Le film est devenu un parangon de la culture pop, une sorte de film iconique qui possède nombre de gif partagés dans une discussion sur WhatsApp. Sexe Intentions (Cruel Intentions, en anglais), avec Ryan Philippe, Reese Witherspoon et Sarah Michelle Gellar a désormais son reboot, mais en série, 25 ans après.
Après une tentative pilotée par NBC en 2016, sans succès, c'est Prime Video qui s'y colle en se réappropriant le matériau de base: le roman de Pierre Choderlos de Laclos, publié au XVIIIe siècle: Les Liaisons dangereuses.
En 2024, la série se situe au Manchester College, proche de Washington DC, et non à New York comme le film. Et si vous pensez retrouver les mêmes noms, vous allez tomber rapidement de votre strapontin. Kathryn Merteuil se nomme à présent Caroline, Annette Hargrove (jouée par Witherspoon) s'appelle désormais Annie Grover (Savannah Lee Smith). Pour le personnage de Sebastian Valmont (Ryan Philippe dans le film), il prend le patronyme de Lucien Belmont (Zac Burgess).
Voilà, les présentations sont faites. Pour l'histoire, on parle d'une affaire de bizutage qui a mal tourné et qui menace le système de l'université. Les sororités et les fraternités sont sur les dents, la boule au ventre de voir leurs petites soirées cloisonnées (parfois débridées) voler en éclats. Au milieu de ce brouhaha universitaire, Caroline et Sebastian veulent garder leur place en haut de la pyramide. La première nommée décide même de mettre en place un plan: Sebastian doit séduire la fille du vice-président pour l'envoyer dans la gueule du loup, la sororité de Caroline. Derrière cette manigance, il est question de garder leur pouvoir et préserver leur réputation.
Sexe Intentions, en format sériel, joue de la nostalgie, tente de faire du fan service pour rameuter les amateurs du film. Le morceau «Bitter Sweet Symphony» de The Verve passe en boucle (un son qui a imprégné le film), ou la scène de la piscine est rejouée pour bien marqué le passage de témoin.
Sauf qu'une fois les quelques clins d'oeil évacués, un petit sourire en coin, la tension sexuelle du triangle amoureux n'opère jamais. L'entreprise est même à côté de la plaque, entre petites excitations et rencontres sensuelles désincarnées. Les beuveries se multiplient et Sexe Intentions s'étire. La recette (perdante) fait dire que l'histoire n'est pas calibrée pour cumuler plusieurs épisodes.
Le ton, le rythme, l'écriture; tout est ennuyeux. Si nous devons sauver un petit quelque chose, il nous vient d'un casting qui réussit à incarner ces morveux pétés de blé.
On pense à Zac Burgess, à la coupe mulet stylisée, intéressant dans sa partition de petit tombeur de pacotille. La perf' du gamin originaire d'Australie donne une bonne raison de garder un temps les yeux sur l'écran. Même constat pour Sarah Catherine Hook, dans la peau de Caroline, révélant, derrière le masque de la jeune femme intraitable, de petites fractures qui humanisent ce caractère calculateur.
Au final, les créatrices du show Phoebe Fisher et Sara Goodman n'injectent rien de folichon, rien de délicieusement scandaleux. Pire, elles s'enlisent dans un cadre désormais mythifié (et inopérant) des sororités et des fraternités aux problèmes mineurs. L'iconoclastie du teen-drama est fichue par terre par une série bâclée comme Sexe Intentions. C'est même la désespération qui chatouille les neurones.
Un certain ras-le-bol incarné à travers cette multiplication de productions adolescentes sans âme, qui n'est de loin pas un acte salvifique pour le genre. Sexe Intentions végète dans un état cadavérique et prend place dans la (lourde) bibliothèque des teen-drama inoffensifs, vains, malingres. Espérons que cette lassitude provoque une prise de conscience dans les rangs des studios, qu'elle essaimera les esprits créateurs pour redorer le blason des séries ados (on repense au film Virgin Suicides), un terrain de jeu aux multiples souffles, enchanteur quand le sujet est bien empoigné.
«Sexe Intentions» est à découvrir en intégralité sur Prime Video depuis le 21 novembre.