Nous vivons dans une époque très compliquée pour les démocraties et le respect du droit. Plusieurs grandes puissances estiment désormais qu'elles peuvent imposer leur volonté par la force, y compris en modifiant militairement les frontières. La révolution numérique permet à quelques géants de la tech de concentrer un pouvoir économique absolument phénoménal.
Enfin, l'épuisement des ressources naturelles, la dégradation de l'environnement et le réchauffement climatique mettent une pression accrue sur les populations et compromettent la qualité de vie.
Dans ce contexte inquiétant, comme citoyenne ou citoyen suisse, vous vous êtes sûrement demandé comment réagir face aux problèmes actuels.
Ainsi, vous vous êtes peut-être interrogé sur le meilleur moyen de stopper l’armée russe. Et vous êtes probablement arrivé à la conclusion que l'engagement de l'Union européenne est vital non seulement pour l’Ukraine, mais aussi pour nous. Si le soutien militaire de l’Union disparaissait, la politique d'agression de Poutine serait récompensée. Ce qui constituerait un dangereux précédent, menaçant la sécurité des pays européens, Suisse comprise.
Enfin, vu la montée en puissance des régimes autoritaires et des oligarques de la tech, le démocrate que vous êtes a sans doute cherché la réponse la plus adéquate. A nouveau, il est probable que le renforcement de l’Europe soit votre conclusion. C’est en effet dans cette région du monde que la paix, la liberté, la démocratie et la dignité humaine sont les mieux défendues.
On pourrait multiplier les exemples en examinant la politique climatique, la protection sociale ou le respect des minorités. Dans la plupart de ces problématiques, l’action au niveau national s’avère limitée. Et seules des coopérations à l’échelle du continent portent leurs fruits.
Or, même si elle ne répond pas à toutes les attentes, l'Union européenne est une construction qui permet d’agir de manière vaste et coordonnée. Certes, elle est en permanence confrontée à des crises comme celle de la dette en 2008, du Covid ou encore de la guerre en Ukraine. Mais chacune de ces épreuves lui a permis de progresser et de se renforcer.
Ce qui n’est pas étonnant, car il n’existe pas d’alternative. Le retour à des Etats-nations isolés affaiblirait les réponses aux problèmes et finirait par les aggraver. Autrement dit, les solutions aux défis de notre temps n’exigent pas moins, mais plus d'Europe.
En Suisse, nous avons souvent une attitude paradoxale face à l'Union européenne. Nous sommes fiers de ne pas en faire partie, mais nous avons à son égard des attentes très élevées. Nous estimons qu'elle devrait être bien meilleure, mais nous ne contribuons pas à son développement. Nous lui reprochons son indécision et sa faiblesse au niveau international, mais c'est le même reproche que nous pourrions adresser à la Confédération.
Il est temps que la Suisse sorte de ses contradictions. L'attitude consistant à profiter de l’Union européenne sans la soutenir, voire pire en espérant qu'elle échoue, n’est pas très constructive. De plus, elle nuit à sa propre sécurité et à son économie. La première nécessité est donc à mon sens d’approuver les nouveaux accords bilatéraux, fort bien négociés par le Conseil fédéral.
A plus long terme, la question d’une participation pleine et entière ne doit pas être écartée. D'une part, pour apporter notre pierre à l'édifice qui protège nos valeurs et nos territoires. D’autre part, pour défendre nos droits, nos politiques et notre avenir de manière efficace et digne.
Nous aimons nous considérer comme les champions de la démocratie. Or, l’exigence fondamentale d’un vrai démocrate est de siéger dans les instances où se prennent les décisions qui le concernent.
Dans l’immédiat, la position de la Suisse face à l'Union européenne ressemble à celle d’un canton suisse qui refuserait de participer aux votations fédérales et d'élire des représentants à Berne, tout en reprenant largement les règles fédérales. Une situation aberrante que ses habitants qualifieraient à juste titre de contraire à leurs intérêts.