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Le scandale du F-35 révèle le vrai problème avec l'armée suisse

Le scandale du F-35 révèle le vrai problème avec l'armée suisse.
Le scandale du F-35 révèle le vrai problème avec l'armée suisseImage: watson
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Le scandale du F-35 révèle le vrai problème avec l'armée suisse

En 2022, le Conseil fédéral choisit en 2021 d’acheter 36 jets de combat F-35 pour six milliards de francs, mais ils devraient coûter au moins 1,3 milliard de plus. Samuel Bendahan, conseiller national vaudois du PS dénonce l’impunité budgétaire de l’armée.
06.07.2025, 07:1306.07.2025, 07:13
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De nombreux parlementaires prétendent que la situation financière de la confédération est particulièrement tendue, et qu’il faut faire des économies: si le Parlement persiste dans cette voie, ce sont des milliards en moins pour la population et la classe moyenne. Mais il est une institution qui est immunisée contre toute rationalité, tout contrôle, toute cohérence et tout devoir de rigueur dans la gestion des deniers publics: l’armée.

C’est ce qu’on appelle un double standard: on choisit celui qu’on préfère et on ne lui applique pas les mêmes règles qu’à tous les autres. Effectivement, celles et ceux qui ont le pouvoir aiment l’armée et les avions de combat, et pensent, idéologiquement, que d’acquérir les F-35, c’est la meilleure chose que l’on peut faire pour le bien commun, et tant pis pour les problèmes de pouvoir d’achat de la population.

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Chaque dimanche matin, watson invite des personnalités romandes à commenter l'actu ou, au contraire, à mettre en lumière un thème qui n'y est pas assez représenté. Au casting: Nicolas Feuz (écrivain), Anne Challandes (Union Suisse des Paysans), Roger Nordmann (conseiller stratégique, ex-PS), Damien Cottier (PLR), Céline Weber (Vert'Libéraux), Karin Perraudin (Groupe Mutuel, ex-PDC), Samuel Bendahan (PS) et la loutre de QoQa.

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La gestion des problèmes informatiques de l’armée est emblématique, entre surcoûts, retard et échecs complets: 7 projets qui totalisent à eux seuls 19 milliards de francs et aucun ne se déroule comme prévu. Mais ce n’est pas tout: entre les drones commandés à Israël qui ne fonctionnent pas (pour des centaines de millions), les scandales et fraudes chez Ruag et évidemment l’explosion des coûts du F-35, aucune autre organisation, publique ou privée, n’aurait eu droit à autant de clémence par rapport à tant d’argent jeté par les fenêtres. Tout cela pour quoi? Pour rien, car tous ces projets n’ont aucun effet positif sur la sécurité de notre pays, qui dépend, en grande partie, de notre entourage et de nos capacités à répondre aux risques avérés.

Une chose est particulièrement rageante dans le dossier des F-35: l’absence de redevabilité des responsables. Des vidéos circulent sur internet qui montrent que les parlementaires et responsables ont promis à la population qu’on bénéficierait de prix fixes pour ces avions de combat. Aujourd’hui, c’est clair que ce n’est pas le cas. Ce n’est pas grave: on change de discours. Les dirigeants de l’armée disent maintenant qu’on n’a finalement pas besoin d’autant d’avions, mais il faut en acheter à tout prix, et il faut les acheter à Trump, coûte que coûte, malgré le risque massif en matière de sécurité et de souveraineté.

Nous nous vantons d’avoir la démocratie directe, et il s’agit là d’une immense richesse de notre pays. Mais sur ce coup-là, elle a été lésée. D’abord, on fait des promesses pendant une votation populaire tout en s’abstenant de mettre sur la table l’avion qui sera acheté. Puis, on choisit l’avion le moins rationnel de tout point de vue, et quand une initiative est récoltée, en 2022, pour demander que le peuple se prononce sur le choix de l’avion, le Conseil fédéral Ninja-signe les contrats F-35 avant que l’initiative puisse être votée. Enfin, après que le débat a été tué, on dit que, finalement, tout ce qui avait été promis à la population, c’était n’importe quoi et on espère que les gens l’accepteront ainsi.

Tout le monde pense que la sécurité est un investissement important. Mais les dépenses dans ce domaine doivent absolument être évaluées avec la même rigueur que dans les autres secteurs. Si nous faisons cela, nous pourrions investir efficacement dans la sécurité réelle – au sens large – de la population, plutôt que dans des engins ultra-chers et qui ne répondent à aucun des défis géopolitiques auxquels nous devons faire face. Une chose est sûre: une armée qui produit scandale sur scandale, dois en subir les conséquences, sinon, chaque année, cela continuera, et c’est la population du pays qui le paiera tant en termes de sécurité affaiblie qu’en termes financiers.

Samuel Bendahan, chroniqueur de watson
Image: KEYSTONE
Samuel Bendahan est...

... docteur en Sciences économiques de la faculté des HEC de l’Université de Lausanne (Unil) et y enseigne ainsi qu’à l’EPFL. Ce Vaudois est également conseiller national PS, coprésident du groupe socialiste à Berne et membre de la Commission de l’Economie et des Redevances du Parlement. Il est consultant dans le secteur de la stratégie, de la gouvernance, du leadership et de la finance pour de nombreuses entreprises. Enfin, Samuel Bendahan préside la fédération suisse Lire et Ecrire, l’Œuvre Suisse d'entraide ouvrière (Oseo) et encore la coopérative d’habitation SCCH Le Bled.

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