Swiss pourrait mettre fin à une règle pénalisant les Romands
Swiss demeure la compagnie aérienne la plus rentable du groupe Lufthansa. Cependant, elle s'apprête à connaître une fin d'année moins favorable que lors des exercices précédents, qui étaient marqués par des résultats records.
Jens Fehlinger, le CEO de la compagnie aérienne, a expliqué dans un entretien accordé récemment à CH Media (éditeur de watson):
Une difficulté de taille pour les Romands
L'une des raisons pour lesquelles il n'y aura ni chiffre d'affaires record ni bénéfices exceptionnels tient à la situation dans les cockpits. La filiale de Lufthansa souffre en effet d'une pénurie de pilotes, à tel point qu'au printemps dernier, elle a été contrainte d'annuler 1400 vols pour l'été.
En mars dernier, un lanceur d’alerte avait attiré l’attention sur l’inégalité de traitement entre Romands et Alémaniques chez Swiss. Comme il l’expliquait, quiconque souhaitait postuler auprès de Swiss et de sa compagnie sœur Edelweiss devait pouvoir parler allemand.
Dans un pays plurilingue, une grande partie des Suisses se trouve ainsi désavantagée pour poser sa candidature auprès des deux principales compagnies aériennes nationales. Un Alémanique ou un Allemand n’a en effet que l'anglais à apprendre. Il expliquait:
Une façon de trouver plus de candidats
A propos d’un possible assouplissement, une porte-parole de Swiss expliquait alors que l’obligation de parler allemand était considérée comme indispensable. Avec cette exigence, précisait-elle, la compagnie veut éviter tout malentendu ou toute ambiguïté dans la communication au sein du cockpit.
Cette règle, ajoutait-elle, fait l’objet d’un examen périodique «avec des intervalles plus espacés».
Le fait est que si cette règle était assouplie, le cercle des pilotes candidats pourrait s’élargir. Comme le montrent désormais ses déclarations, Markus Fehlinger se dit aujourd’hui plus ouvert concernant ce point. Il a déclaré:
Il existe déjà des compagnies européennes qui montrent la voie et exigent uniquement l’anglais pour leurs pilotes, reconnu comme la langue de l’aviation à l’échelle mondiale. En même temps, Markus Fehlinger sait qu’il avance sur un terrain glissant. Le patron de Swiss souligne:
Le personnel du cockpit n'est pas emballé
Le syndicat de pilotes Aeropers a récemment fait valoir une position plutôt réservée. Comme l’expliquait son porte-parole, Thomas Steffen:
Concernant le recrutement, Aeropers ne considère pas la règle linguistique comme un problème essentiel. Les conditions de travail sont plus importantes, et celles-ci sont forcément plus difficiles à négocier avec un cercle de candidats plus large.
Aujourd’hui, environ deux tiers des pilotes de Swiss possèdent le passeport suisse, et près de 30% viennent d’Allemagne. Au cours des douze dernières années, la part des pilotes allemands a fortement augmenté. En 2013, elle atteignait déjà les 11%, alors qu'en 2007, elle ne s’élevait qu’à 1%.
Des assouplissements pour le personnel de cabine
Fin octobre, Luxair avait suscité l’émoi sur son marché domestique. Comme l’avait rapporté le Aerotelegraph, la compagnie nationale du Luxembourg n’exige désormais plus que son personnel de cabine ait des connaissances de base en luxembourgeois.
Pour justifier cette mesure, Luxair invoquait sa clientèle internationale et la pénurie de personnel. Au printemps dernier, Peter Albers, le directeur de Lufthansa City Airlines, avait lui aussi fait sensation. Il expliquait alors qu’il n’excluait pas à l’avenir d’engager également du personnel de cabine ne parlant pas allemand.
Avant qu’une éventuelle modification de la règle sur les langues ne devienne réalité chez Swiss, Markus Fehlinger peut, quoi qu'il arrive, compter sur lui-même. Le directeur de la compagnie est en effet pilote, et lorsqu’il a pris ses fonctions au début de l’année, il n'a fait aucun mystère de sa volonté de s’asseoir lui-même aux commandes pour Swiss. Il devra toutefois patienter encore. Il précise:
Reste seulement à savoir si, conformément à la règle interne de séniorité, le directeur général prendrait place comme copilote ou comme commandant.
Traduit de l'allemand par Joel Espi
