Economie
Entreprise

Hausse des faillites en Suisse à cause d'une loi: +57% en juin

Grande augmentation des faillites en Suisse: on sait pourquoi.
Les faillites d'entreprises en Suisse connaissent une impressionnante augmentation cette année, soit de 45% depuis 2022.Image: Keystone, montage watson

Ce changement de loi a mis des milliers de sociétés suisses en faillite

Une réforme fiscale entrée en vigueur en janvier fait exploser les faillites en Suisse, avec +57 % en juin. Et voici pourquoi.
15.07.2025, 05:3215.07.2025, 05:32
Meret Häuselmann / Ch media
Plus de «Economie»

C’est une hausse qui frôle le record: 1136 faillites d’entreprises ont été enregistrées, en juin, dans toute la Suisse. Cela représente environ 400 cas de plus, soit une augmentation de 57% par rapport à juin de l’année précédente.

Une très forte augmentation

Déjà en mai, 300 faillites de plus avaient été signalées par rapport à l’année précédente. Depuis janvier, le nombre total de faillites d’entreprises a augmenté de 17,6% par rapport au premier semestre 2024. Ces chiffres ont été recueillis par l’association de créanciers Creditreform.

La responsable de cette hausse des faillites d'entreprises est, entre autres, une modification législative concernant la poursuite des amendes, impôts et taxes (lire encadré). Cette réforme est entrée en vigueur le 1er janvier 2025, mais ses effets ne sont visibles dans les statistiques que depuis peu. En effet, il peut s’écouler plusieurs mois entre l’ouverture d’une poursuite en faillite et l’insolvabilité effective d’une entreprise.

Modification de la loi - poursuite par voie de faillite
Jusqu’à la fin 2024, les créances de droit public, telles que les impôts, les amendes ou les cotisations sociales, ne pouvaient être recouvrées que par voie de saisie. Cela plaçait les institutions publiques dans une position désavantageuse, notamment lorsque l’entreprise ne disposait que de peu d’actifs saisissables et que la créance ne pouvait être couverte en totalité. Dans ce cas, l’office des poursuites établissait un acte de défaut de biens, et l’entreprise pouvait continuer à exister. La responsabilité de faire disparaître les entreprises insolvables par l’ouverture d’une procédure de faillite incombait donc aux créanciers privés.

Depuis le 1er janvier, les dettes fiscales peuvent, tout comme les dettes de loyer, entraîner la faillite d’une entreprise, ce qui implique l’arrêt de son activité commerciale et la mise en gage de l’ensemble de ses biens. Cela vise à garantir une égalité de traitement entre les différents types de créances. (mha)

Des menaces de faillite qui triplent

Bogdan Todic, membre de la Conférence nationale des offices des poursuites et faillites, s’attendait à une nette augmentation des faillites en juin:

«Beaucoup d’entreprises avaient accumulé pendant des années de nombreuses créances de droit public, parfois modestes. Celles-ci ont maintenant probablement été poursuivies de manière systématique, obligeant ces entreprises à déposer le bilan.»

Il est encore trop tôt pour mesurer précisément les effets de la réforme au niveau national. Il n’existe pas encore de données consolidées pour les 350 offices de poursuites du pays, et les chiffres de l’Office fédéral de la statistique ne couvrent que l’année précédente.

Mais certains cas concrets illustrent l’ampleur du phénomène, comme à l’office des poursuites de la ville de Saint-Gall, dirigé par Bogdan Todic, où les menaces de faillite ont triplé par rapport au premier semestre 2024: elles sont passées de 436 à 1176 durant les six premiers mois de l'année en cours.

Ces faillites seraient-elles avantageuses?

Une véritable «vague de faillites» s’abattra-t-elle donc sur les entreprises suisses dans les mois à venir?

«Je pense que le nombre de faillites d’entreprises va encore fortement augmenter dans les prochains mois»
Bogdan Todic

Selon lui, les faillites pourraient rester élevées pendant encore deux ans, avant de revenir progressivement à des niveaux comparables à ceux des années précédentes.

Bogdan Todic ne voit pas d’effet négatif de la réforme pour les entreprises. Au contraire: les entreprises insolvables seraient désormais liquidées plus rapidement, ce qui éviterait qu’elles n’aient un effet néfaste sur le marché. Cela représenterait un avantage pour l’ensemble de l’économie. Par ailleurs, la procédure avant une faillite reste longue:

«On reçoit plusieurs rappels, puis un acte de poursuite et, en dernier lieu, une menace de faillite. Celui qui ne paie toujours pas à ce stade n’a pas un problème d’oubli, mais un problème de liquidités. »

«L’Etat doit investir davantage»

La situation est différente pour les créanciers de droit public. L’ouverture d’une procédure de faillite engendre des coûts, variables selon les cantons. Alors que les créanciers privés renoncent souvent à recouvrer de petites dettes, il est théoriquement possible qu’une commune ouvre une procédure de faillite pour un montant de 20 francs, et y perde de l'argent au passage.

«L’Etat doit désormais mobiliser plus d’argent pour faire avancer les procédures de poursuite»
Bogdan Todic

Contactée, l’Administration fédérale des contributions (AFC) indique avoir émis 5 300 menaces de faillite au cours des six premiers mois suivant l’entrée en vigueur de la loi, mais seulement 120 faillites ont effectivement été ouvertes. Le coût total s’est élevé à 108 000 francs, pour un montant de créances impayées atteignant 15,6 millions de francs.

La part que l’AFC pourra effectivement récupérer via les faillites reste incertaine. En effet, en cas de faillite, les actifs encore disponibles sont redistribués selon trois classes de créanciers.

👇

  • Les salaires et pensions alimentaires sont prioritaires (1re classe).
  • Les cotisations sociales suivent (2e classe).
  • S’il reste encore des fonds, ceux-ci sont répartis entre les créanciers de 3e classe – ce qui inclut les créances fiscales.

45% de faillites en plus qu’en 2022

A partir de quel montant dû l’AFC ouvre-t-elle une procédure de faillite? Cette dernière ne le précise pas, car elle indique ne pas pouvoir divulguer ses critères internes. En raison du «changement de paradigme», une comparaison directe avec les années précédentes n’est pas possible, pas plus qu’une prévision fiable pour le reste de l’année.

Il apparaît en revanche clair que le système des faillites est déficitaire. Les administrations de faillite ne peuvent pas se financer uniquement par les frais, explique Todic:

«Et plus le nombre de cas augmente, plus la contribution publique est élevée»

L’association des créanciers Creditreform prévoit environ 10 000 faillites d’entreprises pour l’ensemble de l’année 2025, soit une hausse de 14% par rapport à l’an dernier et de 45% par rapport à 2022.

Les travaux à Lausanne
1 / 13
Les travaux à Lausanne

La gare de Lausanne

source: keystone
partager sur Facebookpartager sur X
Trois bébés léopards des neiges sont nés au Zoo de Zurich
Video: watson
Ceci pourrait également vous intéresser:
0 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
Le sale secret derrière le boom de l'or
Le prix du métal précieux ne cesse d'augmenter et il n'y vraiment pas de quoi se réjouir.
John Maynard Keynes, l'économiste le plus important du siècle dernier, qualifiait l'or de «relique barbare». Il avait toutes les raisons de le faire. L'attachement absurde à l'étalon-or par les Britanniques, Etasuniens et Français fut une cause majeure de la crise économique après la Première Guerre mondiale. Ce n'est qu'au plus fort de la Grande Dépression dans les années 1930 que le lien entre la monnaie et l'or fut rompu.
L’article