 3,8 degrés de plus que la normale depuis 1991.
«Des périodes prolongées de chaleur et de sécheresse se produisent toujours en automne. Toutefois, on observe un niveau de température très élevé», explique le météorologue. Jusqu'à présent, l'automne 2006 est considéré comme l'automne le plus chaud depuis le début des relevés systématiques, lorsqu'il a fait 29 degrés dans la vallée du Rhin.
La raison de cette douceur automnale? L'air chaud du sud et du sud-ouest est resté bloqué dans nos régions. Mais les valeurs élevées de septembre ont entraîné des situations météorologiques extrêmes dans le monde entier. Au Royaume-Uni, aux États-Unis et en Europe, les vagues de chaleur ont atteint des records.
Jeudi, il a fait 37 degrés à Badajoz, dans l'ouest de l'Espagne, et même 38 degrés samedi dernier.
L'eau exceptionnellement chaude de la Méditerranée a également attisé le cyclone Daniel, qui a tué des milliers de personnes en Libye. Et en Australie, la saison des feux de forêt a démarré très tôt.
Cette année, il a fait chaud et sec en Suisse, mais il y a tout de même eu quelques épisodes de fortes précipitations. L'année hydrologique s'avère donc plus humide que la précédente. Les différences régionales sont toutefois importantes. L'ouest et le nord-ouest sont restés au sec, alors qu'il a presque trop plu dans l'est et le sud.
D'une manière générale, il faut souligner que le temps ne devient pas plus sec, précise le spécialiste. Les précipitations augmentent même légèrement. Malgré tout, la sécheresse peut devenir un problème.
Si de fortes précipitations s'ensuivent, l'eau ne peut souvent plus pénétrer dans le sol. Elle s'écoule directement dans les ruisseaux, les rivières et les lacs, et crée des inondations. Le sol devient également de plus en plus imperméable en raison de l'augmentation des constructions et de l'utilisation de machineries lourdes dans l'agriculture.
Ce temps illustre-t-il un changement climatique à l'œuvre?
Avec le réchauffement global actuel, la planète se rapproche un peu plus du seuil de 1,5°C à long terme, au-delà duquel le Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat, le Giec, prévoit de graves répercussions.
«Il est maintenant difficile d'imaginer que les températures mondiales ne battront pas de record cette année, et probablement pas que de quelques dixièmes», affirme Jennifer Francis du Woodwell Climate Centre dans le New Scientist. 2023 a également connu les mois de juillet et d'août les plus chauds depuis le début des relevés.
En juillet, c'était le réveil d'El Niño. Le phénomène se produit tous les deux à huit ans. En raison de son activité actuelle, les climatologues s'attendent à ce que cette chaleur inhabituelle se poursuive. Et avec un océan plus chaud que la normale, les effets d'El Niño devraient se renforcer d'autant. Selon Samantha Burgess de Copernicus, cela pourrait conduire à une année 2024 encore plus chaude.
Traduit de l'allemand par Valentine Zenker