Il y a eu assez de temps pour beaucoup de choses lors de la dernière séance, mais un sujet est resté à l'ordre du jour du Conseil fédéral avant les vacances d'été: le débat sur le nucléaire. Concrètement, il s'agit de l'initiative «Stop au black-out». Celle-ci, également appelée initiative nucléaire, exige au niveau constitutionnel que la Confédération garantisse à tout moment l'approvisionnement en électricité de la Suisse «dans le respect de l'environnement et du climat». Pour cela, «tous les modes de production d'électricité ménageant le climat» sont autorisés.
Même si l'énergie nucléaire n'est pas mentionnée, le texte de l'initiative est en contradiction avec l'abandon progressif de l'énergie nucléaire décidé par le peuple en 2017.
Ce n'est pas pour cette raison que l'initiative est une épine dans le pied du Conseil fédéral: elle interdit surtout les centrales de réserve fonctionnant au gaz ou au pétrole, qui doivent pallier à court ou moyen terme à une pénurie d'électricité en Suisse. Il est donc clair depuis des mois que le ministre de l'Energie Albert Rösti veut contrer l'initiative avec un contre-projet. Le plan de retour du nucléaire commence à se dessiner.
Le contre-projet sera probablement mis sur le tapis mercredi, lors de la première séance du Conseil fédéral après les vacances. Il est très improbable que celui-ci pose de nouveaux jalons pour l'approvisionnement énergétique de la Suisse: le Conseil fédéral commencera simplement par expliquer pourquoi il estime qu'un contre-projet est nécessaire. Les recherches du groupe CH-Media (à qui appartient watson) indiquent que c'est surtout la loi sur l'énergie qui doit être modifiée de manière à ce qu'elle contienne une ouverture technologique fondamentale.
D'une part, cela couperait un peu l'herbe sous le pied des partisans du nucléaire, sans pour autant rendre impossible la construction de centrales d'urgence comme celle de Birr. Mais surtout, Rösti s'achète ainsi du temps. Son département peut chercher tranquillement des possibilités de faire en sorte qu'un retour du nucléaire soit susceptible de réunir une majorité.
Un plan fait toutefois déjà le tour du département de Rösti. Actuellement, il n'est pas seulement interdit de construire de nouvelles centrales nucléaires, mais aussi d'apporter des modifications fondamentales aux cuves de réacteur existantes. En effet, elles prolongeraient considérablement la durée d'exploitation d'une centrale nucléaire, ce qui va à l'encontre de la décision de sortir du nucléaire.
C'est précisément là que Rösti pourrait intervenir. Si les centrales nucléaires existantes n'étaient pas seulement rénovées extérieurement, mais aussi en profondeur, peu de choses s'opposeraient à la poursuite de leur exploitation au cours des prochaines décennies – sans que la Suisse ne doive se creuser la tête pour trouver de nouveaux sites de centrales nucléaires. Une sortie effective de l'énergie nucléaire s'éloignerait toutefois.
Au Conseil fédéral, une telle proposition avec deux représentants du PLR et de l'UDC a toutes les chances d'aboutir. Des membres du gouvernement national auraient déjà tendu l'oreille pour savoir quels partis pourraient donner leur accord à une telle idée.
Une chose est sûre: pour les Verts, cela équivaudrait à un scénario d'horreur. «Il n'y a aucune raison de reparler du nucléaire maintenant», lance la présidente Lisa Mazzone.
En 2016, Greenpeace, l'ATE et la Fondation suisse de l'énergie ont lutté aux côtés des Verts pour leur initiative «Sortir du nucléaire». Aujourd'hui, elles se préparent avec le parti à une nouvelle votation populaire: «Nous voulons dans tous les cas être prêts pour un référendum», dit Lisa Mazzone.
La position du Centre sera déterminante dans cette affaire. Priska Wismer-Felder est l'une des principales responsables de la politique énergétique de ce parti. Elle confirme qu'un contre-projet à l'initiative nucléaire a déjà été évoqué lors des échanges avec le Conseil fédéral – même s'il a été esquissé de manière très générale.
Mais si cela devait finalement aboutir à la proposition décrite, le gouvernement franchirait une ligne rouge, estime Priska Wismer-Felder:
Selon lui, ce n'est pas maintenant, après l'adoption de la loi sur l'électricité, qu'il faut miser sur les centrales nucléaires.
Priska Wismer-Felder est convaincue que cela correspond également à l'opinion de la majorité du groupe. Et ce, bien que l'initiative nucléaire compte un conseiller aux Etats du Centre, Peter Hegglin, dans son comité d'initiative. Il y aura bientôt matière à débattre. A la fin du mois, le groupe parlementaire du centre se réunira pour une retraite de deux jours. «L'énergie nucléaire sera alors l'un des thèmes de discussion», déclare Wismer-Felder.
(Traduit et adapté par Chiara Lecca)