Son dernier film a trusté plusieurs semaines les sommets sur la plateforme Prime Video. Un film de braquage rétro, avec un casting sacrément musclé pour donner vie à une histoire de gang de suprémacistes blancs dans le Washington rural des années 80.
Diplômé de la National Institute of Dramatic Art de Sydney au début des années 1990, Justin Kurzel (50 ans) s'est souvent tourné vers des personnages empreints de violence, au mode de fonctionnement hors-la-loi. De son entrée fracassante avec son premier long-métrage intitulé Les Crimes de Snowtown (2011), qui narrait le destin macabre d'un célèbre tueur en série australien, à son obsédant Macbeth (2015), ses expériences derrière la caméra ne sont pas nombreuses, mais intenses.
Sa filmographie est forte de six films et d'un documentaire (Ellis Park). Outre les deux susnommés, rappelons que la quasi-totalité de ses oeuvres n'a que rarement trouvé une place dans nos salles. Il fallait creuser et vous munir de différentes plateformes pour découvrir sa filmographie plutôt inconnue.
Souvent plébiscité par les sélectionneurs cannois, invité à la dernière Mostra de Venise pour présenter The Order, Kurzel était considéré comme l'un des cinéastes les plus prometteurs à avoir émergé en Australie. Sauf qu'il ne fait pas vendre auprès du grand public. Excepté Macbeth et son (raté) Assassin's Creed se sont frayés un chemin dans les cinémas helvétiques. L'adaptation du célèbre jeu vidéo, au budget conséquent (125 millions), lui a causé une brouette de regrets après coup:
Or, s'il a vu son métrage engranger plus de 250 millions au box-office, cela reste une anomalie dans son curriculum vitae. Même si Macbeth a accumulé 16 millions en fin d'exploitation - pour un budget de 15 millions -, ses autres travaux n'ont jamais été couverts de billets verts. Malgré l'ampleur, malgré un Michael Fassbender (dans Macbeth) habité, malgré le talent derrière la caméra, le succès est resté sur le pas de la porte de l'artiste australien.
Le grand public ou les distributeurs n'ont jamais misé sur le bonhomme, alors qu'il est l'un des cinéastes les plus talentueux de son époque. Minutieux dans l'exploration de ses sujets, il usait par exemple d'un filtre rouge pour appuyer le symbole du sang, omniprésent, brossant à la fois la culpabilité et l'ambition meurtrière des personnages dans Macbeth.
Cette violence exacerbée traverse sans cesse le travail de Kurzel, comme un refrain entêtant qui noircit ses pages de scénario; une fascination que Kurzel a renforcée dans tous les films qu'il a réalisés. La psychologie de la violence comme thématique fétiche, le metteur en scène est un fortiche quand il faut sonder l'âme frappée de la colère.
Mais pourquoi cette obsession pour la violence?
L'Australien répondait au site RogerEbert.com par cette phrase:
L'anatomie de la violence, oui, mais pas seulement. L'homme, fasciné par des réalisateurs tels que Sidney Lumet et William Friedkin, est un adepte de cinéma épuré. Alors, perdu le temps d'un film dans ce grand labyrinthe des productions à gros budget, le fils prodigue du cinéma australien, comme il avait été surnommé, a justifié ce désir d'en faire et maîtrise du genre dans The Order.
Semble-t-il vacciné après son expérience à la tête d'une grosse prod', Justin Kurzel s'évertue à pondre une filmographie solide et qui colle à ses désirs. Depuis 2019, ses derniers films (The True History of the Kelly Gang, Nitram, The Order) sont une preuve que l'Australien poursuit sa percée psychologique dans les limbes de la violence humaine.
Récemment, il a présenté sa série à la Berlinale de cette année, qui s'intitule The Narrow Road to the Deep North. Il narre un récit tortueux et puissant, celui de Dorrigo Evans (Jacob Elordi), un toubib australien plongé dans l’enfer des camps de prisonniers de guerre en Asie pendant la Seconde Guerre mondiale. Il fallait bien la vision d'un Justin Kurzel pour s'en saisir, avant de basculer prochainement, selon les dernières informations, dans le film d'horreur en compagnie de Nicole Kidman.