Parfois, on discute de choses tout à fait quotidiennes, voire banales au Palais fédéral. Par exemple, des concombres invendus emballés dans un film plastique. Si le détaillant ne peut pas en faire don à des organisations, la marchandise ratatinée finit souvent dans un compost industriel. Ce film plastique n'a rien à faire dans le compost, raison pour laquelle la politique s'en mêle.
Dans le cadre d'un projet sur l'économie circulaire, le Parlement discute d'une «obligation de déballer»: le Conseil fédéral doit pouvoir imposer aux détaillants et aux grossistes de déballer les produits biogènes invendus avant de les envoyer dans une installation de compostage ou de biogaz. Une exception serait faite pour les emballages compostables.
Des entreprises comme Coop ou Migros devraient donc retirer les films plastiques des concombres emballés – un travail supplémentaire. La Communauté d'intérêt (CI) du commerce de détail, composée de Migros, Coop et Denner, s'oppose à cette obligation, tout comme l'association Swiss Retail Federation.
De l'autre côté, on trouve notamment l'association Biomasse Suisse, qui représente les installations de biogaz et de compostage. Elle milite pour ce projet. Filtrer le plastique est «un très grand défi», souligne Simon Gisler, co-directeur de l'association. Il plaide pour que les pollueurs – les détaillants entre autres – enlèvent eux-mêmes les emballages ou paient si les installations de compostage doivent le faire.
«Il serait important que le principe du pollueur-payeur s'applique ici aussi», déclare Simon Gisler.
La CI du commerce de détail estime, en revanche, que l'obligation de déballer est impraticable et inutile. La directrice Maja Freiermuth souligne qu'avec les technologies les plus récentes, il est possible de trier mécaniquement les matières étrangères, de sorte que les valeurs limites légales applicables aux installations de biogaz et de méthanisation soient respectées. Et les installations doivent de toute façon le faire, car les déchets ne proviennent pas uniquement du commerce de détail.
En d'autres termes, le déballage n'est pas nécessaire. Si le commerce de détail devait s'en charger, cela entraînerait des dépenses très élevées – sans avantage notable pour l'environnement. D'ailleurs, les magasins affirment faire déjà beaucoup pour éviter les emballages alimentaires et prévenir le gaspillage.
Et les détaillants ont le Conseil fédéral de leur côté. Selon un rapport rédigé à la demande de la Confédération, les coûts pour les entreprises dépassent les avantages environnementaux. Les opposants craignent aussi que les détaillants n'envoient la marchandise dans des usines d'incinération des ordures ménagères afin de contourner l'obligation de déballer.
Sous la Coupole à Berne, la question donne lieu à des décisions extrêmement serrées. Le Conseil national a dit oui en mai par 97 voix contre 96, le Conseil des Etats a dit non jeudi par 21 voix contre 20. C'est le groupe parlementaire du Centre – jusqu'à présent divisé – qui devrait trancher. Le parti a voté contre au Conseil national et majoritairement pour aux Etats.
Le sénateur centriste Daniel Fässler défend le projet.
Il est intéressant de noter que l'Union des paysans (USP) y est également favorable. Dans sa prise de position sur la consultation, elle a exprimé son soutien «car, en raison de la pratique actuelle, de grandes quantités de matières étrangères dont des plastiques sont introduites dans les sols agricoles». Malgré cela, les bourgeois du Conseil national ont majoritairement voté contre – y compris le président de l'USP, le Saint-Gallois du Centre, Markus Ritter.
L'organisation a-t-elle fait volte-face? Non, affirme sa porte-parole Sandra Helfenstein:
La balle est maintenant à nouveau dans le camp du Conseil national. Le débat promet d'être passionnant.
Traduit et adapté par Valentine Zenker