Le débat sur la SSR se crispe après un don de 400 000 francs
La campagne contre l’initiative «200 francs, ça suffit» vient de recevoir un sérieux coup d’accélérateur – et de déclencher une petite polémique. Comme le révèle le Tages-Anzeiger. Le quotidien alémanique a découvert que la SSR-Trägerschaft ou en français l'association SRG SSR, soit la base associative de la SSR, a versé 400 000 francs au camp du non. Une somme élevée, dans une campagne déjà tendue autour du futur financement du service public.
L’initiative, soutenue par l'UDC, vise à réduire de 335 à 200 francs la redevance que les ménages suisses paient à Serafe tous les ans. Pour la SSR, qui tire l’essentiel de son budget de cette contribution, l’enjeu est existentiel: une baisse de près de moitié obligerait à couper dans l’offre, notamment dans les rédactions, les productions culturelles ou le sport. Les opposants au texte martèlent qu’un tel affaiblissement menacerait la cohésion nationale et la qualité de l’information.
Deux entités bien distinctes
C’est dans ce contexte que Cécile Bachmann, membre du comité directeur de la SSR-Trägerschaft (ou association SRG-SSR), justifie dans les titres alémaniques de Tamedia le versement en question:
Ces fonds proviennent de cotisations accumulées ou de revenus immobiliers, insiste-t-elle.
Il s'agit ici de bien comprendre qu'il y a deux structures distinctes:
- La Trägerschaft ou l'association SRG SSR, une association de 24 000 membres répartis dans plusieurs sociétés régionales. Son rôle est de faire remonter les préoccupations du public vers l’entreprise SSR.
- L’entreprise SSR, financée par la redevance, la publicité et le sponsoring. Et la loi est formelle: les fonds de la redevance ne peuvent servir qu’à produire des programmes. Participer à une campagne politique leur est interdit.
L'UDC pointe un problème
Officiellement, la frontière est donc nette: ce n’est pas l’entreprise SSR qui a payé, mais son socle associatif. Pourtant, pour les initiants qui veulent baisser la redevence à 200 francs par ans, la ligne reste floue.
Le conseiller national UDC, Thomas Matter, dénonce une «ingérence inacceptable», estimant que distinguer les deux entités relève d’un «exercice académique» tant leurs liens sont étroits. Selon lui, le public pourrait difficilement percevoir la nuance entre «SSR» et «SSR-Trägerschaft» (en français SSR ou association SSR) au moment où l’entreprise dépend directement du résultat de la votation.
L'association estime être dans les clous
Pour ses responsables, l'association pointée du doigt n’a fait qu’assumer sa mission. Ses statuts l’obligent à intervenir dans les débats médiatiques pour défendre le service public. Le don serait ainsi un acte militant, mais légitime.
Reste que cette intervention financière tombe à un moment délicat. Les premiers sondages montrent un soutien important à l’initiative, et la campagne s’annonce serrée. En injectant 400 000 francs dans le débat, la base associative de la SSR expose l’institution à une critique récurrente: celle d’un acteur trop proche du pouvoir et trop engagé dans les batailles politiques qui la concernent directement.
A trois mois de la votation du 8 mars, cette polémique ajoute une couche supplémentaire à un dossier déjà explosif: celui du futur visage de l’audiovisuel public suisse. (jah)
