Malgré 40 ans de loyauté, Roland Favre* a été subitement licencié. Il avait passé presque toute sa vie professionnelle dans la même entreprise, de vendeur téléphonique jusqu’à responsable logistique. Mais ça ne l'a pas empêché de se faire licencier peu avant sa retraite.
S’en sont suivis consultations juridiques, indemnités journalières, plus de 150 postulations et quasiment autant de refus. Roland Favre confiait avoir été «viré comme un malpropre» dans son interview à watson début juillet:
A 63 ans, il se retrouvait au chômage avec des chances infimes de retrouver un poste.
Finalement, son parcours professionnel a connu un «miracle». Roland Favre a retrouvé un emploi fixe comme transporteur de marchandises à l’aéroport de Zurich. C’est physiquement exigeant, mais il a un salaire fixe. Il se réjouit:
Mais le retour à l’emploi de Roland Favre, un an et demi avant sa retraite, reste malheureusement une exception en Suisse.
Après 55 ans, il est très difficile de retrouver un emploi. Les raisons sont multiples, comme l’ont montré de nombreux témoignages. Dès 55 ans, les cotisations de prévoyance professionnelle (LPP) passent à 18%, ce qui rend les travailleurs plus coûteux pour les entreprises. A cela s’ajoutent la peur d'une éventuelle maladie, le stéréotype du retard numérique et même des directives internes interdisant d’embaucher au-delà de 55 ans.
Même le Secrétariat d’Etat à l’économie (Seco) le confirme: plus on vieillit, plus la recherche d’emploi est longue et difficile. Ceux qui perdent leur poste restent souvent sur la touche, même s'ils veulent continuer à travailler.
Un marché spécifique est né pour remédier à ce problème. Différentes plateformes aident les personnes âgées de plus de 50 ans au chômage à se réinsérer. Par exemple, le site d’offres d’emploi «50plus-jobs.ch».
Pour les employeurs, il existe aussi «Focus50plus», une initiative de l’Union patronale suisse et de l’Union suisse des arts et métiers. Elle aide les entreprises à mieux intégrer les employés plus âgés par des études, des ateliers et des réseaux politiques.
De son côté, la plateforme «SeniorsAtWork» demande une cotisation annuelle aux chercheurs d’emploi qui se situe entre 89 et 225 francs. En échange, les personnes âgées de plus de 50 ans peuvent y créer un profil et espérer être contactées par des entreprises. L’idée: une mise en contact via un système de match par intelligence artificielle.
Selon les chiffres de la plateforme, plus de 85 000 personnes y sont inscrites, et les profils sont très variés: anciens cadres, artisans, professionnels de la santé, etc. Chaque mois, environ 350 à 400 offres y sont publiées, majoritairement des emplois à temps partiel ou des missions.
Seul 25% des annonces sont des postes à plein temps. Alexis Weil, fondateur de la plateforme, explique à watson:
Les responsables de la plateforme se considèrent non pas comme des recruteurs, mais comme des créateurs de liens. Ils ne savent pas quand une embauche a réellement lieu. Aucun chiffre sur le taux de placement n’est disponible. L’efficacité réelle de la plateforme pour la réinsertion reste donc floue.
Roland Favre, lui aussi, avait payé un profil sur «SeniorsAtWork». Mais cela ne lui a rien apporté. Il affirme:
Son nouveau poste à l’aéroport, il l’a décroché par une candidature personnelle.
*prénom d'emprunt
Traduit de l'allemand par Anne Castella