Red Bull dans le collimateur d’une loi anti-sucre en Suisse
Une bouteille d’un demi-litre de Coca-Cola ou deux canettes de Red Bull: et l’on a déjà atteint la dose maximale de sucre recommandée. L’Organisation mondiale de la santé conseille de ne pas dépasser 50 grammes par jour. Or, Monsieur et Madame Tout-le-Monde en consomment en moyenne deux fois plus en Suisse.
Jusqu’ici, la Confédération misait sur la responsabilité individuelle et sur l’autorégulation volontaire de l’industrie alimentaire afin de réduire la consommation de sucre. Car ses conséquences, surpoids, diabète ou maladies cardiovasculaires, sont graves et coûtent chaque année des milliards au système de santé.
Mais un changement de cap se profile peut-être. Le Conseil fédéral veut examiner l’introduction d’une limite maximale de sucre pour les boissons sucrées.
Une limite de 5 grammes de sucre par décilitre
Le gouvernement recommande au Parlement d’accepter une intervention de la conseillère nationale verte Manuela Weichelt. L’élue zougoise exige que la Confédération fixe une teneur maximale de cinq grammes de sucre par décilitre pour les sodas et boissons énergétiques. C’est moins de la moitié du taux actuel contenu dans le Coca-Cola ou le Red Bull. La proposition de Manuela Weichelt prévoit une réduction progressive sur cinq ans pour atteindre cette valeur.
Le Conseil national doit désormais se prononcer sur cette initiative. S’il l’accepte, le Département fédéral de l’intérieur dirigé par la conseillère fédérale socialiste Elisabeth Baume-Schneider étudiera «si et comment cette demande» pourrait être mise en œuvre. «Je suis ravie et soulagée», souffle la politicienne zougoise. Car elle ne comprend pas pourquoi la caféine est aujourd’hui réglementée, mais pas le sucre, pourtant nuisible à la santé.
Les fabricants se défendent
Dès le lendemain de la décision du Conseil fédéral, Elizabeth Baume-Schneider s’est entendue avec l’industrie sur de nouveaux objectifs de réduction du sucre. Depuis 2015, l’«Appel de Milan» existe, par lequel une majorité de la branche s’est engagée volontairement à réduire la teneur en sucre des boissons et autres denrées alimentaires.
Mais cette déclaration est contestée. Les chiffres indiquant de combien le taux de sucre aurait baissé ces dernières années sont «totalement dépourvus de valeur», critique Manuela Weichelt. Car le calcul ne prend en compte que certaines catégories de produits issus des fabricants signataires, sans considération pour les volumes réellement vendus. Et pour cause: les fabricants ne publient pas leurs chiffres de ventes.
Les producteurs de boissons refusent toute obligation imposée par l’Etat. En moyenne, moins de deux décilitres de sodas seraient consommés par habitant et par jour en Suisse. Et avec ce volume, «de telles quantités peuvent être savourées sans souci», affirme Daniel Arnold de l’Association suisse des sources d’eaux minérales et des producteurs de soft drinks.
Selon lui, les fabricants doivent proposer des produits qui trouvent leur place sur le marché et sont acceptés par les consommateurs, or, cette acceptation dépend largement du goût. La réduction du sucre devrait donc se faire lentement et par étapes. L’«Appel de Milan» en tient compte. Arnold souligne en outre que, dans le dernier accord conclu entre la Confédération et l’industrie, un objectif spécifique de réduction a été prévu pour les produits particulièrement riches en sucre.
Red Bull est le grand absent
Une des raisons pour lesquelles la Confédération est soudainement prête à envisager une limite maximale de sucre dans les boissons pourrait bien être Red Bull. Le géant des boissons énergétiques refuse depuis le début de signer l’accord de branche. Et risque ainsi d’entraîner des conséquences pour l’ensemble du secteur.
Red Bull Suisse élude la question de savoir pourquoi il ne s’engage pas à réduire le sucre. Selon l’entreprise, des «mesures appropriées sont prises pour réduire la consommation de sucre de la population suisse». Cela inclut par exemple la mise à disposition de petites portions de 250 ml.
Traduit de l'allemand
