Les empires peuvent s'effondrer de différentes manières: une extension exagérée, un retard sur le plan militaire ou des épidémies. Les Etats-Unis testent actuellement une nouvelle variante qu'Eduardo Porter décrit dans le Washington Post:
La guerre commerciale déclenchée par les droits de douane sur les importations de voitures le prouve. Elle ne s'explique pas économiquement, et encore moins rationnellement. Qui pourrait imposer du jour au lendemain des droits de douane punitifs à ses voisins qui n'ont rien demandé, à ses principaux partenaires commerciaux et à ses alliés les plus importants, et croire sérieusement qu'il rendrait ainsi service à son pays? Quel président ou même dictateur le fait contre l'avis de la grande majorité des économistes?
Trump vient d'entériner 25% de droits de douane à partir du 2 avril pour toutes les importations de voitures et de pièces détachées. Et il est bien décidé à ne pas faire marche arrière cette fois-ci. «C'est permanent», explique le président américain. «A 100%». La guerre commerciale est ainsi définitivement lancée.
Dans sa volonté de rééquilibrer l'économie mondiale en faveur des Etats-Unis, Trump ne recule devant rien. Il ne s'aliène pas seulement ses deux principaux partenaires commerciaux, le Mexique et le Canada, mais il bouscule également les alliés américains en Europe et en Asie.
L'industrie automobile reste la plus grande du monde. Elle ne constitue pas seulement le cœur de l'économie allemande, elle crée également des centaines de milliers d'emplois dans le reste de l'Europe. La prospérité du Japon et de la Corée du Sud dépendent aussi en grande partie de Toyota, Hyundai et les autres.
Les alliés ne se plieront pas à la volonté de Trump, ils résisteront. Shigeru Ishiba, le premier ministre japonais l'a déjà annoncé: «Nous allons bien réfléchir à ce que sera la meilleure option pour notre pays. Nous examinerons attentivement toutes ces options et mettrons ensuite en œuvre la plus appropriée». Même son de cloche en Corée du Sud.
Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne a également un plan:
Depuis une publication dans le chat de Signal, dans laquelle JD Vance, Pete Hegseth et d'autres initiés de la Maison-Blanche se moquent des Européens, on ne se fait plus d'illusions à Bruxelles sur les relations avec Washington.
Trump promet aux Américains que sa politique douanière marquera le début d'un «nouvel âge d'or». Mais ce qui sonne, c'est la menace d'une récession, d'une hausse de l'inflation, de troubles sur les marchés financiers et d'investisseurs et de consommateurs inquiets.
Tous les voyants économiques étaient pourtant au vert au début de l'ère Trump. A Wall Street et dans les étages supérieurs des entreprises de la place, on se réjouissait des allégements fiscaux à venir et de l'allègement de la bureaucratie. On s'imagine qu'il y aura bien une solution pour cette histoire de droits de douane punitifs. Mais le ton a bien changé depuis la campagne électorale.
Michael Strain, du groupe de réflexion conservateur American Enterprise Institute, explique également dans le Wall Street Journal:
En parallèle, le milieu des affaires est lui aussi en proie à la cacophonie. Steven Cohen, directeur de Point72 Asset Management, s'en plaint: «Ce dont on hérite, c'est un mélange d'inflation persistante, de ralentissement de la croissance et d'austérité dans l'administration. Donc, pour la première fois, je suis moi aussi vraiment négatif».
Le secteur n'a pas non plus de raison d'être optimiste. En principe, l'administration Trump ne reconnaît jamais ses erreurs. On le voit actuellement dans la réaction à l'embarrassant scandale Signal. Les erreurs des membres haut placés du cabinet crèvent les yeux. Ils ont discuté sur un canal privé, facile à pirater par des professionnels, de plans d'attaque très secrets contre les Houthis au Yémen. Cela viole toutes les règles de sécurité imaginables. Malgré tout, la Maison-Blanche dément catégoriquement et tente sérieusement de présenter une fois de plus cette affaire comme une «chasse aux sorcières».
Parallèlement, la croyance que les juges puissent arrêter le gouvernement du milliardaire républicain s'estompe de plus en plus. Les marchés financiers pourraient-ils sauver la situation? Comme le relevait récemment Michael Cembalest, analyste chez JPMorgan:
(Traduit de l'allemand par Valentine Zenker)