5 idées reçues sur l'éventuel départ d'UBS de la Suisse
La semaine dernière, la rumeur d'un transfert d'UBS aux Etats-Unis a refait surface. Des discussions seraient même en cours entre les patrons du groupe bancaire et l'administration américaine. En cause, un tour de vis envisagé par le Conseil fédéral.
Le Gouvernement veut notamment augmenter les fonds propres d'UBS à 24 milliards de francs, et entend ainsi éviter une nouvelle débâcle à la Credit Suisse, pour ce groupe too big to fail - trop gros pour faire faillite.
Si UBS n'a pas commenté cette rencontre et ces rumeurs, les spéculations vont bon train. Certains encouragent la délocalisation, tandis que d'autres la craignent. Pour se faire sa propre idée, on va départir le vrai du faux.
Un transfert d'UBS est inenvisageable
C’est ce qu’on pouvait lire dimanche encore dans la NZZ am Sonntag. Le journal reprenait l’argument du Département fédéral des finances de Karin Keller-Sutter, qui disait que la menace de quitter la Suisse n’était qu’un coup de bluff. UBS finirait par accepter les nouvelles règles, en particulier 24 milliards de fonds propres exigés pour ses filiales à l’étranger.
Mais au sein de la banque, la situation a évolué. Le hedge fund suédois Cevian ainsi que plusieurs actionnaires américains, qui forment le groupe le plus important de propriétaires d'UBS, ont fini par perdre patience, comme l'ont rapporté la Schweiz am Wochenende et la SonntagsZeitung. Le rédacteur en chef du journal dominical, un spécialiste des banques et l'auteur d’un film sur la chute de Credit Suisse, a écrit que «la menace d'un départ est plus réaliste qu’on ne le pensait».
Le SonntagsBlick a, de son côté, cité l’analyste Stefan Stalmann, qui avait dénoncé très tôt le manque de fonds propres de Credit Suisse. Pour lui, un départ pourrait représenter «un plan B ou C face aux nouvelles exigences suisses en capital». Le plan A reste qu’UBS demeure en Suisse et tente d’alléger la régulation.
Un transfert serait trop cher et trop compliqué
Jusqu’ici, cet argument semblait garantir le maintien du siège à Zurich. Mais des médias américains ont esquissé une autre possibilité. UBS pourrait racheter une banque américaine de taille moyenne sous la forme d’un reverse takeover, soit par le biais d'un échange d’actions.
Officiellement, la grande UBS fusionnerait avec la petite banque. Les actionnaires recevraient de nouveaux titres et le siège passerait rapidement aux Etats-Unis.
UBS devrait changer de nom
Certains pensent qu’un transfert à New York obligerait la banque à se rebaptiser. C’est faux, car le «S» d’UBS ne signifie plus «Suisse». Avant la fusion avec la Société de banque suisse en 1997, c’était encore le cas dans la version française.
La banque fusionnée s’est brièvement appelée United Bank of Switzerland, un nom qui n’a jamais été officiel. Aujourd’hui, UBS ne signifie rien de plus que UBS. Même avec un siège à New York, la marque resterait la même sans souci.
Les Suisses se moquent du départ d'UBS
A la tête de la banque, certains pensent que «le peuple» déteste UBS, et qu’un déménagement aux Etats-Unis laisserait tout le monde indifférent. «Ils n'ont qu'à partir!», diraient les Suisses.
C'est bien ce ton qui domine sur les réseaux sociaux, et UBS reçoit aussi beaucoup de messages hostiles. Mais une enquête de la Schweiz am Wochenende auprès de 1100 abonnés dresse un tableau différent. 59% regretteraient un départ de la banque, 32% ne le regretteraient pas, et 9% sont indécis. Si le sondage n’est pas représentatif, il reflète sans doute mieux l’opinion de la population que des messages sur Facebook ou X.
Le Parlement acceptera forcément les nouvelles règles
Après des mois de lobbying raté, c’est ce que pense le département des affaires publiques d’UBS. Mais rien n’est acquis. Le PLR est divisé et pourrait encore basculer du côté de la banque.
La SonntagsZeitung a esquissé un compromis. UBS pourrait organiser ses activités de façon à n’avoir besoin que de 10 à 15 milliards de fonds propres supplémentaires, au lieu des 24 exigés.
En échange, une règle interdirait le rachat de grandes banques d’investissement. Des élus du camp bourgeois travaillent déjà dans ce sens. A Zurich, des figures importantes comme Daniel Jositsch (PS) et Tiana Angelina Moser (PVL), tous deux au Conseil des États, participent aussi aux discussions.
Traduit de l'allemand et adapté par Joel Espi
