En démarrant American Girl, on pourrait croire qu'il s'agit d'une version longue de la série You: voix off du personnage principal, esprit torturé, faux-semblants, hallucinations morbides... Mais l'histoire est bien plus pertinente que celle d'un mec qui enferme ses victimes dans une boîte en verre.
American Girl est l'adaptation d'un roman du même nom de Jessica Knoll publié en 2015. La voix off, c'est celle de Mila Kunis qui incarne le personnage principal, Ani, une New-Yorkaise qui semble avoir une vie enviable et parfaite: un job de rédactrice au prestigieux New York Magazine, un fiancé riche et séduisant et une garde-robe de luxe. Mais si on gratte sous le vernis Chanel, on découvre un lourd secret.
Les vêtements d'Ani, sa voiture, sa bague de fiançailles aussi grosse qu'un rocher, sont une carapace pour celle qui vient d'un milieu modeste et qui, grâce à une bourse étant adolescente, a pu accéder à un lycée privé et huppé de New York, façon Dan Humphrey dans Gossip girl (les vrais savent).
La vie «parfaite» d'Ani s'effiloche lorsqu'un réalisateur lui demande de participer à un documentaire sur un événement dramatique ayant eu lieu dans son école, faisant plusieurs morts. Sous ce drame se cache une terrible vérité qui l'a traumatisée. Un soir, lors d'une fête alcoolisée, Ani est victime d'un viol collectif par trois de ses camarades masculins. Par la suite, cet événement est minimisé par ses agresseurs et mis en doute par les adultes de sa vie, comme sa mère. Elle se retrouve seule à se demander ce qui lui est vraiment arrivé, et si elle en est responsable.
Interviewée par USA today, l'auteure a raconté qu'en tant qu'élève dans une école privée, elle a bel et bien été victime d'un viol collectif similaire et a transformé son expérience comme point d'intrigue de American Girl.
Jessica Knoll, qui a écrit le scénario et produit le film, a choisi de ne pas être sur le plateau lorsque la scène du viol a été filmée. Elle explique que c'était surtout pour ne pas mettre mal à l'aise les acteurs.
En la regardant pendant le visionnage du film, l'auteure a été incapable de faire ce qu'elle a souvent fait: minimiser ce qui lui était arrivé.
Dans le film, l'année scolaire de l'adolescente prend une tournure encore plus dramatique. Deux élèves amis d'Ani font une tuerie dans l'école. Dans cette scène glaçante, deux de ses violeurs sont tués. Un autre, Dean, blessé, se retrouve en chaise roulante. Il devient ensuite un militant pour le contrôle des armes à feu, écrit un livre à succès et se présente au Sénat. Pour le grand public, il est un symbole de résilience, pour Ani, il est son violeur.
Cette partie de l'histoire a été inventée par Jessica Knoll. Elle-même lycéenne au moment de la tristement célèbre fusillade de Columbine, cette tuerie l'a toujours marquée, mais ce n'est pas pour cette raison qu'elle a inclus cette partie de l'histoire dans son livre.
Pour Jessica Knoll, la discussion autour de la violence sexuelle a changé depuis la publication du livre en 2015, en grande partie grâce au mouvement #MeToo. Mais elle espère que grâce à Netflix, elle pourra exposer le parcours d'Ani à un plus large public, notamment des hommes.
Elle se souvient avoir vu un jeune homme seul dans le public lors d'un événement littéraire à Boston. Au début, elle a eu peur qu'il s'agisse d'un militant des droits de l'homme avec un petit H, venu pour lui crier dessus. «J'avais tellement peur», a-t-elle déclaré. Puis, lorsqu'il a fait la queue pour faire signer son livre, il lui a demandé si ce genre d'événements étaient toujours «comme ça», c'est-à-dire s'ils étaient majoritairement fréquentés par des femmes. L'auteure a répondu par l'affirmative. Il lui a dit:
«American Girl» est disponible sur Netflix depuis le 7 octobre.