C’est une hausse qui frôle le record: 1136 faillites d’entreprises ont été enregistrées, en juin, dans toute la Suisse. Cela représente environ 400 cas de plus, soit une augmentation de 57% par rapport à juin de l’année précédente.
Déjà en mai, 300 faillites de plus avaient été signalées par rapport à l’année précédente. Depuis janvier, le nombre total de faillites d’entreprises a augmenté de 17,6% par rapport au premier semestre 2024. Ces chiffres ont été recueillis par l’association de créanciers Creditreform.
La responsable de cette hausse des faillites d'entreprises est, entre autres, une modification législative concernant la poursuite des amendes, impôts et taxes (lire encadré). Cette réforme est entrée en vigueur le 1er janvier 2025, mais ses effets ne sont visibles dans les statistiques que depuis peu. En effet, il peut s’écouler plusieurs mois entre l’ouverture d’une poursuite en faillite et l’insolvabilité effective d’une entreprise.
Bogdan Todic, membre de la Conférence nationale des offices des poursuites et faillites, s’attendait à une nette augmentation des faillites en juin:
Il est encore trop tôt pour mesurer précisément les effets de la réforme au niveau national. Il n’existe pas encore de données consolidées pour les 350 offices de poursuites du pays, et les chiffres de l’Office fédéral de la statistique ne couvrent que l’année précédente.
Mais certains cas concrets illustrent l’ampleur du phénomène, comme à l’office des poursuites de la ville de Saint-Gall, dirigé par Bogdan Todic, où les menaces de faillite ont triplé par rapport au premier semestre 2024: elles sont passées de 436 à 1176 durant les six premiers mois de l'année en cours.
Une véritable «vague de faillites» s’abattra-t-elle donc sur les entreprises suisses dans les mois à venir?
Selon lui, les faillites pourraient rester élevées pendant encore deux ans, avant de revenir progressivement à des niveaux comparables à ceux des années précédentes.
Bogdan Todic ne voit pas d’effet négatif de la réforme pour les entreprises. Au contraire: les entreprises insolvables seraient désormais liquidées plus rapidement, ce qui éviterait qu’elles n’aient un effet néfaste sur le marché. Cela représenterait un avantage pour l’ensemble de l’économie. Par ailleurs, la procédure avant une faillite reste longue:
La situation est différente pour les créanciers de droit public. L’ouverture d’une procédure de faillite engendre des coûts, variables selon les cantons. Alors que les créanciers privés renoncent souvent à recouvrer de petites dettes, il est théoriquement possible qu’une commune ouvre une procédure de faillite pour un montant de 20 francs, et y perde de l'argent au passage.
Contactée, l’Administration fédérale des contributions (AFC) indique avoir émis 5 300 menaces de faillite au cours des six premiers mois suivant l’entrée en vigueur de la loi, mais seulement 120 faillites ont effectivement été ouvertes. Le coût total s’est élevé à 108 000 francs, pour un montant de créances impayées atteignant 15,6 millions de francs.
La part que l’AFC pourra effectivement récupérer via les faillites reste incertaine. En effet, en cas de faillite, les actifs encore disponibles sont redistribués selon trois classes de créanciers.
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A partir de quel montant dû l’AFC ouvre-t-elle une procédure de faillite? Cette dernière ne le précise pas, car elle indique ne pas pouvoir divulguer ses critères internes. En raison du «changement de paradigme», une comparaison directe avec les années précédentes n’est pas possible, pas plus qu’une prévision fiable pour le reste de l’année.
Il apparaît en revanche clair que le système des faillites est déficitaire. Les administrations de faillite ne peuvent pas se financer uniquement par les frais, explique Todic:
L’association des créanciers Creditreform prévoit environ 10 000 faillites d’entreprises pour l’ensemble de l’année 2025, soit une hausse de 14% par rapport à l’an dernier et de 45% par rapport à 2022.